Le bureau de consultance Eight Advisory publie une étude qui tire la sonnette d’alarme. Si les fondamentaux restent bon, le manque de choix et visibilité en matière d’énergie, de fiscalité, d’éducation… devient préjudiciable. Un avertissement, en plein blocage budgétaire et politique.
Les signaux sont à l’orange pour la Belgique en matière de compétitivité. Si certains de nos fondamentaux (éducation, infrastructures…) nous permettent de sauver les dégâts, la dynamique même de notre économie fragilise l’édifice.
Dans un rapport sur la compétitivité que vient de publier le bureau de consultance Eight Advisory, la Belgique se trouve en quatorzième position sur cinquante-huit pays analysés. Loin derrière des nations européennes comme les pays scandinaves, l’Irlande ou la Suisse. Les auteurs du rapport, Philippe Fimmers et Alexis Karklins, décodent et apportent des éléments de réflexion importants pour le blocage politique actuel.

“Prôner l’excellence!”
“La Belgique a toujours été dans une position favorable par le passé, mais on voit que certains signaux ne sont plus au vert, souligne Philippe Fimmers. Nous devons être vigilants et prendre garde au fait que notre pays perd du terrain par rapport aux concurrents européens. Même nos fondamentaux comme l’éducation ou les infrastructures sont sous pression. Ces dernières années, nos classements Pisa ne s’améliorent pas: c’est un point d’attention, car c’est cela qui génèrera les chercheurs ou les responsables de notre économie de demain. On doit mettre la barre haut et prôner l’excellence !”
Quand on parle de compétitivité avec les entrepreneurs, il est surtout question du coût du travail et de l’énergie, ainsi que de la surcharge réglementaire. Cela transparaît-il dans ce rapport? “Ce sont deux sujets très importants pour la Belgique, mais que l’on retrouve aussi dans d’autres pays européens, acquiesce Alexis Karklins. Nous faisons cette étude tous les deux ans depuis 2013. La Belgique se trouve cette fois-ci dans la catégorie B, mais derrière des pays où les salaires sont élevés comme la Suède ou le Danemark. Bien sûr, le coût du travail est important, mais les investisseurs et les entreprises que nous accompagnons ne regardent pas que ce critère, même si cela compte. Il faut surtout créer un environnement favorable à la création de richesse et à sa répartition, de la façon la plus soutenable possible.”
Eight Advisory passe en revue tous les classements existants et tient compte de tous les critères possibles. “On peut être très mauvais en matière de fiscalité et pourtant attirer l’activité et les investissements, ajoute Alexis Karklins. Le coût du travail est une chose, mais il y a aussi la productivité, l’efficacité, le niveau de compétences…”
Cohérence et rapidité
“Notre défi principal consiste à avoir un niveau de cohérence entre tous les niveaux de pouvoir et de garder cette capacité à réformer en profondeur, estime Philippe Fimmers. Certains pays voisins, structurés de façon plus simple, prennent des décisions de façon plus rapide. En Belgique, par exemple, nous n’avons pas encore suffisamment pris la mesure à temps de la transition énergétique: notre dépendance à l’égard d’autres pays est un vrai problème. D’autres pays innovent et investissent, ce qui porte ses fruits. Notre pays doit prendre des mesures également au niveau de l’emploi ou de la fiscalité. Tout le monde est conscient de ce qu’il faut faire, mais il faut agir sous peine de ne plus faire partie du peloton de tête.”
Il est vital de développer une vision à long terme et “arrêter de changer tout d’un budget à l’autre, ou d’une majorité à l’autre”, insistent les auteurs. Parce que cela “ne crée pas de la stabilité et de la visibilité”.
Un mal européen? “Les sept premiers pays de notre classement sont tous européens, souligne Alexis Karklins. Parmi eux, il y a deux pays qui développent un modèle intéressant: la Suisse et l’Irlande. Ce sont des pays attractifs pour la fiscalité des entreprises, mais la qualité de la vie y reste très élevée.”