David Clarinval, alors que De Wever propose un saut d’index: “Un effort comme Dehaene, sans la croissance”

David Clarinval (MR), ministre de l’Emploi et de l’Économie. © Hatim Kaghat
Olivier Mouton
Olivier Mouton Chef news

Le vice-Premier ministre MR met en garde contre un effort comparable à celui réalisé par Jean-Luc Dehaene dans les années 1990. Il le reconnaît: les divergences sont grandes au sein de la majorité. Le MR refuse toute nouvelle taxe et met l’accent sur les dérapages en Sécu.

La confection du budget fédéral entre dans une partie décisive. Après des contacts bilatéraux, le Premier ministre, Bart De Wever, a soumis une première note générale à ses partenaires. “Dingue”, murmure-t-on en coulisse. Selon la presse flamande, elle contiendrait notamment un saut d’index. Un consensus ne sera pas atteint rapidement. Bart De Wever souligne déjà que le mardi 14 octobre, jour où il doit donner son discours sur l’état de l’Union à la tribune de la Chambre, “n’est pas une date butoir”. “Ce qui compte, c’est d’avoir un bon budget”, ajoutait-il hier.

David Clarinval, vice-Premier ministre MR, pose l’étendue de l’enjeu et fixe ses lignes rouges. Nous l’avons interviewé mardi en fin de journée.

Où en est-on et serez-vous prêt pour le 14 octobre?

Il est trop tôt pour dire si nous serons prêts pour le 14 octobre, nous mettons tout en œuvre pour aboutir dans les délais. Mais j’ai l’impression que les citoyens ne se sont pas encore rendu compte que nous sommes vraiment dans une situation difficile.

Ils ne mesurent pas l’ampleur de l’effort nécessaire?

On ne se rend pas compte que l’effort devant nous est comparable à celui que la Belgique a dû faire à l’époque de Jean-Luc Dehaene, il y a une trentaine d’années. Si l’on veut à la fois respecter les objectifs européens, c’est-à-dire revenir un déficit à 3% du PIB en 2030, mais aussi respecter les efforts colossaux décidés en matière de soutien à la défense, on peut chiffrer cet effort à pratiquement 20 milliards d’ici 2030. Or, le taux de croissance n’est plus celui qui était de mise à l’époque Dehaene.

On parlait alors de 2 à 3%, nous sommes aujourd’hui autour de 1%!

Exact! En outre, nous enregistrons des dérapages en termes de dépenses qui sont structurels avec le vieillissement de la population et la santé. Les conditions sont donc très difficiles. C’est une tâche titanesque.

La difficulté est-elle due à des positions antagonistes entre partenaires, singulièrement entre MR et Vooruit qui réclame une tâche des millionnaires?

La cohésion au sein du gouvernement est nettement meilleure que ce que l’était au sein de la Vivaldi, lors de la législature précédente. Mais il n’en demeure pas moins que les positions entre les socialistes de Vooruit et nous sont radicalement différentes. Quand Vooruit veut de nouvelles taxes, c’est clairement un problème pour nous. Et ce n’est pas qu’une position idéologique.

Si l’on regarde les chiffres, la Belgique est un des pays les plus taxés au monde, tant sur le capital que sur le travail. On ne le dit pas assez, mais sur le capital, nous sommes le deuxième pays de l’Union européenne qui le taxe le plus avec 10,6%, loin devant l’Allemagne qui est à 7% – et je ne parle même pas de l’Estonie à 2%. Ce chiffre ne tient même pas compte de la nouvelle taxe sur les plus-values décidée lors de la négociation précédente. Sur le travail, on atteint un taux de 52,4% en 2024, c’est le plus élevé de l’OCDE. La Belgique a atteint un plafond et pour nous, il n’est pas raisonnable et il est même vexatoire de venir avec de nouvelles taxes.

C’est un casus belli pour le MR?

Le message est clair: il n’y a pas de place pour augmenter les impôts. Par contre, quand on regarde objectivement le budget, on voit qu’il y a des dérapages dans le budget. En Sécu, la dotation de l’équilibre a augmenté de 135% entre 2022 et 2035, soit un dérapage de 4,6 milliards, rien que sur les salariés. En trois ans! Celle des travailleurs indépendants de 15 millions.

De quoi est-ce la conséquence?

Ce sont d’un part les pensions en raison du vieillissement, mais un récent rapport de l’Inami montre qu’il y a des abus dans l’assurance maladie-invalidité.

Ce sont les fameux malades de longue durée qui n’auraient plus droit à leur indemnité?

Soyons précis: il y a évidemment des gens malades qui doivent bénéficier d’un accompagnement et avoir le temps de se soigner, c’est fondamental. Nous ne remettons pas cela en question. Mais au minimum un quart de ces malades de longue durée sont de “faux malades” qui sont tout à fait aptes à reprendre le travail. On pourrait trouver un milliard dans ce domaine!

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