Christophe De Caevel
Investissements publics: l’heure des choix
L’actualité récente nous rappelle combien les investissements publics ne s’embarrassent pas toujours de la notion d’efficacité.
Investir en 2021, ce sera le choix de nombreux particuliers. Vous peut-être… Notre magazine propose d’ailleurs cette semaine une série de recommandations à cet égard. Mais investir en 2021, ce sera aussi une obligation des pouvoirs publics. Et pas un peu: l’Europe prévoit un budget de 750 milliards d’euros, dont la moitié en subsi- des, pour soutenir les plans de relance des différents Etats. La Belgique devrait bénéficier de 5,15 milliards d’euros de cette manne. A ce montant, il faudra encore ajouter les budgets propres de l’Etat fédéral, des Régions et des Communautés.
Déverser ces flots de milliards est sans doute indispensable. Ce geste n’est toutefois pas une garantie de réussite. Nous avons trop souvent vu, et nous voyons hélas encore, combien les pouvoirs publics ont cette incroyable faculté à dilapider les moyens en s’embarquant dans des projets démentiels et aux très faibles répercussions économiques. Dans les années 1990, les fonds européens de l’Objectif 1 avaient ainsi financé une série de coûteux aménagements urbains ou patrimoniaux qui n’ont guère contribué à redresser le PIB hainuyer. Depuis, on a peut-être durci les procédures de contrôle. Il n’empêche que, de la galaxie Nethys à la saga de la gare de Mons, l’actualité de ces derniers jours nous rappelle encore combien l’affectation des moyens publics ne s’embarrasse pas toujours de la notion d’efficacité.
L’actualité récente nous rappelle combien les investissements publics ne s’embarrassent pas toujours de la notion d’efficacité.
Heureusement, il y a aussi de belles réussites. La plus frappante concerne l’industrie pharmaceutique, plus foisonnante que jamais dans les trois Régions du pays. De la recherche à la production en passant par le matériel médical et un éventail de services spécialisés, un écosystème s’est construit en une dizaine d’années, attirant de plus en plus les investisseurs internationaux. Grâce au talent de chercheurs, à l’audace d’entrepreneurs, à la motivation de travailleurs. Mais aussi grâce à l’anticipation et à la constance des pouvoirs publics. La démarche vertueuse est donc possible, en dépit des tristes exemples rappelés plus haut.
Pourrait-elle être rééditée dans d’autres domaines? Des signes encourageants l’indiquent avec, par exemple, les efforts placés dans l’hydrogène vert ou la création d’un parc de batteries à Bastogne avec le concours de la SRIW. Le wagon de la construction des éoliennes ou des panneaux solaires a été loupé, les autorités semblent en avoir retenu la leçon, en faisant preuve de plus d’anticipation en ce qui concerne le stockage de l’énergie.
Présentes dans la transition énergétique, les autorités le sont aussi de plus en plus dans l’autre volet essentiel de l’économie du futur, à savoir le numérique. Derrière le succès d’Odoo, des start-up comme CluePoints ou Oncomfort (liées au secteur de la santé, ce qui n’est peut-être pas un hasard), soutenues par les pouvoirs publics, attirent aussi désormais des investisseurs internationaux. Tout récemment, la SRIW vient d’entrer dans un fonds d’investissement dédié à la blockchain (Tioga Capital). Elle serait le premier investisseur institutionnel européen à s’aventurer sur ce terrain émergent. Une manière, peut-être, de poser de précieux jalons dans un écosystème en devenir.
Dans les prochaines semaines, les gouvernements fédéral et fédérés devront arbitrer entre les très nombreux projets rentrés pour le plan de relance. Ils totalisent, selon le recensement de L’Echo, de 4 à 6 fois les 5,15 milliards prévus par l’Europe. Que les nécessaires arbitrages reposent sur l’anticipation intelligente des enjeux de demain et non sur la traditionnelle distribution de petits cadeaux aux amis, et c’est toute la qualité de la relance belge qui en bénéficiera.
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