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Le paradoxe chinois: “La bonne santé de l’économie chinoise apparaît presque insolente”
Alors que de nombreux pays européens se préparent à endurer les conséquences économiques d’une deuxième vague de la pandémie, la bonne santé de l’économie chinoise apparaît presque insolente.
Dix pour cent ! C’est le taux de croissance sur un an des exportations chinoises en septembre. Oui, vous lisez bien : une augmentation de 10% en 12 mois. Alors que de nombreux pays européens se préparent à endurer les conséquences économiques d’une deuxième vague de la pandémie, la bonne santé de l’économie chinoise apparaît presque insolente.
Bien sûr, il faut relativiser. Les échanges commerciaux ayant été très réduits durant plusieurs mois, les exportations sont à présent en phase de rattrapage, ce qui entraîne temporairement une forte hausse des exportations.
Il n’empêche, les indicateurs économiques de la Chine continuent de surprendre, dans le bon sens. Nombre d’entre eux ont déjà rejoint, voire dépassé, leur niveau d’avant-crise et l’effet de rattrapage n’en est pas toujours la cause. Il est même probable que la croissance économique chinoise évolue dans le vert en 2020 (+ 1,8%, selon le Fonds monétaire international). Certes, son potentiel en la matière étant plus élevé, il est plus facile pour une économie émergente de délivrer une croissance positive, même en cas de choc ; mais compte tenu de l’ampleur du choc en question, la performance reste indéniable.
A court terme, la politique d’expansion économique et politique de la Chine n’est en rien remise en cause, bien au contraire.
La durée de la première vague (plus courte que dans la majorité des autres pays) et l’absence de seconde vague (pour le moment) expliquent évidemment en grande partie ces prouesses. Peut-être la population chinoise a-t-elle davantage respecté les consignes de distanciation physique, peut-être les chiffres ont-ils été tronqués, peut-être encore les autorités ont-elles pris des risques avec la santé publique dans le but de sortir plus rapidement de la pandémie ? J’imagine que ces aspects seront largement documentés lorsque le temps de dresser le bilan sera venu.
Quoi qu’il en soit, le constat est là : l’économie chinoise pourrait être la grande gagnante de la crise sanitaire. Elle s’en relève rapidement et reste incontournable pour la livraison d’une immense palette de produits demandés par les pays européens, dont le matériel médical. On ne parle pas ici que de produits de base : la Chine est technologiquement en tête de peloton dans de nombreux domaines. A court terme donc, sa politique d’expansion économique et politique n’est en rien remise en cause, bien au contraire. N’est-ce pas paradoxal, quand on sait que la pandémie a débuté là-bas et que les flottements dans la communication des autorités sur la gravité de la situation durant les premières semaines de l’année laissaient penser qu’elles ne maîtrisaient pas la situation ?
Qu’en sera-t-il à long terme ? Faut-il voir dans cette évolution un renforcement inexorable du pouvoir politique et économique de la Chine sur l’économie mondiale, au détriment d’une Europe à nouveau durement touchée par des chocs extérieurs ? Ce n’est pas certain. Une fois retombée la poussière de cette crise inédite, une nouvelle vague de protectionnisme pourrait se manifester. Du côté des Etats-Unis, c’est même plus que probable, certainement en cas de réélection de Donald Trump. En Europe, si la volonté de rapatrier des productions stratégiques ou indispensables est mise en application et si l’idée d’une taxe douanière tenant compte d’exigences en matière de développement durable fait son chemin, le modèle de croissance, fondé sur la connexion rapide à ses marchés d’exportation, de la Chine, pourrait être mis à mal. Nous sommes probablement très loin encore d’imaginer l’ensemble des conséquences de cette crise.
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