L’industrie belge, entre soulagement et inquiétude : “Trump pourrait très bien imposer de nouvelles taxes”

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Sebastien Marien Stagiair Data News 

L’Union européenne et les États-Unis ont conclu un accord commercial. Les organisations patronales comme la FEB et Agoria poussent un ouf de soulagement. Kathleen Van Brempt, vice-présidente de la commission du commerce international au Parlement européen, reste prudente. Pour elle, la guerre commerciale n’est pas terminée.

Les États-Unis renoncent à la menace d’une taxe de 30 %. À partir du 1er août, les importateurs américains paieront un droit de douane standard de 15 % sur les biens européens. La taxe s’appliquera à tous les secteurs, sauf exceptions. Elle ne pourra pas être combinée à d’autres droits d’entrée.

Le pire est évité

Cette mesure coûtera environ 5 milliards d’euros par an à l’économie belge, pour un volume d’exportations de plus de 30 milliards d’euros. Mais les fédérations sectorielles estiment qu’on a évité le pire. « Il y a une grande différence entre une taxe de 15 % et une de 30 % », souligne Bart Steukers, CEO d’Agoria. « 15 %, c’est une pilule amère. 30 %, c’est un désastre. Avec 15 %, on peut encore s’en sortir. Surtout avec un dollar faible. Les États-Unis devront de toute façon importer, donc le coût sera répercuté sur les consommateurs américains. »

Steukers insiste : il faut relativiser. Le tarif de 15 % reste plus élevé que les 10 % appliqués aux entreprises britanniques, mais il correspond à celui conclu avec le Japon la semaine précédente. Il est aussi inférieur à celui imposé à la Chine. « Les entreprises belges comparent désormais leur position à celle de leurs concurrentes dans d’autres régions. »

Inquiétudes persistantes

Kathleen Van Brempt est moins optimiste : « L’accord ne contient pas de clause de gel. Trump pourrait très bien imposer de nouvelles taxes ou de nouvelles exigences. » Le tarif de 50 % sur l’acier et l’aluminium reste en vigueur, bien que Washington ait signalé vouloir le réévaluer. Les États-Unis considèrent l’Europe comme un allié dans la lutte contre l’acier chinois bon marché.

Des exceptions au tarif de 15 % sont prévues, notamment pour les médicaments génériques, certains produits agricoles, des spiritueux et des pièces pour l’aéronautique. « Ce sont des produits dont les États-Unis dépendent de l’Europe », note Van Brempt. Steukers y voit un espoir : « Beaucoup d’entreprises belges produisent des composants pour les F-35. »

Il est trop facile de blâmer les Américains. La faute est aussi chez nous

Les barrières européennes

L’accord prévoit que l’Europe achètera 750 milliards de dollars d’énergie, de puces et de matériel militaire américains sur trois ans. Elle devra aussi investir jusqu’à 600 milliards d’euros dans l’économie américaine. Van Brempt s’inquiète : « L’UE n’a pas compétence pour imposer de tels investissements. Il s’agira donc d’engagements privés, sans cadre précis. » Un engagement flou, potentiellement source de tensions si non respecté.

Steukers rappelle que l’UE doit réagir : « Si notre compétitivité dépend de taxes étrangères, c’est problématique. L’Europe doit réduire ses propres barrières, conclure des accords plus vite et renforcer son marché intérieur. » Le FMI estime que les barrières internes équivalent à une taxe de 44 % pour les biens, 110 % pour les services — trois fois plus qu’aux États-Unis. « C’est intenable. Il est trop facile de blâmer les Américains. La faute est aussi chez nous. »

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