Jean Hindriks: “Ce n’est pas une réforme des pensions, c’est du cosmétisme”

gouvernement fédéral Vivaldi
Olivier Mouton
Olivier Mouton Chef news

Le professeur de l’UCLouvain est très critique à l’égard de l’épure présentée par l’équipe De Croo. “On ne pouvait pas attendre autre chose d’un gouvernement aussi faible”, constate-t-il.

La Vivaldi fédérale a accouché d’une réforme des pensions, mais… ceci n’est pas une réforme. Tel est l’avis de Jean Hindriks, président de l’Economics School of Louvain et grand spécialiste de la question.

Est-ce une réforme suffisante?

On devrait sabrer le champagne parce qu’ils ont trouvé la poudre de perlimpinpin? Non, soyons sérieux: ceci n’est pas une réforme, c’est du cosmétisme, du maquillage. Au fond, cela reflète la fragilité du gouvernement fédéral, c’était impossible qu’il accouche d’une réforme de fond.

Cela devrait réduire le coût du veillissement de 0,5% à l’horizon 2070?

0,475%, soyons précis: ils ont été jusqu’à la troisième décimale. En 2070, je ne serai pas là pour vérifier, je ne sais pas comment ils vont évoluer ça?

Mais sur les six mesures de cette soi-disant réforme, quatre vont coûter de l’argent dont le bonus-pension et l’intégration des congés de paternité, le plafonnement de la péréquation pour les fonctionnaires ne concernera qu’une minorité de cas et la contribution sur le deuxième pilier rapportera à tout casser 100 ou 150 millions à partir de 2028. Or, la charge des pensions a augmenté de 15 milliards ces cinq dernières années.

Ce n’est plus du tout sous contrôle. C’est catastrophique.

Cela pourra-t-il convaincre l’Europe qui conditionnait le paiement de l’argent du plan de relance à cette réforme?

Franchement, j’en douterais et si c’était le cas, cela poserait question sur le discernement européen.

Ils essayent de faire du bricolage, mais clea me fait surtout penser à l’art de procrastiner. C’est un peu comme ces fumeurs qui annoncent qu’ils arrêteront de fumer, mais qu’ils commenceront demain… Ce sera en réalité au prochain gouvernement d’agir.

La mesure concernant la péréquation des fonctionnaires n’est-elle pas intéressante?

C’est un tout petit premier pas, que j’ai trouvé intéressant, en effet. Mais on parle d’un plafonnement à 0,3% de cette hausse automatique. J’ai pris la peine de chercher: dans les 16 corbeilles de métiers des fonctionnaires, trois quarts ne sont pas concernés par la mesure qui ne concerne, en outre, que les fonctionnaires contractuels. Mais c’est un pas dans le sens d’un plafonnement de l’indexation qui coûte énormément d’argent, notamment pour les pouvoirs publics.

Les personnes qui côtisent pour le deuxième pilier sont mises à contribution?

Là encore, cela ne concerne pas grand-monde et à partir de 2028. Cela ne touchera que ceux qui ont des grosses pensions, en cumulant la pension légale et cette cotisation, soit une pension supérieure à la pension maximale des fonctionnaires. Sur les quatre millions de Belges qui cotisent à une hauteur de 5 milliards chaque année, c’est une toute petite minorité, 1 à 2% peut-être.

Cette “réforme”, si on parlait d’environnement, on dirait que c’est du greenwashing. C’est du pensionwashing…

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