Financement des partis: les Vécés étaient fermés de l’intérieur

Le parlement, décoré pour la présidence belge de l'Union européenne.
Olivier Mouton
Olivier Mouton Chef news

La majorité fédérale ne parvient décidément pas à s’entendre pour modifier un système qui, il est vrai, profite aux partis. Pourquoi ceux-ci saborderaient-ils un système cadenassé de l’intérieur?

Peut-être vous souvenez-vous du fil de Patrice Leconte avec Jean Rochefort et Coluche? C’était en 1976 et l’enquête policière, loufoque, se penchait sur un crime commis dans des Vécés fermés de l’intérieur. A vrai dire, le film ne restera pas comme un chef-d’oeuvre, Jean Rochefort considérera qu’il s’agissait d’un des plus mauvais de sa carrière. Peut-être nos responsables politiques considéreront-ils la même chose de la mascarade de cette législature consacrée à la réforme de la loi de financement des partis.

Cette réforme est inscrite dans la déclaration gouvernementale de la Vivaldi d’Alexander De Croo, dans des termes assez vagues, il est vrai. La volonté était de “renforcer la transparence et le contrôle des recettes et dépenses”. Une initiative citoyenne, baptisée We need to talk, a même avancé des propositions ambitieuses, susceptibles de restaurer une confiance brisée. Mais rien n’y a fait: le système est bel et bien cadenassé de l’interieur.

Réorienter les dépenses

Comme pour consacrer le manque de volonté politique de se pencher sérieusement sur la question, la commission parlementaire qui devait se pencher sur le sujet, mercredi, n’a même pas réuni le quorum nécessaire. Mais au-delà de ce point de “détail”, il semble difficile, voire impossible, pour les partis de la Vivaldi de s’entendre sur une réforme qui, il est vrai, serait susceptible de diminuer (très légèrement) le pouvoir des partis. Or, la Belgique est devenue une particratie. C’est LE lien qui tient le pays ensemble.

Un compromis impossible? Le quotidien Le Soir rappelle que quelques modifications pourraient fédérer les socialistes, les libéraux, les écologistes et le CD&V. Par exemple, on pourrait décider de consacrer un pourcentage fixe des dépenses des partis au “développement de fonctions essentielles” comme la réflexion de fond d’un centre d’études. Ce serait une manière de veiller à diminuer la part consacrée à la communication sur les réseaux sociaux.

Car les partis sont devenus de véritables puissances financières, grâce à leur dotation, et ce sont… surtout les partis populistes qui en tirent profit en investissant massivement pour leur notoriété. Pour être de bon compte, il convient de préciser que la Chambre a décidé de réduire de 5,3 % la dotation fédérale des partis en 2023 et 2024, soit une économie annuelle de 1,98 million. Impossible d’aller au-delà.

Recours en justice et seuil électoral

Quatre petites formations politiques citoyennes ont décidé voici quelques mois, à l’initiative du flamand Vista, d’attaquer en justice la loi de financement des partis devant un tribunal de première instance de Bruxelles, en espérant poser une question préjudicielle à la Cour constititonnelle. Leur constat? C’est l’impossibilité devenue chronique pour ces petits partis démocrates d’obtenir des élus et donc… un financement pour leur permettre de grandir.

Cela étant, au sein de la majorité, une autre réflexion se fait jour. Face à l’éclatement de plus en plus préoccupant des voix, qui paralyse la politique, ne serait-il pas judicieux de faire monter le seuil électoral pour forcer une recomposition et un regroupement de partis? Jusqu’ici, ce seuil est fixé à 5% – ce qui est déjà considérable -, une décision qui avait été prise pour empêcher la montée des partis extrémistes (et ce qui a échoué). En montant le seuil, on forcerait les partis à grandir, à se fédérer et on en diminuerait le nombre.

A vrai dire, la question n’est pas simple, on le voit, et les Vécés sont si bien fermés de l’intérieur que ceux qui en détiennent les clés sont désormais… bien embarrassés.

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