Pour le biostatisticien, Tom Wenseleers, avec Omicron, “nous nous dirigeons peut-être vers une situation semblable à celle de mars 2020”
Les données épidémiologiques montrent que le variant Omicron peut contourner l’immunité construite par une infection ou une vaccination. En plus de cela, Omicron est légèrement plus contagieux que Delta. De nombreux scientifiques craignent que ces deux propriétés réunies ne nous ramènent à la même situation que mars 2020″, déclare Tom Wenseleers, biostatisticien à la KU Leuven.
Le nouveau variant Omicron se répand comme une traînée de poudre en Afrique du Sud parmi une population déjà presque entièrement infectée. Dans les pays dont la population est vaccinée, comme le Royaume-Uni, le nombre d’infections par le variant Omicron est également en augmentation.
Quelle est la gravité de la situation ?
TOM WENSLEERS. Cela n’a pas l’air bon. La vitesse à laquelle Omicron progresse est inquiétante. En Afrique du Sud, le record d’infections du premier pic a été battu en quelques semaines. La valeur R est estimée à environ 3, ce qui est extrêmement élevé. Il est particulièrement inquiétant qu’Omicron soit particulièrement doué pour contourner l’immunité construite par une infection antérieure. Omicron surpasse cette immunité quatre à cinq fois plus que le variant Delta. De même, Omicron peut contourner la protection mise en place par les vaccins. Au Royaume-Uni, par exemple, qui a déjà procédé à des piqûres de rappel à grande échelle, Omicron perce à la même vitesse qu’en Afrique du Sud. Ces résultats pouvaient également être attendus sur la base des mutations identifiées du virus.
Une bonne nouvelle, Omicron serait moins pathogène.
WENSELEERS. Il est trop tôt pour tirer cette conclusion. En Afrique du Sud, c’est principalement une population jeune qui a été infectée. Quatre-vingts pour cent des patients admis ont moins de 50 ans. Nous ne connaissons donc pas encore l’effet du variant Omicron sur une population plus âgée. Sur les 166 patients admis pour Covid au cours des deux dernières semaines à Tshwane – l’épicentre de l’épidémie Omicron – 9 sont morts à ce jour. Et sur 33 patients de plus de 60 ans, 5 sont déjà morts. En regardant ces chiffres, on ne peut pas dire que ce variant provoque des infections bénignes. Et même si Omicron était 10 fois moins pathogène que le variant Delta, nos soins pourraient quand même être en difficulté, car nous serions confrontés à un tsunami de nouvelles infections.
Que pouvons-nous faire pour atténuer l’impact ?
WENSELEERS. “Honnêtement, je ne sais pas. Nous revenons à une situation qui pourrait être un peu similaire à celle de mars 2020, car nous avons à nouveau une immunité très limitée contre cette nouvelle souche de virus. De plus, Omicron est trois fois plus contagieux que le virus original de Wuhan. Nous pourrions tout mettre en oeuvre pour développer, produire et administrer à la population un vaccin universel ou un vaccin adapté à Omicron. Malheureusement, ce processus est encore trop lent. Omicron devrait devenir le variant dominant à la fin de ce mois, en janvier au plus tard. Nous devrions donc disposer d’un vaccin adapté et l’administrer à la population dans les deux mois. Mais ni les chaînes de production des entreprises pharmaceutiques ni le cadre juridique ne permettent cette rapidité. Cette lenteur de réaction pourrait coûter des millions de vies dans le monde. Et les mesures drastiques – de type confinement strict – ne sont pas une stratégie viable ou souhaitable à long terme, car elles ont un coût économique et social immense. Pour moi, l’espoir se trouve surtout dans un programme mondial ultrarapide pour adapter les vaccins immédiatement. Pour les vaccins à ARNm, où seule une petite modification est nécessaire et où le profil de sécurité resterait exactement le même, la production de la forme modifiée devrait commencer immédiatement. Toutefois, BioNTech ne serait pas en mesure de livrer les premiers vaccins modifiés avant 100 jours. Et nous ne pouvons pas attendre aussi longtemps.”
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