Le vice-Premier ministre Vooruit souligne l’importance de responsabiliser les chômeurs ou les malades de longue durée, mais en encadrant bien le processus par d’autres responsabilités. Un message théorique délivré au sein de la prestigieuse université, qui résonne bien avec les débats en cours au sein de l’Arizona au sujet des “fraudeurs”. Il éreinte d’ailleurs le MR.
Le vice-Premier ministre Vooruit Frank Vandenbroucke (Vooruit), en charge des importantes matières sociales, a pris la parole sur les enjeux de fond traités par l’Arizona à l’université d’Oxford, voici quelques jours. Faut-il rappeler qu’il y avait repensé notre modèle social à l’occasion d’un doctorat réalisé sur place après sa démission de la présidence du parti consécutive à l’affaire Agusta, voici près de trente ans. Son mot d’ordre d’alors est toujours d’actualité: l’État social actif.
Le propos de Frank Vandenbroucke met en perspective les débats tendus du moment sur les malades de longue durée et les “fraudeurs”, aiguisé par l’émission controversée de Christophe Deborsu sur RTL. “La solidarité, argumente-t-il dans ce long exposé, va de pair avec la responsabilité”. C’est son leitmotiv depuis toujours: permettre ‘l’activation” des chômeurs ou des malades de longue durée. Encore faut-il savoir de quoi on parle et… donner les outils aux personnes concernées de se prendre en main.
Une responsabilité individuelle ET collective
“Pour aider les gens en incapacité de long terme à rejoindre le monde du travail s’ils en ont toujours le potentiel, ce n’est pas suffisant d’attendre que ceux-ci essaient plus intensément, souligne-t-il. Les médecins doivent leur fournir les soins adéquats, les employeurs un travail adapté et des opportunités de formation, tandis que les services publics doivent soutenir cette réinsertion et l’accès à l’emploi. Sans cela, la responsabilité individuelle ne peut pas accomplir grand-chose.”
C’est une coresponsabilité, insiste-t-il, une forme concrète de solidarité partagée.
Pour les politiques, il est tout sauf évident de défendre cette vision, précise Frank Vandenbroucke. “Cela signifie qu’il faut également se battre dans le débat public pour une conception correcte et proportionnée de la responsabilité, qui demande autant en termes de “devoirs” de la part de citoyens riches n’ayant pas besoin de ces programmes que de ‘responsabilités’ de la part de ceux qui en bénéficient. Cela signifie bel et bien que nous ne devons pas oublier de mener les débats difficiles sur la co-responsabilité.” Lisez entre les lignes: voilà qui explique certains bras de fer au sein de la majorité fédérale.
Une solidarité réinventée
Pour entamer son exposé, Frank Vandebroucke insistait sur le besoin de solidarité plus grand que jamais pour préserver la prospérité de nos États, à l’heure où les pressions extérieures sont importantes, de la menace russe à l’éclatement de l’ordre international, et alors que le vieillissement de la population fragilise notre modèle. “Il est impossible de penser à la solidarité sans penser à la responsabilité individuelle, précise-t-il. C’est la conception que j’ai toujours défendue.”
Après le retour à une solidarité importante durant la pandémie de Covid, place à l’austérité et à la réduction des dépenses sociales, regrette le ministre Vooruit. “Je ne suggère pas que nous devons revenir à une ère mythique de la solidarité inconditionnelle. Mais nous devons réadapter le concept pour faire face aux défis de notre époque.”
C’est ce à quoi Vooruit s’emploie au sein de l’Arizona, relativement en phase avec la coalition. Mais en insistant donc sur la coresponsabilité face à un MR qui pousse surtout dans la direction d’une stricte responsabilisation des chômeurs ou des malades de longue durée.
Dans un entretien à Knack, le vice-Premier socialiste flamand éreinte d’ailleurs le MR: “Le plus frustrant ces dernières semaines, c’est que, du fait de la position du MR, aucune négociation n’a pu avoir lieu. Nous étions coincés avec un parti qui imposait ses règles. Nous avons dû écouter leurs alternatives budgétaires complètement absurdes, comme la légalisation des cigarettes électroniques jetables, qui nous permettrait de percevoir des droits d’accise rapportant plus de 100 millions d’euros. Le MR a répété cela à plusieurs reprises. Il faudrait aussi légaliser à nouveau les sachets de nicotine et les soumettre également à des droits d’accise. Et cette autre proposition, réduire les droits d’accise sur l’alcool, qui nous rapporterait 300 millions d’euros supplémentaires. Tout cela est absurde, bien sûr. C’est tout le drame.”