L’agence de notation américaine Standard & Poor’s a revu à la baisse vendredi son évaluation de la notation de la Région de Bruxelles-capitale vendredi. L’absence persistante de gouvernement régional inquiète l’agence de notation. Fitch annonce également une dégradation de la note, mais pour la Belgique.
À terme, cette décision pourrait avoir pour effet de rendre l’accès aux crédits plus onéreux pour la Région de Bruxelles-capitale.
S&P a abaissé la note de Bruxelles de A+ à A, sur une échelle allant de AAA à D, tout en continuant à considérer la Région comme intéressante pour les investisseurs
La dernière dégradation de la note de S&P date de mars 2024, lorsque l’agence l’avait baissée à A+, assortie d’une perspective stable, contre AA- auparavant. Cette note était sous la menace d’une dégradation depuis septembre 2022 : S&P avait, à l’époque, assorti le rating AA- d’une perspective négative.
La note de Fitch pour Bruxelles affiche actuellement AA- (dernière mise à jour en février) et celle de Moody’s AA avec une perspective négative (octobre 2024).
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Qu’est-ce que cela veut dire concrètement ?
Une note A indique “une forte capacité à remplir ses obligations financières”, mais signifie également que S&P estime que Bruxelles est quelque peu vulnérable aux changements économiques.
S&P se dit particulièrement préoccupée par l’absence d’un nouveau gouvernement régional depuis les élections de juin 2024 et l’absence de perspectives fiscales pluriannuelles qui en découle.
“Nous pensons que l’absence d’un gouvernement doté des pleins pouvoirs a entravé la capacité de la Région à faire face aux pressions budgétaires, en particulier en réduisant les coûts”, peut-on lire. “Le déficit budgétaire de 2024 a entraîné une augmentation significative de la dette. Ce chiffre est nettement plus élevé que ce que S&P avait prévu”, a fait valoir l’agence de notation.
Belgique
Fitch revoit donc également sa note à la baisse ce soir, mais pour la Belgique. Elle passe à A+. C’est la première dégradation depuis décembre 2016.
Les réactions
Le Voka évoque le prix d'”un an d’immobilisme politique” en Région bruxelloise
La dégradation de la note de la Région bruxelloise par l’agence de notation Standard & Poor’s est “le résultat de choix politiques”. C’est ce qu’a déclaré samedi René Konings, directeur de l’organisation patronale bruxelloise néerlandophone Voka Metropolitan. “En raison de blocages politiques et du refus de dialogue, la ‘marque Bruxelles’ est depuis un certain temps déjà sous pression auprès des entrepreneurs. Cette perception négative reçoit désormais une confirmation internationale”, a-t-il ajouté.
Selon l’organisation patronale bruxelloise néerlandophone Voka Metropolitan, cette baisse de la note mènera à une hausse des charges d’intérêts pour la Région bruxelloise. L’organisation ne souhaite toutefois pas que cette augmentation pèse sur les entreprises. “Les entrepreneurs à Bruxelles comptent déjà parmi les plus lourdement taxés du pays. Beaucoup d’entre eux se demanderont si cela vaut encore la peine d’investir à Bruxelles”, prévient René Konings, directeur de l’organisation patronale bruxelloise néerlandophone Voka Metropolitan.
Le responsable patronal dénonce “un an d’immobilisme politique” qui a désormais “un coût tangible”. “Mais à plus long terme, les dommages sont plus profonds : l’image de Bruxelles se dégrade et la politique fiscale reste incertaine”, ajoute-t-il. “Cette perception négative reçoit désormais une confirmation internationale”, pointe-t-il encore. René Konings estime que les incertitudes causées par “l’inaction politique” risquent de mener à des reports d’investissement ou des déménagements “en périphérie de Bruxelles ou dans des villes des pays voisins”.
Le Voka Metropolitan lance un nouvel appel aux partis bruxellois, afin d’accélérer la formation d’un gouvernement de plein exercice, et plaide pour un plan budgétaire pluriannuel “visant à rétablir à terme l’équilibre budgétaire de la Région”.
Les Engagés s’inquiètent d’un “cercle vicieux”
Le chef de groupe des Engagés au Parlement bruxellois Christophe de Beukelaer s’est inquiété samedi de la dégradation de la note de la Région bruxelloise par l’agence de notation Standard & Poor’s, évoquant “un cercle vicieux qui met en péril la viabilité financière” de la Région.
Selon Christophe de Beukelaer, cette dégradation de la note bruxelloise “contribue à alourdir encore davantage le coût de notre dette”.
Les Engagés et CD&V plaident “l’urgence” pour un nouveau gouvernement de plein exercice. Il doit avoir une mission claire, estime Christophe de Beukelaer : “établir une trajectoire budgétaire crédible et structurelle. (…) La Région a besoin d’un cap, d’une volonté politique forte et de décisions courageuses”.
Le CD&V parle d’un “signal d’alarme”
Le député bruxellois du CD&V Benjamin Dalle parle pour sa part d’un “signal d’alarme indéniable”. “Bruxelles se trouve sur une pente dangereuse sur le plan financier”, ajoute-t-il. “Avec une telle perspective négative, d’autres dégradations nous menacent si nous ne faisons pas preuve de fermeté. (…) Sans correction, nous risquons un scénario à la grecque au cœur de l’Europe”, estime l’élu CD&V.
Benjamin Dalle souligne encore: “Il est grand temps que les négociations passent à la vitesse supérieure afin qu’un gouvernement stable puisse remettre Bruxelles sur la bonne voie financière”.
La preuve de “l’échec du gouvernement Vervoort” pour la N-VA
Si la N-VA ne se dit pas surprise par la dégradation de la note de la Région bruxelloise par l’agence de notation Standard & Poor’s, le parti estime que cette décision est “la conséquence logique de plusieurs années de politique budgétaire catastrophique et de mauvaise gestion”. Cette annonce “prouve l’échec total du gouvernement” Vervoort III, a commenté le chef de groupe de la N-VA au Parlement bruxellois, Gilles Verstraeten.
“Avec un déficit estimé à 1,4 milliard d’euros et un taux d’endettement attendu de 242% cette année, la situation financière de la Région bruxelloise est désastreuse”, estime le député, qui pointe encore le risque d’une augmentation des charges d’intérêts sur la dette et de la dette elle-même. “En réalité, la Région est en faillite”, clame-t-il.
“Chaque jour sans gouvernement coûte à Bruxelles encore plus de crédibilité et d’argent”, commente encore Gilles Verstraeten, qui déplore que “plusieurs partis refusent toujours de commencer une discussion sur d’éventuelles solutions parce qu’ils n’aiment pas leurs partenaires de dialogue, tout en flirtant avec l’extrême gauche”. Le responsable de la N-VA pointe, sans le nommer, le PS, qui ne souhaite pas débuter des négociations pour la formation d’un gouvernement bruxellois avec le parti nationaliste flamand.
“Pouvons-nous enfin commencer à négocier et abandonner les veto infondés ? Bruxelles a besoin de réformes et d’une politique budgétaire sérieuse, mieux vaut aujourd’hui que demain”, a ajouté la ministre flamande des Affaires bruxelloise et négociatrice de la N-VA pour la formation du gouvernement bruxellois, Cieltje Van Achter.