L’achat de parts par la Région flamande dans Brussels Airport, l’arrivée de Stijn Bijnens chez Proximus ou la disparition du Sénat témoignent d’une flamandisation larvée de la Belgique. Les partis francophones de la majorité fédérale regardent en silence. C’est ce que relèvent certains médias et ce que dénonce l’opposition.
Le titre de l’éditorial du Soir, ce jeudi matin, était cinglant: “Les nationalistes avancent, les francophones regardent“. Il a d’ailleurs été relayé rapidement par des ténors socialistes, dont l’ancienne ministre wallonne Christie Morreale, ou par la présidente de DéFi, Sophie Rohonyi.
Pour l’opposition, c’est clair: les francophones de la majorité fédérale regarderaient le train nationaliste passer.
Une flamandisation larvée
“En moins d’une semaine, le gouvernement fédéral a entériné la suppression du Sénat, écrit notre collègue. A laissé la Flandre porter sa participation dans l’aéroport national à 39%. Et a validé la nomination d’un manager à la tête de Proximus.”
Derrière “les apparences de la gestion éclairée”, les francophones “ont de quoi froncer les sourcils”, souligne l’éditorialiste. Car il s’agit bien d’une flamandisation larvée qui se poursuit. “On n’y verrait pas malice si des nationalistes flamands ne se trouvaient pas à l’origine des décisions.” La N-VA tirerait les fils.
Cette flamandisation larvée avait déjà été évoquée lors de la prise de participation plus large de la région flamande dans l’aéroport national. Jean-Luc Crucke (Engagés), ministre fédéral de la Mobilité, avait tempéré: “Ce gouvernement Arizona tente de promouvoir une meilleure collaboration entre les entités fédérées et le fédéral. Ici, les deux seront autour de la table au conseil d’administration, l’occasion de montrer que c’est possible de bien travailler ensemble.”
Une majorité de CEO NL
La désignation du Limbourgeois Stijn Bijnens à la tête de Proximus, en remplacement du Français Guillaume Boutin, rajoute une couche à l’inquiétude. La RTBF en a fait un sujet: “Avec la désignation du nouveau patron de Proximus, une majorité de patrons ‘flamands’ sont à la tête des entreprises publiques.”
La liste est longue, c’est vrai: Chris Peeters chez bpost, Sophie Dutordoir à la SNCB, Jannie Haek à la Loterie, Koen Van Loo à la tête de la SFPIM, Johan De Cuyper chez Skeyes… Seul Marc Raisière à la tête de Belfius, mais qui sera bientôt remplacé par un Flamand, et Benoit Gilson chez Infrabel, sauvent la mise. Il convient aussi de rajouter, pour être juste, Pierre Wunsch à la Banque nationale et Arnaud Feist chez Brussels Airport, reconnaît le service public.
Précision importante, encore: s’il n’y a pas de règles pour ces nominations, souligne le constitutionnaliste Christian Behrendt (ULg), il est de tradition que le président du conseil d’administration soit d’un autre rôle linguistique que le CEO. Les francophones ne sont donc pas sans rien.
L’importance de la Flandre dans la gestion économique n’est pas nouvelle et la plupart de ces nominations ont été entérinées dans des gouvernements avec le PS. Mais avec la N-VA au pouvoir, l’opposition place la vigilance en arme de contestation.