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Superprofits : et si on taxait l’Etat ?

Lire la chronique d' Amid Faljaoui Amid Faljaoui, directeur des magazines francophones de Roularta.

Faut-il taxer les superprofits des entreprises et en particulier les superprofits des entreprises actives dans l’énergie ? C’est la question qui suscite débat en Belgique, en France et dans plusieurs pays européens.

Quand je dis débat, ça dépend où : en Belgique, la gauche et la droite sont pour cet impôt de guerre qui ne dit pas son nom et le seul sujet de discussion en ce moment, c’est comment surmonter les obstacles juridiques pour le faire. Mais revenons à ma question : faut-il taxer les superprofits ? La réponse des politiques va dans le sens de celui de l’opinion : oui, car à situation exceptionnelle, il faut des mesures exceptionnelles. Dis comme ça, la messe est dite. Mais bon, comme je dis souvent que cette chronique est impertinente et décalée, ce serait trop facile d’aller dans le sens de la majorité.

En fait, ce qui intéressant, c’est de se demander pourquoi, cette idée pleine de bon sens, n’est pas aussi simple que cela à mettre en oeuvre – que ce soit juridiquement ou économiquement. D’abord, sur le plan juridique, c’est quoi un superprofit ? Le terme n’existe pas en droit. Il y a profit, point barre. Imaginez qu’on définisse cela comme un profit imputable à une situation extraordinaire, comme par exemple, la guerre en Ukraine. Que dire alors des pharmaciens qui, selon ce même raisonnement, ont profité du COVID ou des géants comme Amazon ou Netflix qui ont aussi profité du fait qu’on nous a tous mis derrière des barreaux dans un parc à bébé pendant plusieurs mois. Question : on surtaxe les pharmaciens aussi ? Tant qu’à rester taquin, faut-il aussi taxer nos Etats sous prétexte que les recettes fiscales ont augmenté grâce aux bons résultats des entreprises ou grâce au fait que demain via l’inflation, nos salaires seront augmentés par indexation salariale automatique qui nous feront passer dans une tranche supérieure de taxation ?

N’est-on pas en droit de dire à l’Etat qu’il profite de la situation, vu que c’est une situation exceptionnelle ? Reprenons le cas des entreprises énergétiques. Les faire contribuer via une sorte d’impôt de guerre ? OK, mais jusqu’où aller dans la taxation ? Les plus fiévreux diront “mais jusqu’au maximum, pardi !”. D’accord, sauf que pour lutter contre le réchauffement climatique, les entreprises qui sont au premier plan, sont justement ces entreprises actives dans l’énergie. Ce sont elles qui vont affronter un gigantesque mur de l’investissement, ce sont elles qui doivent utiliser leurs profits pour investir dans la dé-carbonation de l’économie et le développement des énergies renouvelables. Vous voyez, je ne dis pas qu’une taxation sur les superprofits n’est pas envisageable. J’essaie seulement de montrer modestement qu’entre le discours du café du commerce, celui de la tribu “yakafaukon” et la subtilité de la réalité, il y a un gouffre.

Après, je suis très lucide sur la vie politique et économique. Je sais que beaucoup de vaches sacrées vénérées hier par les uns ou les autres feront demain d’excellents hamburgers. Vous, vous en pensez quoi de ces superprofits ? N’hésitez pas à m’envoyer vos commentaires : Feedback is a gift.

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