Le Puy du Fou en Wallonie, reflet d’un monde polarisé, devenu fou

Philippe de Villiers, président du conseil général de Vendée, créateur et scénariste du Parc du Puy du Fou, en 2003. (Photo by FRANK PERRY / AFP)
Olivier Mouton
Olivier Mouton Chef news

Le souhait d’installer ce parc d’attraction français en Wallonie générerait de l’emploi. Mais il véhicule une idéologie “patriotique” revisitant l’histoire. Un bras de fer politique est possible, préjudiciable pour l’économie. Une métaphore de notre époque.

Le Puy du Fou souhaite s’installer en Wallonie. Les responsables de ce parc d’attraction, né en Vendée, visitent les lieux pour tenter de trouver chaussure à leur pied. Après avoir écarté le rachat du Monde Sauvage d’Aywaille, ils s’orientent désormais vers d’autres sites, dont celui de l’aérodrome de Cerfontaine.

Ce parc est un succès d’envergure en France: il attire deux millions et demi de visiteurs par an et ne fait pas mauvaise figure aux côtés de géants comme Disneyland. L’internationalisation est désormais au rendez-vous: après l’Espagne en 2021 et des spectacles partout en Europe, la Belgique est à l’agenda.

Un village encerclé

Seulement voilà. Le Puy du Fou est l’illustration du succès d’une idéologique “patrotique” teintée d’extrême droite qui progresse partout en Europe. Le parc a été créé par la famille du souverainiste Philippe de Villiers, ancien candidat à la présidentielle en France. Depuis sa création en 1989, le parc raconte avec des effets spectaculaires l’histoire de France et de Vendée, mais sous l’angle d’un village encerclé luttant contre l’envahisseur. Il s’agit de défendre le royaume, la monarchie, le catholicisme…

Les atteintes à la vérité historique ne sont pas abstentes et le discours véhiculé n’est pas “politiquement correct”.  “Le véritable problème réside surtout dans l’idéologie sous-jacente derrière les spectacles qui y sont présentés, à savoir antirépublicaine, anti-égalitaire, identitaire, xénophobe et qui masque les inégalités sociales et de genre”, a fustigé Olivier Biérin, député Ecolo. “Comment répondez-vous aux craintes de l’importation en Wallonie d’un projet politique lié à l’extrême droite ?”

“Des leçons de morale”

Willy Borsus (MR), ministre de l’Economie, botte en touche: “Ce que j’ai pu voir des récentes créations du Puy du Fou me semble être des créations artistiques orientées vers la scénographie moderne et de haut niveau.”

“J’ai adoré le Puy du Fou, j’y retournerai”, appuie Denis Ducarme (MR), chef de file libéral à Charleroi, sur LN24. Qui lance: “La levée de boucliers d’une partie de la gauche contre l’implantation de ce nouveau parc en Wallonie traduit encore sa prédilection à donner des leçons de morale plus qu’à créer des emplois !”

Pour être de bon compte, la perspective d’un investissement de 200 à 300 millions d’euros et la création de 700 emplois suscite une consensus assez large dans la classe politique, au-delà de ces échanges polémiques.

Patriotisme contre wokisme

Le Puy du Fou, métaphore de notre monde? Les débats sur la loi immigration en France témoignent d’une fuite en avant entre des idées d’extrême droite qui se diffusent de plus en plus dans la société et un wokisme agressif provoquant souvent l’inverse de ce qu’il revendique. L’absence de majorité présidentielle et le dialogue de sourds entre les différents blocs de l’Assemblée nationale ont donné lieu à un blocage, puis à une récupération politique nauséabonde. Ecartelé entre deux radicalismes, le président court comme une poule sans tête.

En Belgique, les polarisations s’accentuent également et nous n’en sommes peut-être qu’au début, avec la perspective d’une Flandre très à droite et d’une Wallonie très à gauche en juin prochain. Tiens donc, et si les organisateurs du Puy du Fou étaient amenés à créer en Wallonie un spectacle autour de la Bataille des Eperons d’or, mythe de la nation flamande et victoire… contre les Français. On imagine d’avance les rugissements…

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