La Défense, l’oubliée de la relance
Les gros contrats militaires ne génèrent pas les retombées industrielles promises aux entreprises belges. Le groupe John Cockerill en fait la cruelle expérience avec le marché des nouveaux blindés.
Le groupe John Cockerill occupe souvent l’actualité avec ses investissements dans l’hydrogène vert, le thermo-solaire ou le stockage de l’énergie. S’il peut jouer ce rôle de pointe dans la transition écologique, c’est notamment grâce aux profits générés par la production d’équipements militaires de haute technologie. Les autorités belges ne semblent cependant pas toujours bien conscientes de l’importance de cette activité. L’Echo vient ainsi de révéler que le groupe liégeois n’a pas été retenu pour l’assemblage des futurs blindés de la Défense (plus de 400 engins produits par un consortium français mené par Nexter).
Le CEO de John Cockerill, Jean-Luc Maurange, est très amer face à ce qu’il considère comme “un camouflet” et qui ne semble, en outre, pas correspondre aux engagements initiaux sur les retombées industrielles locales de ce marché de 1,6 milliard. D’autres sociétés, comme FN Herstal ou Thales, ont certes obtenu des contrats mais cela reste modeste. Comme le sont d’ailleurs les retombées de l’achat des F35, sans commune mesure avec celles des F16 à l’époque.
Chaîne de valeur
“Notre secteur aérien et militaire n’est pas reconnu à la hauteur de ses compétences, analyse le CEO de l’Union wallonne des entreprises, Olivier de Wasseige. C’est regrettable car c’est un secteur innovant et très structurant. Derrière les quelques grands noms, il y a une ribambelle de sous-traitants qui subiront lourdement la situation. On parle souvent de chaînes de valeur. Nous en avons là une très belle et elle mériterait d’être encouragée.” Olivier de Wasseige salue les 35 millions octroyés à ce secteur dans le plan de relance wallon et la stratégie désormais plus affirmée des pôles de compétitivité Skywin et Mecatech vis-à-vis des projets dans la Défense. Il s’étonne en revanche de l’absence de volet Défense dans le plan fédéral. “Certains pays, nos voisins français par exemple, ont une vraie stratégie, associée à une forme de fierté, visant à avoir un secteur de la Défense très fort, dit-il. Chez nous, c’est très loin d’être prioritaire.”
La ministre de la Défense Ludivine Dedonder (PS) s’en défend, bien entendu. Elle rappelle que le plan de relance prévoit 24 millions d’euros pour la cybersécurité et 100 millions pour les “quartiers du futur”, au sein desquels les partenariats entre l’armée et les entreprises seront renforcés. En outre, les investissements en R&D par la Défense grimperont jusqu’à 30 millions d’euros à l’horizon 2024 et même 140 millions en 2030 (ils plafonnaient à 8 millions en 2019). Cela constitue, estime la ministre, “autant d’opportunités supplémentaires pour le monde industriel de tisser des liens avec la Défense”.
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