Les dernières estimations de la Commission européenne sur l’état de santé de la Belgique ne sont pas folichonnes : en 2027, à politique inchangée, le déficit public titillerait les 6%. Insoutenable.
Les mises en garde sur le dérapage persistant de nos finances publiques se multiplient. Voici quelques jours, la Banque Nationale publiait, dans sa revue économique, un article comparant les trajectoires budgétaires de notre pays avec celles de quatre autres pays industrialisés : la France, l’Italie, le Japon et les États-Unis.
Effet boule de neige
Et la conclusion était que dans un scénario réaliste, sans changement majeur, nous nous acheminons rapidement vers le moment où la dette deviendra incontrôlable et gonflera mécaniquement sous ce qu’on appelle l’effet boule de neige. C’est le moment où le taux moyen payé sur la dette dépasse le taux de croissance nominale du pays. À ce moment, mécaniquement, la dette augmente chaque année. Cet effet boule de neige, selon la BNB, nous risquons de l’atteindre en 2031.
Mais au-delà de cet aspect mécanique des choses, la dynamique de notre dette publique inquiète pour plusieurs raisons. Même si nous ne tenons pas compte de la charge de la dette, c’est-à-dire des taux à payer chaque année, nous sommes incapables d’avoir un budget en équilibre. On en connaît les raisons : le vieillissement démographique qui augmente les dépenses en soins de santé et en pensions, le faible taux d’emploi parmi la population en âge de travailler, et la nouvelle donne en matière de dépenses militaires, tout cela dans un contexte de croissance molle. Et à cela s’ajoute donc la hausse des taux d’intérêt.
6% de déficit
Les projections de la Commission européenne, qui a déclenché contre notre pays une procédure pour déficit excessif, montrent une aggravation de notre problème, avec des déficits publics proches de 5,3% du PIB l’an prochain et de 5,9% en 2027. La dette publique, qui est aujourd’hui à environ 105% du PIB, passerait à 112,2% en 2027.
À plus long terme, si l’on se reporte aux estimations de la Banque Nationale, à politiques inchangées, notre ratio dette/PIB la Belgique grimperait à 137% en 2034… « La principale cause de cette augmentation rapide de la dette en Belgique est le déficit primaire élevé et persistant, souligne la Banque Nationale.
Si l’Europe nous demande de fournir des efforts en considérant le déficit primaire, c’est-à-dire sans regarder la charge des taux d’intérêt, dans la vraie vie, cette hausse des taux est un problème majeur. Les paiements d’intérêts devraient en effet plus que doubler d’ici 2034 pour atteindre à lui seul 5 % du PIB.
Si l’on compare cette dynamique à celle de pays très endettés, comme l’Italie ou le Japon, le cas belge est préoccupant. Certes l’Italie et le Japon affichent un endettement public plus élevé que la Belgique. Mais il devrait rester grosso modo stable dans les dix ans à venir.
En revanche, le dérapage est inquiétant pour trois pays : les États-Unis (dont la dette publique à politiques inchangées atteindrait 161% du PIB en 2034), la France (144%) et notre pays (137%).
Attention aux chocs
Pire encore, tout cela ne tient pas compte de chocs qui pourraient arriver.
Si les taux d’intérêt sur les obligations nouvellement émises par le trésor devaient être systématiquement de 1% (100 points de base) de plus à partir de l’an prochain, la dette gonflerait de 6 points de PIB de plus (on dépasserait donc les 140% du PIB).
Et si nous respectons vraiment la promesse faite à nos partenaires de l’OTAN de dépenser 3,5% du PIB pour la défense (la promesse est même de dépenser 5%, mais dont 1,5% est considéré comme une dépense de sécurité, avec un champ très large comprenant la cybersécurité, la sécurité intérieure …), le ratio de la dette augmenterait, toujours à l’horizon 2034, de 7 points de PIB.
En cumulant les deux, nous ne serions dès lors pas loin des 150%. Un niveau insoutenable.
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