L’aéroport de Bruxelles National devient flamand, métaphore de l’évolution du pays

La Flandre "s'empare" de Brussels Airport. ©Thierry Thorel
Olivier Mouton
Olivier Mouton Chef news

Le rachat par la Flandre des parts vendues par un fonds canadien fait du nord du pays le principal actionnaire de la porte d’entrée du pays. Certains francophones s’indignent, d’autres minimisent. Mais c’est surtout une évolution naturelle: l’économie belge se “flamandise”, inexorablement.

Certains francophones s’indignent, singulièrement dans l’opposition. D’autres minimisent, surtout au sein du gouvernement fédéral, affirmant que cela ne changera rien. Le rachat des parts d’un fonds canadien par la société d’investissement flamande (PMV) est pourtant étonnant. Et révélateur.

La Flandre devient le premier actionnaire de l’aéroport Bruxelles-National, avec 39 % des parts. Le montant engagé pour le rachat de 38% de parts supplémentaires s’élève à 2,7 milliards d’euros. Un montant considérable en cette période de disette budgétaire.

Les craintes francophones

Pour les francophones, le symbole est fort. La Flandre s’empare ainsi d’un aéroport devenu la porte d’entrée et la vitrine du pays, rebaptisé Brussels Airport bien que situé à Zaventem. C’était une vieille revendication de la N-VA qui se réalise à la surprise générale.

L’aéroport est, aussi, le deuxième pôle économique de Flandre et de Belgique, avec 64.000 emplois directs et indirects, juste après le port d’Anvers. Autrement dit, la Flandre met la main sur un autre levier important pour l’avenir. Même si elle n’est pas (encore) majoritaire au sein du conseil et que le fédéral détient 25% via la SFPIM.

Le sujet est également sensible pour les francophones en raison du litige éternel au sujet du survol de Bruxelles. Quelque 55% des avions passent au-dessus des communes de la capitale et les débats à ce sujet ont fait couler bien de l’encre depuis des décennies. Une limitation des vols a été décidée, mais le permis est du ressort du gouvernement flamand qui pourrait devenir juge et partie.

“Ce qui se joue ici dépasse largement le cadre d’un simple dossier économique, dénonce le PS. Il s’agit d’un avertissement politique clair: la Flandre avance ses pions, renforce ses outils, étend son influence, pendant que le camp francophone regarde ailleurs.”

Mais n’est-ce pas, somme toute, une évolution naturelle…

L’apaisement du ministre

Interrogé par Le Soir, le ministre fédéral de la Mobilité, Jean-Muc Crucke, temporise: “Je crois que l’essentiel est que les parts du premier actionnaire canadien, soient de retour chez un actionnaire belge, certes flamand, mais c’est quand même plus proche que le Canada.”

Il ajoute: “Ce gouvernement Arizona tente de promouvoir une meilleure collaboration entre les entités fédérées et le fédéral. Ici, les deux seront autour de la table au conseil d’administration, l’occasion de montrer que c’est possible de bien travailler ensemble.”

L’évolution “naturelle” consiste à considérer que la Flandre aura toujours besoin de Bruxelles et de la Wallonie. Les trois Régions ont même tout avantage à collaborer davantage sur le plan économique.

En outre, avec 39% des voix au conseil, la Flandre ne pourra pas dicter sa loi, seule.

Mais c’est aussi, en parlant d’évolution naturelle, le reflet d’une évidence: la Belgique continue à se flamandiser économiquement et les francophones feraient bien de considérer que pour avoir droit au chapitre, ils doivent… se redresser. 

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