Daan Killemaes

“La politique budgétaire du gouvernement Michel titube entre délibération et fiasco”

Daan Killemaes Economiste en chef de Trends Magazine (NL)

L’année prochaine, le gouvernement Michel laissera derrière lui un édifice budgétaire qui aura besoin de plus que de deux, trois coups de pinceau, d’après Daan Killemaes, rédacteur en chef du Trends néerlandophone.

La conjoncture se porte à merveille, les taux sont bas et, sur le papier, la coalition au pouvoir entend s’attaquer à l’assainissement des finances publiques. Le budget ne pouvait presque pas rêver mieux. Si nous n’atteignons pas l’équilibre budgétaire cette fois-ci, autant dire que nous n’y arriverons jamais. Pourtant, le gouvernement Michel ne parviendra pas à redresser son budget d’ici la fin de la législature.

Cette ambition a été reléguée au plus tôt à 2020, avec la bénédiction du Conseil supérieur des Finances. Le déficit structurel s’élève encore à 1 % du produit intérieur brut (PIB), mais le gouvernement ne peut et ne veut pas fournir un dernier effort pour combler ce fossé de 4 à 5 milliards d’euros.

Élections

Les élections sont trop proches. Le gouvernement ressemble à un coureur cycliste qui aperçoit le peloton de tête, mais ne parvient pas à le rejoindre, au point d’y renoncer. Le président de la N-VA Bart De Wever demande au gouvernement Michel de délibérer sur le “Budget”. La conjoncture favorable le permet encore, mais toute nouvelle récession pourrait entraîner un fiasco.

Il est regrettable que le gouvernement allègue un prétexte spécieux, alors qu’il pourrait invoquer de meilleurs arguments. Le prétexte en question est qu’une politique d’austérité plus stricte aurait pour effet d’étouffer la croissance. C’est absurde en période de haute conjoncture.

En effet, la bonne conjoncture économique doit être exploitée par la gouvernement pour constituer des réserves pour l’avenir. La politique actuelle expose les finances publiques à de graves dangers en cas de nouvelle récession. C’est une question de temps.

Cela dit, le gouvernement Michel est néanmoins parvenu à redéfinir favorablement les balises budgétaires. Il reste un déficit tenace, mais la nature de celui-ci s’est sensiblement améliorée, puisqu’il est le résultat d’une pression fiscale légèrement plus faible et d’une politique d’économie limitée. Sans la baisse des charges sur le travail principalement, le budget serait aujourd’hui peu ou prou en équilibre.

La politique budgétaire du gouvernement Michel titube entre délibération et fiasco

Le déficit budgétaire de 1 % peut dès lors aussi être perçu comme un investissement crucial dans la création d’emplois supplémentaires et une hausse nécessaire de l’emploi. On peut déplorer que le gouvernement ne soit pas parvenu à concilier ses deux objectifs, à savoir le retour du budget à l’équilibre et la diminution de la pression fiscale. Pour y arriver, il aurait fallu concrétiser davantage l’agenda des réformes avec lequel le gouvernement espère amadouer l’Europe. Le gouvernement a fait une échappée, mais le CD&V en particulier a refusé de se mettre dans sa roue.

Il a manqué un coup de pédale à la politique de réforme pour financer la légère baisse de la pression fiscale et parvenir à équilibrer le budget. Les dépenses publiques ont augmenté moins rapidement que le PIB ces dernières années, ce qui a permis d’améliorer le solde budgétaire de 2 % du PIB depuis l’avènement du gouvernement Michel. Il convient désormais de poursuivre dans cette voie, car le grand drame des finances publiques belges est que les efforts fournis s’évaporent en deux temps trois mouvements en cas de politique inchangée.

Encore plus d’efforts

En raison de la hausse ininterrompue des dépenses de pensions et de soins de santé, chaque exercice budgétaire débute avec un déficit. Rien que la stabilisation de ce déficit demande des efforts, ce qui signifie qu’il convient d’en consentir encore plus pour l’éliminer complètement. Selon le Conseil supérieur des Finances, faute de nouvelles mesures, la Belgique sera à nouveau confrontée à un déficit budgétaire structurel de 1,9 % à l’horizon 2020.

L’année prochaine, le gouvernement Michel laissera derrière lui un édifice budgétaire qui aura besoin de plus que de deux, trois coups de pinceau, Il convient de prendre de nombreuses mesures similaires pour réussir à assainir les finances publiques belges. La triste vérité en Belgique, c’est que les mesures n’arrivent que lorsqu’on n’a plus le choix et pas quand on a toutes les cartes en main.

Traduction : virginie·dupont·sprl

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