Que révèle l’affaire LabOdoo?

L’enseignement en alternance souffre de la concurrence que se livrent Région wallonne et Fédération Wallonie- Bruxelles. © Getty Images
Pierre-Henri Thomas
Pierre-Henri Thomas Journaliste

La formation en alternance, voie royale pour l’emploi, ne fonctionne pas en Wallonie. La faute à une dispersion des compétences, explique l’ancien administrateur délégué de l’UWE.

Quelle place les entreprises doivent-elles occuper dans l’enseignement? La question a pris un tour particulier suite à l’interpellation, par un député PTB, de la ministre Caroline Désir au parlement de la Fédération Wallonie Bruxelles (FWB). L’interpellation concernait le LabOdoo, ce camion pédagogique qui peut venir, à la demande d’un professeur, expliquer aux élèves ce qu’est une entreprise. Le député PTB Jean-Pierre Kerckhofs estimait que l’entreprise wallonne n’avait rien à faire à l’école. La ministre Caroline Désir avait répondu qu’il s’agissait “d’une situation interpellante à plus d’un titre” et avait demandé à la commission chargée de traquer toute activité de propagande de se saisir du dossier.

Aujourd’hui, au cabinet de la ministre, on est étonné de l’ampleur prise par le débat. “Il ne s’agit au final que d’une procédure classique, explique Jean-François Mahieu, porte-parole de la ministre Désir. Nous sommes interpellés par un député. Nous répondons que nous allons demander l’avis de la commission. Cela ne va pas plus loin.”

Et Jean-François Mahieu rappelle que la même commission a été saisie il y a quelque temps à propos du “prix du PS” remis aux meilleurs élèves des écoles primaires de Huy, ou au sujet de l’interview de la coprésidente d’Ecolo Rajae Maouane parue dans un manuel scolaire.

“Si l’école va vers l’entreprise, il faut aussi permettre à l’entreprise d’aller vers l’école.”

Mais ce débat montre la difficulté des liens entre l’école et l’entreprise. “Si l’école va vers l’entreprise, il faut aussi permettre à l’entreprise d’aller vers l’école”, estime Olivier de Wasseige, l’ancien administrateur délégué de l’Union wallonne des entreprises (UWE). Il existe diverses initiatives, dit-il. “La Fondation pour l’enseignement, qui rassemble les fédérations patronales et des pouvoirs organisateurs, a mis en place des projets. Citons par exemple Entr’apprendre, qui permet d’envoyer des professeurs en immersion en entreprise pendant quelques jours. Il y a aussi des associations comme celle que je préside, ‘100.000 entrepreneurs’, qui sensibilisent à l’entreprise. Wallonie Entreprendre a également quelques professeurs détachés qui sensibilisent à l’entrepreneuriat.”

Mais l’enseignement francophone souffre d’un grand problème au sujet de la formation en alternance en raison de la concurrence délétère à laquelle se livrent Région wallonne et FWB. Il y a d’un côté une structure régionale, l’IFAPME, et de l’autre les CEFA (centres de formation en alternance) qui relèvent de la FWB. “L’école instrumentalise les élèves en les orientant vers les CEFA et non vers l’IFAPME uniquement pour des questions budgétaires… car une partie du financement de la Fédération est basée sur le nombre d’élèves, et quand un élève passe de l’enseignement vers l’IFAPME, la FWB perd de l’argent.

Résultat, la formation en alternance, qui est dans les pays voisins la ‘voie royale’ pour l’emploi, présente des chiffres catastrophiques chez nous”, constate Olivier de Wasseige qui plaide pour la disparition de ce combat des chefs et le regroupement, sous une casquette ou une autre, de cette compétence.

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