Lire la chronique d' Amid Faljaoui
Nobel d’économie au pompier pyromane ?
Le prix Nobel d’économie attribué ce lundi est plutôt une petite surprise.
Les médias parlent improprement du Nobel d’économie. En réalité, ce prix prestigieux est distribué par la banque de suède, car de son vivant Alfred Nobel n’avait pas prévu un Nobel d’économie. La petite histoire dit que c’est parce que son épouse avait eu une incartade avec un économiste…
Mais revenons au prix qui a été attribué, non pas à une personne, mais à trois, dont Ben Bernanke, économiste, mais aussi ancien président de la banque centrale américaine entre 2006 et 2014. C’est ça qui étonne cette année. Le prix d’économie a été décerné à 3 chercheurs connus pour leurs travaux sur les crises bancaires dont un ex- banquier central. Ben Bernanke a, par exemple, étudié comment les retraits massifs d’argent des banques par les épargnants avaient aggravé la crise des années 30.
Les deux autres économistes qui vont recevoir en même temps que lui ce prix ont développé des modèles économiques montrant la fragilité des banques face aux rumeurs. En clair, tout doute sur la solvabilité d’une banque conduit au retrait massif des dépôts dans cette même banque.
Au final, cette remise du prix Nobel d’économie nous concerne tous, car aujourd’hui le rôle des banques centrales est, c’est le cas de le dire… central ! Elles doivent freiner puis briser l’inflation, mais sans trop casser la croissance économique. Les plus optimistes diront que ce prix Nobel d’économie est aussi une consécration de Ben Bernanke, car il était aux commandes de la banque centrale américaine quand a éclaté la crise des subprimes en 2008. Autrement dit, nous avons tous eu la chance d’avoir un homme qui avait bien étudié la crise bancaire de 1929 et qui a donc pu prendre les bonnes dispositions en 2008 et les années suivantes pour nous éviter le naufrage. Oui, sauf qu’on est pas obligé d’applaudir non plus. Car aujourd’hui, avec le recul, d’autres économistes reconnaissent aussi que Ben Bernanke en voulant notre bien a provoqué notre perte. En réduisant les taux d’intérêt à 0% et en ouvrant large les vannes pour financer la dette publique, il a empêché les mécanismes d’ajustement naturel de se produire. Suite à ça, on a assisté à une gigantesque bulle en Bourse et dans l’immobilier. En clair, c’est ce même prix Nobel d’économie qui est aussi à l’origine de nos soucis aujourd’hui.
Comme le fait remarquer Geert Noels, un économiste flamand bien connu dans le nord du pays, cela pose question sur la pertinence de ce prix Nobel. Pour ma part, la seule chose à garder à l’esprit, c’est que ce prix Nobel aura au moins une utilité : montrer que la santé des banques est importante. La question se pose aujourd’hui avec beaucoup d’acuité, car le grand public ne le sait pas, mais ce qui fait peur aux banquiers aujourd’hui, c’est le Crédit suisse. Une banque suisse dont on craint tout bonnement la faillite, car son cours de Bourse a chuté de 60% depuis le début de l’année. Et le Crédit suisse, c’est 5 fois la taille de la banque Lehman Brothers en 2007. Comme le disent mes amis de la lettre d’information TTSO, “oui, ça vaut le coup de s’intéresser cette année au Nobel d’économie” .
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