Le Conseil supérieur de la Santé préconise d’interdire les vols de nuit à Brussels Airport
Le Conseil supérieur de la Santé (CSS) préconise une interdiction des vols de nuit entre 23h00 et 7h00 à Brussels Airport et une limitation des vols durant les heures de pointe.
La pollution sonore due aux avions peut en effet entraîner des troubles du sommeil, des difficultés d’apprentissage, de l’hypertension et de la dépression, justifie-t-il. Les émissions dues au trafic aérien ont en outre globalement des effets négatifs sur la santé. L’organe plaide par ailleurs pour que l’on ne prenne l’avion que lorsque c’est “vraiment nécessaire”.
À la demande du ministre fédéral de la Santé publique Frank Vandenbroucke (Vooruit), le CSS a examiné dans quelle mesure l’aéroport de Bruxelles affecte la santé des riverains. Autour de Brussels Airport, quelque 160.000 personnes sont exposées à un risque accru du fait de leur exposition à un niveau de bruit excessif durant la nuit, répond le Conseil supérieur de la Santé.
En deçà des chiffres de 2019
Selon l’étude annuelle de l’aéroport sur les contours de bruit autour des pistes récemment publiée, la pollution sonore a de nouveau augmenté en 2023, conséquence de la poursuite de la reprise du trafic aérien après la crise du coronavirus. Elle reste toutefois encore en deçà des chiffres de 2019. Au total, 13.432 riverains ont ainsi été “potentiellement très gênés” l’année dernière par le décollage et l’atterrissage des avions.
Pour le Conseil supérieur de la Santé, “chaque année, les preuves scientifiques des effets néfastes du bruit se multiplient”. La pollution sonore entraîne ainsi des sentiments d’irritation et des troubles du sommeil. Elle est également associée à un risque plus élevé de maladies cardiovasculaires, à un retard d’apprentissage chez les écoliers et à un impact négatif sur le bien-être mental, augmentant le risque de dépression, liste le CSS.
Pollution de l’air
La pollution de l’air joue également un rôle. Selon plusieurs études, les émissions de particules ultrafines, caractéristiques des avions, entraînent principalement, et à court terme, une diminution de la fonction pulmonaire et des modifications du rythme cardiaque. À long terme, ajoute le Conseil, elles sont liées à davantage de maladies cardiovasculaires, mais aussi, par exemple, à des difficultés lors de la gestation, comme un poids inférieur.
Pour lutter contre les troubles du sommeil et permettre un sommeil suffisant, le CSS recommande l’interdiction des vols de nuit entre 23h00 et 7h00, et non jusqu’à 6h00. Il y a en effet relativement plus de vols entre 6h00 et 7h00, alors que l’impact sur le sommeil des riverains est plus important puisqu’ils ne dorment plus aussi profondément à ce moment-là.
Cette instance suggère également de développer et d’utiliser des indicateurs de bruit supplémentaires qui se concentrent principalement sur la fréquence de survol des avions et leur niveau sonore à chaque survol plutôt que de s’intéresser aux niveaux de bruit moyens. Aux yeux des experts, il revient aux Régions de se mettre d’accord sur ce point.
Répondre aux normes de l’Organisation mondiale de la Santé
Les normes de bruit existantes devraient par ailleurs être abaissées pour répondre aux normes de l’Organisation mondiale de la Santé, préconise le CSS, car ces dernières constituent le seuil à partir duquel se produisent des dommages pour la santé.
Enfin, il convient de réduire la concentration des vols tôt le matin et le soir en raison de l’exposition trop élevée aux particules ultrafines qu’ils provoquent autour des pistes, en particulier au nord-est, plaide le Conseil, pour qui une augmentation générale du nombre de vols et de leur fréquence n’est pas souhaitable.
Pour mieux identifier les effets sur la santé, des études spécifiques à la situation de Bruxelles et de sa périphérie sont nécessaires, estime encore le CSS. Celles-ci devraient mettre en relation les niveaux d’exposition au bruit et à la pollution atmosphérique avec les données médicales déjà disponibles.
La pollution atmosphérique présente devrait, elle, être mieux surveillée en mesurant des paramètres supplémentaires et en étendant le réseau de mesure. De nouvelles études caractérisant la pollution sonore à l’aide d’indicateurs plus sophistiqués devraient mettre davantage l’accent sur les groupes vulnérables tels que les enfants et les patients, développe le Conseil supérieur de la Santé.
“Ces études complémentaires ne doivent pas servir d’excuse pour ne pas agir maintenant”, souligne enfin le CSS, qui soutient une communication “transparente et équitable” entre le gouvernement, l’aéroport et les riverains sur les impacts sanitaires par rapport à d’autres intérêts.
Prendre l’avion que lorsque c’est vraiment nécessaire
Pour rendre le secteur de l’aviation plus durable, les gens devront également changer leur comportement et ne prendre l’avion que lorsque c’est vraiment nécessaire, conclut le Conseil.
Cet avis du CSS – le premier du genre pour les activités de l’aéroport – intervient quelques semaines après que la ministre flamande de l’Environnement, Zuhal Demir (N-VA), a approuvé le nouveau permis d’environnement de l’exploitant de l’aéroport, Brussels Airport Company. A ses yeux, ce permis (à durée indéterminée, NDLR) établit un équilibre entre les intérêts économiques de l’aéroport et la viabilité aux alentours des pistes. Il ne prévoit pas d’interdiction totale des vols de nuit mais bien des nuits silencieuses le week-end à partir de 2026. Ce qui n’est donc pas suffisant aux yeux du Conseil supérieur de la Santé.
“Il est un peu dommage que le permis a déjà été accordé entre-temps”, a réagi mardi Greet Schoeters, toxicologue de l’environnement à l’UAntwerpen et coprésident du groupe de travail du CSS qui s’est penché sur ces nuisances sonores.
“Nous avons travaillé sur ce dossier avec une équipe pluridisciplinaire et tenu plusieurs auditions avec des collègues étrangers : c’est ainsi que nous sommes parvenus à un rapport final”, a-t-il détaillé. L’expert espère que le rapport servira à quelque chose et que des mesures seront prises pour réduire les nuisances.