Pourquoi il faut simplifier la structure de l’Etat belge (et pourquoi les extrêmes joueront un rôle)
La Vivaldi s’est entendue sur une liste ambitieuse des articles de la Constitution ouverts à révision. Le PTB offre ses services. La prochaine législature sera-t-elle l’heure de la réforme finale?
C’est la lutte finale, celle qui pourrait donner un visage définitif à la Belgique. Et le PTB ne ferme pas la porte pour y contribuer. Voilà, en résumé, très succinct, la séquence à laquelle on assiste en vue des élections du 9 juin prochain et, surtout, de la prochaine législature.
Fin de la semaine dernière, les partenaires de la majorité Vivaldi fédérale ont accouché d’une liste d’articles de la Constitution susceptibles d’être révisés par le prochain gouvernement. Elle est large, ambitieuse et contient le fameux article 195, qui concerne précisément la façon dont on peut modifier la Constitution et a déjà été utilisé pour décapsuler le débat.
Cette semaine, en commission, le PTB a annoncé qu’il pourrait servir d’appoint, le cas échéant, comme il vient déjà de le démontrer. “Notre priorité, c’est l’urgence sociale, mais si on peut contribuer à changer la Constitution de façon positive, nous serons prêts, voyez le bien-être animal”, a confié Sofie Merckx (PTB), en référence au vote survenu la semaine dernière.
Pourquoi et comment simplifier la Belgique
Oui, il est urgent de réformer et de simplifier l’Etat belge. Les six réformes de l’Etat ont engendré un fédéralisme de confrontation, constatent les constitutionnalistes à l’unanimité, qui laisse trop peu de place à la coopération. En outre, la Constitution est devenue un texte soit plain de contradictions, soit illisible y compris par ceux censés gérer les compétences.
Toute la question est de savoir comment simplifier le pays, entre la formule confédérale prônée par la N-VA et la Belgique à quatre voulue par les francophones, entre autonomie renforcée et refédéralisation de compétences.
La Vivaldi pose le débat et ose donc mettre l’article 195 de la Constitution sur la table. En l’encadrant par ces mots: “L’objectif, notamment de cette révision de l’article 195, est une nouvelle structure de l’Etat à partir de 2024 avec une répartition plus homogène et plus efficace des compétences dans le respect des principes de subsidiarité et de solidarité interpersonnelle. Cela devrait conduire à un renforcement des entités fédérées dans leur autonomie et du niveau fédéral dans son pouvoir.”
Pour la petite histoire, le CD&V a joué un rôle important en forçant une vision très ouverte de la révision à venir.
Pour le reste, et c’est bienvenu également, la Vivaldi met sur la table les articles concernant la formation des gouvernements (pour, potentiellement, empêcher une nouvelle crise de 541 jours), le fonctionnement de la démocratie ou les droits fondamentaux. En encadrant, là aussi: “Le gouvernement propose de moderniser le catalogue des droits fondamentaux en incluant des dispositions transversales, en étendant les droits fondamentaux ou en incluant de nouveaux droits fondamentaux. Les droits et libertés reconnus aux Belges ne seront en aucun cas détériorés.”
L’objectif consiste bien à moderniser le fonctionnement de l’Etat. C’est salutaire.
Comment jongler avec les extrêmes
Pour réviser la Constitution, sauf astuce avec l’article 195, il faut toutefois une majorité des deux tiers au sein des assemblées fédérales et une majorité dans chaque groupe linguistique. C’est loin d’être évident, cela le sera d’autant moins que 50 sièges sur les 150 de la Chambre pourraient être occupés, au soir du 9 juin prochain, par les extrêmes: Vlaams Belang en Flandre, PTB en Belgique francophone.
Comment faire pour “moderniser l’Etat” dans un tel contexte? Le blocage n’est-il pas inévitable?
La porte ouverte par le PTB témoigne du fait qu’il pourrait y avoir une issue de secours. Sachant ceci: le parti d’extrême gauche fait du fédéral sa priorité – il l’exprimait dans le récent dossier de Trends-Tendances – pour refinancer Bruxelles et refédéraliser des compétences. Ce pourrait être une contribution.
Mais qu’en serait-il des velléités flamandes d’une autonomie renforcée? Le Vlaams Belang pourrait-il, là, s’abstenir pour décapsuler les choses, ne fut-ce qu’en s’abstenant?
Dans un contexte démocratique délicat, la Belgique devra prouver qu’elle peut se réinventer. Mais elle devra parfois se boucher parfois le nez au sujet des appuis nécessaires pour y arriver. A moins que l’on assiste à une nouvelle législature perdue.
Voilà l’enjeu, avec le bicentenaire de 2030 en ligne de mire.
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