Entre craintes et assertivité, la Belgique se positionne face à la rage tarifaire de Donald Trump

David Clarinval - BELGA PHOTO BENOIT DOPPAGNE

Face aux menaces de guerre commerciale lancées par les États-Unis à l’encontre de l’Union européenne, le ministre de l’Économie David Clarinval travaille à une “position commune assertive qui tient compte des intérêts belges”, a-t-il fait savoir jeudi lors de la séance plénière de la Chambre.

Le président américain Donald Trump a annoncé mercredi, à l’occasion de la première réunion de son cabinet à la Maison Blanche, que les produits européens feraient l’objet “prochainement” de 25% de droits de douane.

Interrogé à la Chambre, le ministre Clarinval (MR) a appelé à “veiller à apporter une réponse commune et proportionnée”, tant au niveau européen qu’au niveau belge.

Au niveau national, le ministre indique avoir initié une réflexion depuis plusieurs semaines. Celle-ci vise à adopter une “position commune assertive qui tient compte des intérêts belges.” La position belge sera “largement concertée avec les Régions”, a-t-il assuré.

Cette réflexion est ouverte dans le cadre du processus de concertation DGE (Direction générale Affaires européennes et Coordination).

28 milliards d’euros

Selon le ministre, les exportations annuelles belges vers les États-Unis représentent 28 milliards d’euros. Les importations américaines en Belgique s’élèvent à 25,8 milliards. Les secteurs les plus impliqués sont la chimie, le pharmaceutique, la métallurgie, les matières critiques, l’automobile et les machines et appareils électroniques, a-t-il énuméré.

Dans sa réplique, Patrick Prévot (PS) a réclamé la participation des syndicats et des ONG pas invités à la réflexion. François De Smet (DéFI) a pour sa part insisté sur l’innovation. “Notre point faible”, selon lui. Dans la majorité, Charlotte Deborsu (MR) a appelé l’Europe à se réveiller et à enfin déployer une “stratégie industrielle”. Simon Dethier (Les Engagés) a souligné l’importance de la transition climatique.

“L’impact pourrait être très lourd”

Ces droits de douane pourraient fortement impacter le secteur technologique belge, pour qui les États-Unis représentent le deuxième marché d’exportation hors UE après le Royaume-Uni. Sur les onze premiers mois de 2024, ces exportations ont atteint 4,97 milliards d’euros, soit 5,3% des exportations du secteur.

Les produits concernés incluent notamment des machines, du matériel informatique, des équipements médicaux et des composants automobiles.

“Nous savons que le président américain négocie souvent sous haute pression et qu’il pourrait potentiellement utiliser ces droits de douane comme levier pour pousser l’Europe à des efforts supplémentaires en matière de défense ou les lier aux négociations concernant l’Ukraine. Nous devons néanmoins nous préparer au pire”, a alerté le CEO d’Agoria.

La fédération appelle l’UE à réagir “fermement” en prenant des contre-mesures, en déployant des instruments de défense commerciale, mais aussi en maintenant un dialogue constructif et en concluant de nouveaux accords pour atténuer l’impact.

“Le plus gros impact sera sur l’économie américaine”

La Chine se verra également imposer un droit de douane supplémentaire de 10% à cette date, a-t-il annoncé jeudi.

“Ce n’est pas bon pour les affaires” mais “si les Etats-Unis font cela avec tous leurs partenaires, le plus gros impact sera sur l’économie américaine”, estime Luisa Santos, la directrice générale adjointe de BusinessEurope, l’organisation qui regroupe les fédérations d’employeurs de 35 pays, dont la Fédération des entreprises de Belgique (FEB-VBO), le Medef en France et le BDA en Allemagne.

“Pour l’Europe, c’est un appel à se diversifier, à chercher d’autres marchés. Nous avons des alternatives”, a-t-elle expliqué, dans un entretien à l’AFP. “Bien sûr, c’est une situation que nous ne voulons pas. Les États-Unis sont notre principal partenaire commercial et je pense que nous devrions en réalité éliminer les droits de douane, pas en créer”.

“Mais nous sommes également confiants que même si des droits de douane sont imposés initialement, il viendra un moment où les États-Unis comprendront qu’il est préférable de se rendre à la table des négociations et d’essayer, au lieu d’ajouter des droits de douane, de les éliminer”, a ajouté Mme Santos.

Les États-Unis sont le premier investisseur en Europe, et l’Europe est le premier investisseur aux États-Unis, pour un total de 5.300 milliards d’euros en 2022, selon la Commission européenne.

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