Embuild s’inquiète de la baisse des investissements des communes wallonnes, un “signal pour le quotidien des Wallons”. Car ce manque d’investissement touche l’ensemble des citoyens et fragilise l’activité économique locale. En toile de fond, un nouveau bras de fer entre la Région et les communes.
Embuild Wallonie, la branche wallonne de la fédération de la construction, tire la sonnette d’alarme. Dans de nombreuses communes au sud du pays, les projets avancent au ralenti. Voiries non réparées, bâtiments publics en attente de rénovation, places publiques ou écoles dont les travaux sont repoussés… Faute de financement.
Un ralentissement des investissements communaux que Thomas Dermine, Bourgmestre de la Ville de Charleroi, ne manque pas de confirmer sur LinkedIn : « Je confirme, l’absence de visibilité post-2026 sur le dispositif régional de financement des communes nous force à mettre sur pause plusieurs projets et à reporter nos investissements en voirie / rénovation énergétique. Plusieurs de mes collègues bourgmestres de grandes et petites communes en Wallonie sont dans des logiques similaires à des niveaux variables. »
Tous concernés
Or derrière ces ralentissements, il ne s’agit pas seulement d’un enjeu pour la construction : c’est tout le quotidien des ménages et de nombreux secteurs locaux qui se retrouvent directement impactés.
Thomas Dermine explique que cette réduction des dépenses passera par une diminution du service au citoyen : “En réduction des dépenses. Il y a toute une série de services dans les garderies, dans les repas scolaires qu’on n’offrira plus.”
Car en Wallonie, l’investissement local n’est pas un luxe ; il conditionne l’entretien du patrimoine public, l’activité d’une grande partie des PME, la qualité de vie et la capacité des communes à anticiper les défis majeurs de demain. Les pouvoirs locaux financent une grande partie des infrastructures que les citoyens utilisent chaque jour : routes, trottoirs, crèches, halls sportifs, égouttage, écoles, maisons de repos. « Or les communes représentent près d’un tiers des investissements publics en Wallonie. Quand elles ralentissent, c’est toute la Région qui tousse », souligne Embuild.
Si le secteur de la construction est l’un des premiers touchés, il n’est pas le seul. Chaque chantier reporté signifie également des services publics qui attendent, des associations locales qui s’adaptent avec moins, des dynamiques économiques qui s’essoufflent et des habitants qui voient leur environnement se dégrader.
Depuis 2025, c’est la dégringolade
La fédération attire l’attention sur le fait qu’entre 2020 et 2024, différents plans européens, fédéraux et régionaux avaient fortement soutenu l’activité du secteur. Les entreprises tournaient bien, les chantiers avançaient.
Mais depuis début 2025, la tendance s’est inversée. Les entreprises actives dans les travaux publics enregistrent une baisse de 15% des commandes. Les budgets d’investissement dans les communes wallonnes ont, eux, diminué de 37,5%.
“Une diminution certes habituelle en début de législature communale, mais particulièrement préoccupante dans le contexte actuel”, selon Embuild. “Les conséquences commencent déjà à se voir : des projets sont reportés, faute de visibilité financière”, ajoute la fédération.
La majorité Azure pointée du doigt
Même constat pour Thomas Dermine, qui l’a rappelé sur la RTBF : “À Charleroi, il y a une série de projets que l’on a mis sur pause parce qu’aujourd’hui, on est incapable de voir quels sont les leviers budgétaires qu’on aura à l’avenir. Et donc, par exemple, la rénovation de places publiques, certains projets structurels de rénovation d’écoles ou autres… on les a mis sur pause, le temps de voir et d’avoir plus de perspectives budgétaires”.
Ce qui se joue bien sûr au niveau politique, c’est le changement de majorité au niveau régional. La majorité MR-Engagés est occupée à réduire ses coûts, mais oblige aussi les communes à assainir leurs finances publiques, notamment via le plan oxygène.
C’est une cure d’amaigrissement à tous les étages, du fédéral aux communes, ce qui a poussé certaines d’entre elles à augmenter une flopée de taxes.
Et en 2026 ?
À partir du 1er janvier 2026, le Fonds extraordinaire régional d’investissement (FERI) remplacera le Fonds régional pour les investissements communaux (FRIC). Cette transformation ajoute une inquiétude supplémentaire. En effet, via ce nouveau fonds, les communes wallonnes recevront chaque année, une dotation régionale libre d’affectation, qu’elles pourront utiliser pour financer tout projet d’investissement public. Concrètement, l’argent prévu pour rénover une école, une voirie ou un hall sportif pourrait être utilisé pour boucler le budget de fonctionnement.
Cette nouvelle donne est une source d’inquiétude supplémentaire pour Embuild. “Le secteur de la construction demande une chose simple : que les moyens publics initialement prévus pour l’investissement restent utilisés pour… l’investissement. Pas pour des dépenses courantes. Pas pour combler temporairement des trous”, prévient Embuild.
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