Pour cette avocate, “les bénéficiaires du ‘cash for car’ risquent d’être pénalisés en 2021”
Le “cash for car” vient d’être annulé par la Cour constitutionnelle. Un enterrement de première classe pour un mécanisme mal emmanché dès son adoption en 2018. Trois questions à Anne-Valérie Michaux, avocate chez Reliance.
Pourquoi la Cour constitutionnelle a-t-elle annulé le “cash for car” ?
La Cour fait un copier-coller de l’avis émis par le Conseil d’Etat à l’époque de l’adoption de la loi. Elle se fonde sur les articles 10 et 11 de la Constitution, qui consacrent le principe d’égalité. La Cour constitutionnelle considère que les salariés qui n’ont pas de voiture de société (et qui sont donc payés en cash) sont traités différemment des salariés qui bénéficient du cash for car, alors qu’ils sont dans des situations identiques. Le cash for car implique une exonération fiscale importante (4% de taxation) et une exonération totale des cotisations ONSS. La Cour estime que ce traitement différencié ne répond pas à l’objectif poursuivi par la loi, qui est de réduire les émissions de CO2 en retirant des voitures de société des routes. Le bénéficiaire du cash for car n’a aucun incitant à réduire son impact environnemental : il peut faire ce qu’il veut de son cash, y compris acheter une voiture d’occasion très polluante. C’est très différent du budget mobilité, adopté en 2019, qui réoriente les salariés vers des voitures moins polluantes, les transports en commun, les vélos électriques, etc.
Quelle est la conséquence de cet arrêt pour les salariés qui ont opté pour le “cash for car”?
La Cour constitutionnelle demande au gouvernement de proposer une alternative, d’ici la fin 2020. Une solution pourrait être, par exemple, de considérer que le cash for car peut être utilisé dans le cadre du budget mobilité. Mais le gouvernement n’est pas obligé de prendre une nouvelle mesure. Si aucune loi n’est adoptée, les bénéficiaires du cash for car seront soumis, dès 2021, au régime fiscal et aux cotisations ONSS classiques. Ils seront donc pénalisés financièrement, ce qui pourrait paradoxalement les réorienter vers le choix d’une voiture de société. A noter que l’employeur n’est pas tenu juridiquement de combler la perte de revenus étant donné que, si le régime fiscal ou parafiscal est modifié, ce n’est pas de sa responsabilité. Une négociation salariale avec les personnes concernées est néanmoins toujours possible.
Pourquoi le “cash for car” n’a-t-il pas rencontré le succès escompté ?
Parce que ce mécanisme n’est pas avantageux. Avec les allocations perçues en remplacement de la voiture de société – et, encore plus, en remplacement d’une carte essence, qui est très fortement défiscalisée -, un salarié ne peut pas se payer une nouvelle voiture moins polluante. Donc, ce régime n’est réellement intéressant que pour les gens qui n’ont plus besoin de leur voiture ou qui font le choix de s’en séparer.
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