En nouant deux accord historiques, les deux entreprises wallonnes passent le milliard de chiffre d’affaires. Elles montrent que l’on peut réindustrialiser, que l’Etat peut être stratège et que la dimension européenne est la bonne échelle.
Cocorico! Deux fleurons wallons viennent de conclure des deals d’envergure qui leur permettent de passer le milliard de chiffre d’affaires. Le groupe FN Browing, d’une part, a repris Sofisport, un des leaders mondiaux dans la fabrication de cartouches de chasse et de tir sportif. Une diversification bienvenue pour une entreprises qui profite, en outre, du boom de la défense.
Sonaca, d’autre part, a finalisé la reprise de la société espagnole Aciturri, formant le troisième acteur mondial indépendant dans la fabrication des structures d’avion. Objectif: préparer l’aviation du futur.
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Une ambition exemplative
Ces deux accords historiques témoignent de l’ambition qui peut être celle de la Wallonie dans la volonté de se réindustrialiser, en regardant vers le futur. Ces nouvelles sont d’autant plus remarquables que les actionnaires de ces entreprises ne sont autres que les pouvoirs publics. Après Belfius, voilà de nouvelles preuves que l’Etat stratège peut opérer des choix économiques porteurs de croissance et sources de dividendes. Le tout étant de savoir jusqu’où la participation publique doit se poursuivre pour céder la main, en tout ou en partie, au secteur privé.
C’est la preuve, aussi, que le contexte géopolitique troublé et le défi climatique peuvent être des sources d’opportunités économiques. S’il y a bien des raisons d’inquiétude dans la séquence actuelle, on ne peut oublier que l’homme a toujours pu trouver des réponses ingénieuses aux menaces qui l’assaillent. Tant la FN que la Sonaca abordent ces sujets avec une vision à la fois pragmatique et éthique. Derrière ces deux géants se trouvent, en outre, des dizaines de PME qui profitent de l’aubaine. La Wallonie porte haut des écosystèmes dont l’intégration est une vertu.
Une dynamique européenne
Enfin, ces deux opérations s’inscrivent dans une dynamique européenne, avec la volonté de faire des champions en unissant la force des pays. La réindustrialisation passera aussi par cette capacité à marier les énergies face à la Chine et les Etats-Unis dénués de tout scrupule. Un choix lourd de sens à l’heure où d’autres industriels sont en passe de faire échouer le SCAF, ce projet de système de combat aérien du futur, notamment en raison d’intérêts nationaux et de malaise franco-allemand.
Réindustrialiser n’est certes pas une sinécure. Un colloque organisé récemment par le Centre Jean Gol et le Cercle de Wallonie Bruxelles a réuni des CEO de premier plan pour mettre le doigt sur les freins qui persistent à notre compétitivité. Baliser rapidement le mix énergétique de demain, contrôler davantage l’impact des salaires, accompagner la décarbonation ou ne pas rater le train de l’intelligence artificielle: ce sont autant de points d’attention pour concrétiser les promesses venues de Wallonie.
“Il suffit qu’on le décide”
“Si on veut changer les choses, il suffit qu’on le décide, dit Philippe Kehren, CEO de Solvay. Nous avons les compétences nécessaires, il suffit que l’on arrête de s’infliger de la souffrance.” Voilà des paroles qui valent de l’or. Ne pas réglementer à outrance, lâcher les rênes de l’innovation et voir grand, voilà quelques leçons du succès.
Une étude récente de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) met d’ailleurs le doigt sur un élément crucial. En analysant le décrochage de l’Europe par rapport aux Etats-Unis depuis 2000, il souligne que ce ne sont pas tant les coûts (de l’énergie et du travail) qui sont en cause, mais bien un sous-investissement continu dans les outils de production et l’innovation. Conséquence? Une productivité deux fois plus faibles par rapport à notre partenaire d’Outre Atlantique. Une leçon à méditer.
