La “Vivaldi sans le MR” de Paul Magnette en 2024
Le président du PS est seul candidat à sa succession et rêve d’être Premier ministre. Avec une coalition qu’il verrait bien sans les libéraux francophones. Confirmation d’une rupture profonde avec Bouchez.
Cela s’appelle une ambition frustrée. Paul Magnette, président du PS, aurait pu devenir Premier ministre de la Vivaldi, à l’automne 2020, étant à la tête du premier parti de la coalition. Mais il a cédé la place au libéral flamand Alexander De Croo pour maintenir l’église au milieu du village d’une coalition au sein de laquelle les partis flamands sont (légèrement) minoritaires.
Désormais, il rêve d’occuper le Seize, le matin en se rasant. “La logique est que l’on fasse des gouvernements qui sont majoritaires au nord et au sud du pays, et que le poste de Premier ministre revienne au premier parti de la première famille politique, confie-t-il au Soir. Cela n’a pas été le cas en 2019-2020 pour une série de raisons, passons. En 2024, si la famille socialiste arrive en tête et que le PS est devant, je ne déclinerai pas la responsabilité, j’assumerai.” Il est, pâr ailleurs, seul candidat à sa succession à la tête du PS pour un nouveau mandat.
“La plus progressiste possible”
Dans ce même entretien, Paul Magnette lance un message à peine voilé aux libéraux francophones. Il évoque la coalition de ses rêves et c’est un refrain connu: “La majorité la plus progressiste possible. Je ferai tout ce qui est possible pour éviter la N-VA et son confédéralisme. De Wever parle même de réaliser son projet de manière extralégale, quasiment un coup d’Etat, alors là, franchement… Bon, ça pourrait être une Vivaldi sans le MR par exemple, on n’est pas obligés d’avoir toujours la symétrie.”
C’est la réponse du berger à la bergère, alors que le MR version Georges-Louis Bouchez laisse entendre qu’une coalition avec la N-VA et les socialistes flamands de Vooruit poourrait être envisagée sans le PS, pour éviter une réforme de l’Etat confédérale. Une forme de remake de la suédoise de 2014 pour mener à bien les réformes nécessaires sur le plan socio-économique et énergétique.
Dans un cas comme dans l’autre, cela nécessité de couper le lien unissant les partis d’une même famille politique, ce qui n’est jamis évident – mais pas impossible.
Tout cela dépend aussi de l’arithmétique issue des urnes, qui risque bien de faire du Vlaams Belang un troube-fête, en tête en Flandre. Idem pour le PTB du côté francophone. Les exclusives risquent bien de faire long feu face au blocage attendu.
La FGTB n’a jamais caché son souhait de voir une coalition “progresisste” PS-Ecolo-PTB voir le jour en Wallonie et à Bruxelles. Magnette recadre: “Ce qui a fait la possibilité de la Nupes, c’est que la “France insoumise” a vocation à exercer le pouvoir. Mélenchon rêvait d’être président de la République, alors que le PTB, c’est tout l’inverse. Ils ne vont jamais faire le pas. Leur soi-disant appel à l’union récemment, c’est du pipeau. J’avais proposé à Sofie Merckx et Germain Mugemangango de devenir échevins à Charleroi, ils se sont cachés sous la table. Et puis, idéologiquement, ils sont très loin, ils sont communistes léninistes. Moi, je suis lecteur de Marx, mais la dictature du prolétariat, jamais.“
Ruptures profondes
Cela fait évidemment beaucoup d’exclusives et d’inconnues. Mais une certitude, à lire entre les mots: la rupture semble profonde entre PS et MR, comme elle l’est entre Ecolo et MR. Philippe Close, bourgmestre PS de Bruxelles, en rajoutait d’ailleurs une couche sur LN24 ce jeudi matin:” Le PS est un parti loyal et solide. Pas comme le MR qui passe son temps à remettre en cause les accords de gouvernement.”
Les libéraux devront-ils frapper fort pour rester dans le jeu en 2024? “Comme toujours, on ne nous prend jamais parce que l’on nous aime, mais parce que nous sommes incontournables sur le plan arithmétique”, a coutume de répondre Georges-Louis Bouchez, comme Didier Reynders et Charles Michel avant lui.
Mais l’état d’exaspération de la gauche à l’égard du Montois semble à la hauteur de celle qui prévalait à l’encontre de Charles Michel à l’époque où il fâchait tout le monde en Wallonie, au milieu des années 2000. Son parti avait été rejeté dans l’opposition par Elio Di Rupo et Joëlle Milquet, en dépit des promesses de préaccord électoraux avec Louis Michel.
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