Avec ses 32 heures sans réduction de salaire, Paul Magnette indésirable en Flandre

Paul Magnette a lancé sa campagne, le 18 février à Bruxelles.. BELGA PHOTO NICOLAS MAETERLINCK
Olivier Mouton
Olivier Mouton Chef news

Le début de campagne du PS illustre un pays coupé en deux socio-économiquement, avec un PS qui se radicalise. Son président n’est guère apprécié au nord du pays pour devenir Premier ministre.

C’est un rêve et un idéal. Ce n’est pas (encore) une proposition concrète déposée au parlement et c’est un combat qui “s’inscrit dans la durée”. Mais en lançant la campagne électorale du PS, ce week-end, Paul Magnette a exprimé le souhait d’une semaine de travail de 32 heures sans réduction de salaire.

Une posture de campagne, évidemment, combative, alors que le PTB ne cesse de tailler des croupières à gauche de la gauche. Et un positionnement électoral du côté francophone, auquel a évidemment répondu Georges-Louis Bouchez, président du MR, qui rebaptise une nouvelle fois le PS “parti de la sieste”. Le député libéral Denis Ducarme estime que “le PS belge s’aligne sur la France Insoumise de Mélenchon”.

Mais au nord du pays, on regrette cette “radicalisation” de Paul Magnette. Qui risque de bloquer durablement le pays si PS et N-VA devait négocier ensemble, dans un contexte budgétaire délicat. Un sondage réalisé pour les magazines de Roularta, dont Trends, soulignait ce week-end qu’au nord du pays, seuls… 1,7% des électeurs verraient d’un oeil favorable l’arrivée de Paul Magnette au Seize, contre 20% pour Bart De Wever. Un pays coupé en deux.

“Détruire la prospérité”

Voici ce qu’a exprimé textuellement Paul Magnette dimanche à Bruxelles, dans un auditoire de Flagey acquis à sa cause: “Notre idéal, c’est la semaine des quatre jours, en 32 heures, sans perte de salaire et avec embauche compensatoire. On n’y arrivera pas d’un coup, on le sait, toutes les grandes batailles se sont inscrites dans la durée. Mais on peut et on doit, au cours des prochaines années, faire de grands pas dans cette direction.”

“Il y a 5 ans, il y a eu une audience sur la réduction du temps de travail avec le plein salaire, réagit Stijn Baert, économiste du travail réputé de l’UGent. En réponse à la proposition PS, les experts du marché du travail l’ont déclaré à l’unisson : c’est de la science-fiction. Le proposer à nouveau maintenant, c’est choisir délibérément de détruire la prospérité.”

“Le programme que lance le PS est tellement éloigné de la réalité qu’il passe même pour un peu risible comme de la propagande, appuie Bert Van der Auwera, entrepreneur et membre du bureau d’Econopolis. La meilleure comparaison est celle du magasin de jouets qui vendait rapidement des chèques cadeaux à -50% juste avant la faillite. Cela ressemble à un accord, mais c’est une arnaque.”

“La Flandre… est en Belgique”

Rik Torfs, ancien recteur de la KULeuven et expert souvent consulté au nord du pays, iniste sur le risque de blocage politique qu’un tel discours risque d’engendrer: “La ‘radicalisation’ de Paul Magnette rend de plus en plus difficile la formation d’un gouvernement centriste équilibré en Belgique. Il est permis de rêver d’une ‘politique de gauche’, mais il ne faut pas oublier que la Flandre se trouve aussi en Belgique.”

Bart De Wever, président de la N-VA, coupe court: ‘Tandis que les coûts de notre politique sociale évoluent jusqu’à devenir impayables, un tiers de la population active wallonne ne travaille pas. Pourtant, le PS continue à plaider pour… moins de travail. Ce pays a besoin de l’inverse: une politique sociale juste et une valorisation du travail.”

“Les visions socio-économiques dominantes au Nord et du Sud du pays ont rarement été aussi opposées, constate le chroniqueur Alain Gerlache. Sur fond de graves déficits des finances publiques, cela met la cohésion de la Belgique plus que jamais sous pression.”

En effet. Au moins, les données de la campagne électorale sont claires. La capacité à se parler ensuite, beaucoup moins.

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