Dans les discussions budgétaires à couteaux tirés pour trouver une majorité, le PS propose une version “light” à 7 milliards. Le gouvernement du Premier ministre, Sébastien Lecornu, n’élude pas. Gabriel Zucman se justifie dans une vidéo qui cartonne.
Rangée dans un tiroir, la taxe Zucman? Si Sébastien Lecornu ne l’a pas reprise dans son projet de budget, elle reste présente dans le débat. Fortement critiquée, cette piste visant à faire contribuer les grandes fortunes n’est pas forcément écartée de la table dans le cadre du débat budgétaire français. Et pour cause…
La gauche est courtisée par le gouvernement Lecornu pour trouver une majorité. Le PS a mis sur la table une version “light” susceptible de rapporter jusqu’à 7 milliards d’euros. On pourrait en parler, sans garantie d’atterrir – c’est un euphémisme de l’écrire, tant les critiques sont nombreuses…
“Ce que l’hydroxychloroquine était au Covid”
La nouvelle version proposée par le PS viserait tous les patrimoines supérieurs à 10 millions d’euros à 3 %, pour un rendement estimé entre 5 et 7 milliards. Cette réforme frapperait davantage d’entreprises, mais à un taux plus faible.
Dans les faits, cette “taxe” n’intègrerait ni les entreprises innovantes et familiales ni les parts de plus de 50 % d’une société, une manière d’apaiser les critiques au sein du camp présidentiel, mais aussi du monde économique.
Le Premier ministre, Sébastien Lecornu, n’élude pas. “Pour ce qui est de la taxe Zucman (…), le débat aura lieu, nous y sommes prêts”, a déclaré Roland Lescure, le ministre de l’économie et des finances, en réponse à une question du député (Nord, La France insoumise) Aurélien Le Coq.
Si la taxe Zucman reste sur la table, cela ne signifie donc pas qu’elle a une chance de voir le jour, loin s’en faut. Le débat se poursuit, laborieux. Il n’est pas exclu qu’à l’issue des tractations, le gouvernement soit contraint de passer en force.
Mais Gabriel Zucman participe désormais au débat et rarement un économiste aura provoqué autant de polémiques dans le débat public.
“Stupide”, “absurde”, les mots ne manquent pas pour dénoncer la logique de cette taxation plancher sur les grandes fortunes. “La taxe Zucman est à la croissance ce que l’hydroxychloroquine était au Covid“, a même osé le sénateur Claude Malhuret à la tribune.
La défense de Zucman: “Cela ne tient pas debout”
Gabriel Zucman s’est justifié dans plusieurs médias ces derniers jours,, dont une vidéo de Blast qui cartonne sur les réseaux, plus de 220 000 vues.
Gabriel Zucman persiste et signe en publiant un livre dont le titre est clair: Les milliardaires ne paient pas d’impôt sur le revenu et nous allons y remédier (éd. Seuil). “Cette taxe vise à poser un nouveau principe: que les personnes immensément fortunées – j’ai proposé de fixer le seuil à 100 millions de patrimoine – devraient payer un minimum d’impôts chaque année, explique-t-il. En l’occurrence, 2% de leur fortune.”
Cette formule “pure” pourrait rapporter entre 15 et 25 milliards d’euros selon les estimations. Il l’évoque longuement dans son livre. “Le débat montait fort, mais il n’y avait pas de texte en français pour détailler la proposition, dit-il. Cela permet de répondre aux différentes objections que l’on eut avoir et qui sont parfaitement légitimes.” C’est le fruit, insiste-t-il, d’un “travail au long cours” avec des chercheurs dans de nombreux pays.
La proposition du PS? Sur France TV, l’économiste a mis en garde: “Introduire des exonérations, car c’est prendre le risque de lancer la machine à optimisation” : “C’est la grande leçon de l’ISF (Impôt de solidarité sur la fortune), a-t-il ajouté. Il a cependant relevé que le seuil d’exonération de l’ISF n’était que de 25 % des détentions de capital, mais le double dans l’amendement socialiste. Il a de plus approuvé que l’amendement “reprenne le dispositif d’impôt plancher”.
C’est le moyen le plus puissant d’obtenir cette taxation des grandes fortunes, soutient-il. Car l’ISF n’a pas marché.
Mais la proposition n’est pas à prendre ou à laisser, insiste-t-il. En ajoutant qu’il préférerait que l’on appelle “taxe Bernard Arnault” ce dispositif, du nom du patron de LVMH, homme le plus riche de France.
Bernard Arnault a précisément qualifié Gabriel Zucman de “militant d’extrême gauche”. Selon lui, il s’agit d’une “volonté de mettre à terre l’économie française”.
“Tout le monde ou presque a vu que la réaction était excessive, rétorque Zucman. L’idée qu’un impôt sur la fortune de 2% pour 1800 foyers fiscaux puisse mettre à terre l’économie française, cela ne tient pas debout. Il faut rappeler que ce patrimoine a augmenté de 10% en moyenne par an depuis 1996″
Le sujet polarise, c’est peu de le dire…