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Lénine, le zéro-covid et les jupes de l’Etat

Lire la chronique d' Amid Faljaoui Amid Faljaoui, directeur des magazines francophones de Roularta.

L’actualité est rusée, mais vraiment rusée. Après le choc du Covid, nous pensions être passés sans transition comme on dit à la télévision à un autre choc, celui de la guerre en Ukraine. Et puis voilà que le Covid fait son retour dans l’actualité au moment même où des pays comme la Belgique ou la France lèvent la plupart des contraintes sanitaires.

La Chine ne le montre pas, mais sa direction est en mode panique. Fidèle à sa politique de zéro covid, le pays ferme des villes entières de plusieurs millions d’habitants dès qu’elle constate quelques cas de covid dans la ville en question. Il faut dire que l’exemple de Hong Kong fait peur, car c’est aujourd’hui la ville qui affiche le taux de mortalité le plus élevé au monde concernant le virus. Pour s’éviter des morts et surtout la honte après avoir clamé haut et fort que sa méthode anti-covid était la meilleure au monde, la Chine en est réduite à fermer une ville comme Shenzhen.

Les personnes qui possèdent un iPhone savent que c’est dans cette ville qu’ils sont fabriqués. C’est là que se trouve l’usine de Foxconn, le fournisseur historique d’Apple et accessoirement le plus grand employeur de la planète en nombre d’ouvriers. Cette ville capitale sur le plan économique n’est pas uniquement le sous-traitant d’Apple, c’est le sous-traitant du monde entier sur le plan informatique. C’est également la ville qui héberge aussi le 4e plus grand port au monde. Ce qui veut dire que la mise en quarantaine de cette ville va évidemment impacter les chaines d’approvisionnements, et donc le secteur informatique occidental. On se tire les cheveux en écoutant ce genre de nouvelles. Elles ne sont pas agréables à entendre et me font penser à ce que disait l’ancien président Jacques Chirac, “les emmerdes ne viennent jamais seul, elles viennent en escadrille“. Ou alors, on se dit, au contraire, que c’est une méga-incitation pour l’Europe à se rendre enfin plus indépendante du reste du monde.

Le coronavirus nous a rappelé que nous devions nous rendre indépendants sur le plan sanitaire. L’invasion en Ukraine nous rappelle aujourd’hui que nous devons aller très vite pour nous rendre indépendants sur le plan énergétique. Et l’attitude belliqueuse de Poutine nous a aussi rappelé que nous devions devenir indépendants sur le plan militaire et ne pas compter uniquement sur les Etats-Unis. En revanche, devenir indépendant de la Chine, c’est une autre paire de manches.

Pour l’heure, le danger de ce confinement en Chine, c’est de retrouver l’Europe coincée par la Russie et la Chine. De l’un, nous dépendons de notre énergie et de notre alimentation au travers du prix du blé et des céréales, et de l’autre nous dépendons pour nos ordinateurs, voitures et autres téléphones dits intelligentes.

Bref, notre indépendance économique va prendre du temps, surtout à l’égard de la Chine. En revanche, plus que jamais, le citoyen se retrouve dépendant de l’Etat. A chaque choc, on le voit, il ou elle demande en urgence l’aide de l’Etat. On vient encore de le voir pour la hausse du prix du carburant ou du chauffage.

Volonté d’indépendance d’un côté et ultra-dépendance de l’autre, c’est avec cette contradiction que nous allons devoir vivre tout au long de cette année 2022. Lénine avait raison de dire qu’il y a des décennies où il ne se passe rien, et des semaines où se produisent des décennies. Les semaines que nous vivons lui donnent raison.

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