Von der Leyen met en priorité la prospérité et la compétitivité “durables” de l’UE
La candidate à la présidence de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a mis en priorité jeudi la prospérité et la compétitivité “durables” de l’UE, dans son allocution devant les députés européens, en vue d’un second mandat. La dirigeante sortante de l’exécutif européen s’est aussi érigée en cheffe de file pour “mener la bataille de toutes les forces démocratiques”.
Ursula von der Leyen doit convaincre, ce jeudi à Strasbourg, une majorité absolue de 361 députés européens de lui donner leur confiance pour repartir cinq ans à la présidence de l’exécutif européen. Pour stabiliser sa tripartite conservatrice (PPE), socialiste (S&D) et libérale-centriste (Renew), elle doit convaincre aussi des Verts, voire certains souverainistes d’ECR, dans un hémicycle où l’extrême droite est davantage présente.
Son discours de près d’une heure a été interrompu à plusieurs reprises par les applaudissements, tranchant avec celui d’il y a cinq ans où elle n’avait réussi son élection qu’à neuf voix près.
Un tableau sombre
Le tableau qu’elle a dressé n’est cependant pas rose. “Nous nous trouvons dans une période marquée par l’anxiété et l’incertitude profondes des Européens”, constate-t-elle. “Les familles souffrent du coût de la vie et du logement. Les jeunes s’inquiètent pour la planète, pour leur avenir et à l’idée d’une éventuelle guerre. Les entreprises et les agriculteurs se sentent coincés. Tout cela est symptomatique d’un monde dans lequel tout est instrumentalisé et sujet à controverse.”
À ses yeux, “une Europe forte peut relever ce défi.” L’Allemande de 65 ans assure qu’elle n’acceptera jamais “la polarisation extrême de nos sociétés”. “Et jamais je n’accepterai que les démagogues et les extrémistes détruisent notre mode de vie européen. Je me tiens aujourd’hui prête à mener ce combat aux côtés de toutes les forces démocratiques dans cette assemblée”. Sa diatribe contre la tentative “d’apaisement” du Premier ministre hongrois Viktor Orban vis-à-vis du président russe Vladimir Poutine a été le moment le plus applaudi de son discours.
L’économie avant tout
Pour autant, sa vision d’une Europe forte passe en priorité par l’économie. Ainsi, les premières lignes de ses orientations politiques visent à “faciliter la vie des entreprises et leur permettre d’exercer avec plus de rapidité leurs activités en Europe.” Chaque commissaire européen devra étudier comment alléger la charge administrative, en particulier sur les PME. Cela passe aussi par un “pacte pour une industrie propre” que Mme Von der Leyen s’engage à présenter dans les 100 jours. “Il permettra de créer des marchés pilotes dans tous les domaines, de l’acier propre aux technologies propres”. Le tout devra “garder le cap du Pacte vert pour l’Europe”. À cet égard, la candidate promet d’inscrire l’objectif de réduction des émissions de 90% à l’horizon 2040 dans la loi européenne sur le climat.
L’un des leviers financiers sera la mobilisation de l’épargne privée, que la candidate veut voir davantage investie dans l’agriculture, l’industrie et les technologies numériques ou stratégiques, avec l’aide de la Banque européenne d’investissement (BEI). “Nous proposerons une Union européenne de l’épargne et des investissements. Les start-ups européennes ne devraient pas avoir besoin de se tourner vers les États-Unis ou l’Asie pour financer leur expansion”. En outre, un nouveau Fonds européen pour la compétitivité soutiendra des projets communs et transfrontières dans l’innovation. “Il garantira qu’une technologie stratégique sera développée et fabriquée ici, en Europe.”
En matière agricole, “il est essentiel que les agriculteurs disposent d’un revenu équitable et suffisant, mais aussi de récompenser les agriculteurs qui travaillent en harmonie avec la nature”, souligne l’Allemande.
Union de la défense
Face aux menaces militaires, et comme annoncé dans sa campagne, la conservatrice allemande veut faire de l’Union européenne de la défense une réalité. Cela passera par la désignation d’un(e) commissaire chargé(e) de la défense, la création d’un véritable marché unique pour les produits et services de défense. “Nous devons investir plus dans les capacités de défense haut de gamme. Par exemple un système complet de défense aérienne – un bouclier aérien européen. Non seulement pour protéger notre espace aérien, mais aussi comme symbole fort de l’unité de l’Europe en matière de défense.”
Pour renforcer la lutte contre la criminalité, Ursula von der Leyen compte faire d’Europol “une agence de police véritablement opérationnelle et augmenter ses effectifs de plus du double au fil du temps”.
Quant aux frontières extérieures, elles seront elles aussi renforcées grâce à une “gestion numérique européenne pleinement opérationnelle”. La candidate propose de tripler le nombre de garde-frontières et de garde-côtes européens de Frontex, pour le porter à 30.000. Et prône un nouveau “pacte pour la Méditerranée” qui fera la part belle aux “partenariats stratégiques”, des accords qui restent controversés avec des pays moins soucieux des droits humains.
Parmi une pléiade d’autres mesures, elle prône un système unique de réservation et de billetterie numériques pour faciliter la vie des voyageurs sur les lignes ferroviaires transfrontières, garantissant leurs droits.
Elle s’engage aussi pour un nouveau train de mesures pour l’industrie chimique visant à simplifier le règlement REACH et à clarifier la question des “substances chimiques éternelles” ou PFAS.
Lutte contre la pauvreté
En matière sociale, “nous augmenterons significativement nos financements en faveur d’une transition juste”, dit-elle sans citer de chiffres. Ursula von der Leyen prévoit la “toute première stratégie européenne de lutte contre la pauvreté” et “un tout premier plan européen pour des logements abordables.” La démocrate chrétienne s’est attardée sur la santé mentale des jeunes, confrontés aux médias sociaux, à une exposition excessive aux écrans et à des pratiques addictives. “Nous lutterons contre le fléau du harcèlement en ligne. Nous prendrons des mesures contre les techniques de conception addictive de certaines plateformes”, a-t-elle assuré.
Elle promet aussi une feuille de route pour les droits des femmes, un “bouclier européen de la démocratie pour lutter contre les manipulations de l’information et les ingérences étrangères.