Lire la chronique d' Amid Faljaoui
Un Belge sur deux veut un gouvernement autoritaire : chiche ?
C’est un classique de l’histoire des sondages, mais il n’empêche, ses résultats font peur.
Le dernier sondage réalisé en Belgique par la RTBF et le quotidien Le Soir montre qu’un Belge sur deux souhaite une gouvernance autoritaire. Une partie non négligeable de Belges avouent donc un faible pour un chef ou une cheffe providentielle dont l’autorité ne serait pas entravée par des juges, des médias ou des fonctionnaires. Fort sagement, les auteurs de ce sondage préconisent de ne pas juger les réponses, mais plutôt de se mettre à l’écoute de la population, de comprendre les peurs exprimées. Et ils ajoutent qu’il vaut mieux tenter de convaincre ces sondés que des sociétés plus ouvertes protègent mieux le citoyen que les gouvernements autoritaires. En bon soldat, c’est ce que je vais faire dans le cadre de cette chronique économique d’utilité publique.
En premier lieu, je dirai à ces sondés de ne pas croire tout ce que je dis, mais de vérifier via Google, par exemple, tous mes arguments. Je leur dirai, par exemple, d’aller voir en Turquie. Là-bas, c’est un homme fort qui dirige le pays. Il n’est donc pas entravé par qui que ce soit. C’est d’ailleurs cela son problème. Alors que son pays va mal, il ne fait aucune confiance aux experts. Exactement ce que veulent une partie des Belges dans ce sondage. Le résultat, c’est qu’Erdogan a viré plusieurs gouverneurs de sa banque centrale qui lui ont dit qu’il devait augmenter les taux d’intérêt et non pas les baisser pour lutter contre l’inflation. Il ne les a pas écoutés, il les a virés et aujourd’hui, l’inflation tourne autour des 65%. Et son pays est tellement instable que même les entreprises qui veulent quitter la Chine hésitent à s’installer en Turquie, alors que ce pays est aux portes de l’Europe et qu’il a une main-d’oeuvre qualifiée. Prenons notre ami Poutine. Là encore, les Russes ont voté pour lui, car ils croyaient en l’homme providentiel et au sauveur de la Sainte Russie. Mais aujourd’hui, des mères russes posent la question de savoir ce que vont devenir leurs fils envoyés au front ukrainien. Elles demandent à Poutine si Zelensky est vraiment un nazi et quel est l’intérêt de prendre des terres aux Ukrainiens alors que la Russie a des millions de kilomètres carrés inexploités. Or, chacun sait que la Russie a déjà perdu cette guerre décidée par un homme autoritaire comme en voudrait une partie des Belges. Au sortir de la guerre, la Russie va être ramenée à l’âge de pierre. Qui voudra encore investir dans ce pays s’il reste au pouvoir ? Les oligarques qui l’ont fait Roi doivent sans doute lui dire merci depuis qu’ils ont perdu leur yacht et leurs villas de prestige.
Quant aux Chinois, leur pays est sorti de la misère noire grâce à un mélange de capitalisme et de communisme. Aujourd’hui, ils découvrent que leur dernier président est devenu fou en raison du covid. Aujourd’hui, celui-ci refuse toujours l’aide de l’Occident et laisse l’immunité collective jouer son rôle. La priorité est donc donnée à l’économie contre la vie. L’inverse de nos médiocres démocraties. Résultat : selon le modèle du magazine britannique The Economist, on aura 1,5 million de morts en Chine d’ici peu. Eh oui, c’est ça l’autoritarisme : on passe d’une politique de zéro covid au covid à l’infini et sans demander l’avis à la population. D’ailleurs, les élites chinoises adorent tellement ce gouvernement plébiscité indirectement par une partie des Belges qu’une bonne partie d’entre eux sont partis se réfugier à Singapour.
Et je ne parle même pas de l’Iran où la jeunesse se révolte contre ce gouvernement dévot en apparence, mais corrompu jusqu’à la moelle en réalité. En résumé, les gouvernements autoritaires, ça marche sur le papier, et uniquement dans l’imaginaire des foules frustrées. La réalité, c’est l’absurdité du confinement en Chine. La réalité, c’est l’inflation galopante en Turquie. La réalité, c’est l’absurdité d’une guerre contre un ennemi imaginaire. La réalité, c’est l’absurdité des gouvernements de Dieu sur terre comme en Iran. En vérité, le danger des crises, c’est qu’elles provoquent la peur. Et la peur est l’ennemie de la pensée.
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