Formation d’un gouvernement: “Je préférerais une réduction des dotations des partis”
Faut-il créer un incitant pour éviter des mois de négociations lors de la création d’un gouvernement fédéral? La secrétaire d’Etat au Budget Alexia Bertrand propose de réduire la rémunération des ministres. Min Reuchamps, politologue à l’UCLouvain a d’autres idées.
1. Que pensez-vous de la proposition d’Alexia Bertrand de sanctionner financièrement les ministres en cas de trop longues négociations pour former un gouvernement fédéral?
Je préférerais une réduction des dotations des partis. J’ai été auditionné par la commission Constitution à la Chambre en septembre dernier et j’y avais évoqué l’idée de réduire le financement public des partis en cas de négociations trop longues. Je pense qu’il vaut mieux viser les responsables des négociations, les chefs de partis plutôt que les ministres. Ces derniers seraient plutôt les victimes d’une prolongation des discussions. Ce sont les présidents qui négocient. Puisque l’on parle d’une punition collective, un peu comme à l’école, la mesure devrait toucher tous les partis, pas seulement ceux qui formeraient la majorité. Les partis qui n’ont pas vocation à gouverner pèsent aussi sur l’équation. On pourrait imaginer un pourcentage, pas une somme fixe. De sorte que les plus grands partis, qui pèsent le plus sur les négociations, payeraient plus. Le Vlaams Belang est un grand parti mais il n’a peut-être pas vocation à entrer dans le gouvernement fédéral. Il a aussi une responsabilité et devrait alors aussi contribuer à cet incitant, ou en tout cas le subir.
2. Existe-t-il un système de sanction comparable dans d’autres pays?
Je ne crois pas. Mais il faut savoir que le financement public des partis est propre à la Belgique. Il n’existe pas dans tous les systèmes politiques. Pensez aux Etats-Unis. La générosité belge est un peu particulière. Il y a un système en France mais il est moins généreux. Ici, on parle d’environ 200.000 euros par jour pour l’ensemble des partis.
3. Quelle a été la réaction du monde politique?
Un peu la même que pour les punitions collectives dans les écoles. Il y a d’une part le sentiment que c’est injuste parce que c’est collectif, et de l’autre, il y a le sentiment d’un côté “bac à sable”, d’une sanction puérile qui envoie un mauvais signal. Mais cela permet d’ouvrir un double débat. A la fois celui du financement des partis et celui de la longueur des négociations pour les coalitions. Il y a des approches plus radicales, notamment celle d’un délai fixe, éventuellement assorti d’un tour de rôle: le premier parti en voix reçoit un délai pour former un gouvernement, en cas d’échec, le deuxième lui succède, et ainsi de suite. Ou la formule magique de la Suisse, où tous les partis qui atteignent un certain seuil participent au gouvernement. On pourrait imaginer, dans la même logique, que les 15 premiers élus deviendraient ministres, mais ce n’est pas dans l’ADN du système politique belge.
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