Financement des partis: le système est verrouillé de l’intérieur
Les partis ne peuvent s’entendre sur une réforme de la loi, en dépit de la pression citoyenne. Forcément, ils en tirent profit et cadenassent l’accès à la démocratie.
Le renouveau politique attendra. Au milieu des crises multiples, des agriculteurs à l’Ukraine ne passant par l’inflation, la réforme de notre système démocratique n’apparaît certes pas comme une priorité majeure dans l’opinion publique. Le pouvoir d’achat domine. Il n’empêche que la Belgique, devenue particratie, reste trop souvent bloquée, incapable de réformes ambitieuses, en raison de ce dévoiement voulu.
Au parlement, le débat sur la réforme de la législation sur le financement des partis a tourné court. Pas d’accord au sein de la Vivaldi, mercredi, et même les apparences n’ont pas été sauvées. Il y a, certes, eu des expressions de regret de la part des parlementaires impliqués, mais aucune implication des ténors ou des présidents de parti.
Un panel citoyen, baptisé We Need To Talk, avait pourtant balisé le travail en formulant 34 propositions. Il était question, notamment, de réduire la dotation aux partis (78 millions), de limiter le champ d’utilisation de cet argent (pour limiter la publicité sur les réseaux sociaux), de préciser la mission des partis ou encore d’entrouvrir l’accès.
Aucune chance d’être entendu: le système des partis est verrouillé de l’intérieur.
78 millions, une “somme colossale”
Ben Eersels, porte-parole de We Need To Talkfait part de sa déception: “Pour la première fois, soixante citoyens ont également formulé des propositions pour améliorer le système. Et ils ont fait un travail fantastique. Leurs recommandations étaient extrêmement concrètes et ambitieuses. Elles ont été étayées par des experts et soutenues, ce week-end encore, dans une lettre ouverte, par 69 personnalités du monde des affaires, de la culture et de la société civile. Les membres de la commission ont même salué à plusieurs reprises la qualité de ce travail. Et pourtant, rien ne se passe. C’est incompréhensible“.
Faute de réforme, souligne le panel citoyen, les partis politiques belges restent parmi les mieux financés d’Europe, avec une somme colossale de plus de 78 millions d’euros de dotations annuelles. “Certains reçoivent même tellement d’argent qu’ils n’en viennent pas à bout, souligne l’autre porte-parole, Isabelle Dresse. En termes de publicités sur les médias sociaux, la N-VA et le Vlaams Belang figurent parmi les trois premiers partis d’Europe. De leur côté, les nouveaux et petits partis ne disposent pas de ressources suffisantes pour s’organiser de manière professionnelle et jouer leur rôle démocratique”.
Conclusion: “La politique s’octroie de l’argent, décide de ce qu’elle peut dépenser et se contrôle elle-même.”
C’est parce qu’ils étaient convaincus à l’avance du verrouillage du système que quatre petits partis citoyens ont décidé récemment de prester en justice pour réclamer une modification de la loi. Le résultat de leur action ne sera pas connu avant les élections. De toute manière, il n’y a aucune raison pour que les choses changent…
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