Au cœur des tractations de l’Arizon, il y avait comment faire contribuer les “épaules les plus larges” sans plomber l’attractivité économique du pays. Voici ce qui est sorti du chapeau.
Après 20 heures de négociations, l’Arizona a, selon ses dires, trouvé un compromis entre justice fiscale et réalisme économique. Notamment via le paquet de mesures dénommé “épaules les plus larges et revenus divers”. Des mesures qui devrait contribuer à hauteur de 2,1 milliards d’euros à l’horizon 2029.
Doublement de la taxe sur les comptes-titres : 462 millions d’euros
La mesure phare du paquet “épaules larges” concerne le doublement de la taxe sur les comptes-titres. Le taux actuel de 0,15% applicable aux portefeuilles dont la valeur moyenne excède 1 million d’euros passera à 0,30%.
Cette augmentation était une revendication forte de Vooruit, qui l’avait initialement présentée comme sa “taxe des millionnaires”. Son président Conner Rousseau peut se féliciter d’avoir obtenu gain de cause : la mesure devrait rapporter 462 millions d’euros en 2029.
Néanmoins si le taux double, le champ d’application reste inchangé. Concrètement les actions nominatives, actuellement exclues de la taxe, le resteront. Un point d’équilibre trouvé face aux réticences du MR, qui s’opposait à toute extension du périmètre de taxation.
Sociétés de management : de 15% à 18% sur les dividendes
Autre pomme de discorde pendant les négociations : les sociétés de management, ces structures utilisées notamment par les indépendants et professions libérales pour optimiser leur fiscalité. L’objectif initial de Vooruit était de limiter les “abus” liés à ces véhicules fiscaux. Pour certains, dont Vincent Van Peteghem (CD&V), ce mécanisme offrait trop d’avantages fiscaux et permettait à de nombreux revenus d’échapper partiellement à l’impôt des personnes physiques (IPP).
La mesure finalement adoptée s’avère néanmoins plus large puisqu’elle concerne l’ensemble des PME et plus seulement les seulement les sociétés de management dans le cadre d’une modification du régime VVPR-bis (taux de précompte mobilier réduit). Le taux de précompte mobilier sur les dividendes distribués par une société à ses actionnaires passera ainsi de 15% à 18%.
Cette hausse de 3 points de pourcentage doit générer 300 millions d’euros de recettes supplémentaires en 2029.
Taxe bancaire renforcée : 150 millions annuels
La taxe bancaire, qui existait déjà, sera également augmentée. Dans ses tableaux budgétaires, l’Arizona prévoit des recettes supplémentaires de 150 millions d’euros chaque année.
Cette contribution du secteur financier s’inscrit dans la logique de faire participer les acteurs économiques les plus solides à l’effort de redressement budgétaire. Les banques belges, qui affichent des résultats en forte hausse ces dernières années grâce à la remontée des taux d’intérêt, étaient une cible évidente.
Au total : 912 millions d’euros de contribution directe
Avec ces trois mesures principales — doublement de la taxe sur les comptes-titres, hausse de la taxation des dividendes et renforcement de la taxe bancaire —, les “épaules les plus larges” contribueront directement à hauteur de 912 millions d’euros en 2029, à vitesse de croisière.
A ces 912 millions s’ajoutent ce qui a été classé comme revenus divers soit :
- La taxe de 2 euros sur les petits colis provenant de l’extérieur de l’Union européenne (300 millions)
- La limitation des abus d’avantages sociaux (50 millions)
- Des modifications dans le régime des droits d’auteur (30 millions)
- Le renforcement de la lutte contre la fraude fiscale avec le recrutement de 377 inspecteurs (472 millions de recettes espérées)
- La création d’un parquet national financier (175 millions)
L’indexation partielle : 800 millions d’économies
Au-delà de ces mesures ciblant directement les patrimoines et revenus du capital, on rajoutera que le gouvernement a également décidé de moduler l’indexation salariale pour les revenus les plus élevés.
Les salaires supérieurs à 4.000 euros brut ne bénéficieront pas d’une indexation proportionnelle en 2026 et 2028. Ces salariés recevront un montant fixe inférieur à ce qu’une indexation complète leur aurait apporté. Cette mesure doit permettre à l’État d’économiser 800 millions d’euros.
Une disposition qui touche donc une partie de la classe moyenne supérieure, au-delà des seuls “très hauts revenus”. Elle s’accompagne d’un symbole politique « fort » : les parlementaires et ministres ne bénéficieront d’aucune indexation pendant toute la législature.
Un équilibre fragile
Ce paquet “épaules larges” illustre aussi l’équilibre précaire du gouvernement Arizona. D’un côté, Vooruit et Les Engagés ont obtenu des mesures symboliques de justice fiscale. Conner Rousseau se félicite ainsi d’avoir “sauvé beaucoup de choses sociales” et “lutté pour le pouvoir d’achat”. De l’autre, le MR peut affirmer avoir préservé l’essentiel : pas de taxe sur la fortune, pas d’extension du périmètre de la taxe sur les comptes-titres aux actions nominatives, et surtout, pas de hausse généralisée de la TVA. Georges-Louis Bouchez martèle que « le cadie reste totalement préservé”.
Reste à savoir si ces 2,1 milliards d’euros suffiront.