Les libéraux menacent la chaîne publique d’un boycott après l’incident de cet été avec leur président. Ce n’est qu’une nouvelle version des positionnements perpétuels des ténors du MR avec le média. Mais la guerre est devenue “culturelle”. Et à vrai dire, tous les libéraux ne sont pas convaincus par cette polarisation permanente…
Georges-Louis Bouchez, président du MR, sera sur RTL dimanche pour sa rentrée politique. Il avait d’autres rendez-vous télévisés, dont un long entretien sur Trends Z, mais ils ont été annulés sine die. C’est que le numéro un libéral veut marquer le coup face à la chaîne publique. Et, paraît-il, se faire moins omniprésent – on verra le temps que cela durera…
L’incident de l’été avec la RTBF reste un marqueur de la rentrée. Visé par des articles journalistiques contre l’utilisation par son chauffeur d’une carte PMR périmée, une révélation initiale de nos confrères du Vif, le bouillant libéral avait eu un contact tendu avec une journaliste de la RTBF en raison d’un article publié sur le site de la chaîne et contenant des erreurs factuelles.
Depuis, cette fuite du son a fait le buzz, Bouchez s’est outre, le chauffeur a été licencié et une vidéo “comique” a été tournée par le principal intéressé pour tourner cela en dérision. Mais ce n’est pas tout: le bras de fer prend la tournure d’une menace de boycott de la RTBF par le MR. Validée du bout des lèvres par certains libéraux.
Un classique libéral
A vrai dire, cette posture libérale face à la RTBF est loin d’être nouvelle. Didier Reynders, un des mentors de Bouchez, ne manquait jamais de lancer une pique sur le caractère “rouge’ du service public lors des interviews qu’il y accordait. Et plus souvent qu’à son tour, il ne parlait plus aux médias qui le dérangeaient pendant plusieurs mois, sans le crier sur tous les toits.
Charles Michel n’était pas en reste dans ses critiques et si son père Louis était plus affable, ses colères tonitruantes étaient légendaires. Bref, de tous temps, la tension couve entre le parti et les journalistes de Reyers, certains d’entre eux étant désormais vent debout contre la ligne de “droite populaire” du MR.
Cette fois, donc, le MR “exprime son inquiétude face à ce qu’il estime être des manquements de la rédaction de la RTBF dans le traitement d’un dossier concernant un collaborateur du parti” – c’est donc bien le chauffeur qui est mis en avant.
Surtout, le bras de fer avec la RTBF a pris la forme d’une sorte de “guerre culturelle”, dont Bouchez espère tirer parti face à des journalistes critiqués régulièrement – et déconsidérés par une partie de la population.
“Ne plus répondre”
“Des informations inexactes ont été diffusées et, malgré les demandes de correction, sont restées en ligne, indique le MR. Or, l’article 6 du code de déontologie impose aux rédactions de rectifier sans délai toute erreur factuelle.”
Et encore: “le MR regrette que la RTBF ait enregistré et diffusé un enregistrement du président du Mouvement Réformateur à son insu, une pratique qui pose à la fois des questions éthiques et juridiques”.
Georges-Louis Bouchez s’indigne de n’avoir eu aucun retour des dirigeants du média. Alors? “À défaut de celle-ci d’ici au prochain conseil d’administration, fixé au 19 septembre, le Mouvement Réformateur se réserve le droit de ne plus répondre aux sollicitations de la rédaction de la RTBF.”
Sur le site “actu” de la RTBF, aucune mention de la menace. Et Paul Magnette, président du PS, était l’invité, mardi matin, pour dire tout le mal qu’il pense des coalitions en place…
Mais le 11 août, la RTBF avait longuement communiqué sur le sujet et affirmé qu’elle n’était pas à la source de la fuite du son.
“Tous n’ont pas signé”
C’est peu dire que tous les libéraux ne se réjouissent pas de ce nouvel épisode de tensions qui s’élargit, même si la ligne est communiquée par le parti au sens large.
Au sein du MR, on précise au Soir et chez nous: “Tous ne le valident pas complètement, la situation ne ravit pas tout le monde au sein du parti. C’est un communiqué du parti, pas des ministres et chefs de groupe.”
Certains libéraux se rendent compte que la rentrée politique sera difficile, que les conclaves budgétaires ne vont pas rendre les majorités populaires et que le boycott d’un média risque de les couper d’une partie de la population.
La stratégie de la tension permanente et de la polarisation n’est pas toujours la meilleure conseillère.