C’est l’été. Pour tromper l’ennui les jours de pluie, nous nous sommes amusés à faire un petit devoir de vacances et à répondre à la question : que se passerait-il si jamais nous appliquions chez nous un plan d’économies similaire à celui que François Bayrou tente de faire passer en France ?
La question n’est pas uniquement théorique : les deux pays se trouvent dans une situation budgétaire difficile, avec des ratios d’endettement comparables.
Difficultés comparables
En France, la dette publique consolidée, comprenant les ardoises de l’État central, des collectivités territoriales (régions, départements, municipalités) et des organismes de sécurité sociale, s’élève à 3.345,8 milliards d’euros, soit 114 % du PIB. En Belgique, la dette consolidée est d’environ 640 milliards d’euros (elle comprend aussi la dette de l’État fédéral, des régions, des pouvoirs locaux et de la sécurité sociale), soit 107% du PIB.
Les deux pays accusent un déficit bien au-delà de la limite des 3 % du PIB imposée par l’Europe. Ce déficit s’élevait l’an dernier à 4,5 % du PIB pour la Belgique et 5,8 % pour la France. Et les raisons de ce dérapage sont à peu près les mêmes des deux côtés du Quiévrain : un manque de productivité, un taux d’emploi qui n’est pas des meilleurs, tout cela conjugué à un vieillissement de la population, avec toutes les dépenses en soins de santé et en retraites qui y sont liées.
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Plan Bayrou
Pour sortir de l’ornière, le Premier ministre français François Bayrou a présenté ces derniers jours un plan d’économies exceptionnel de 43,8 milliards d’euros, ce qui correspond à environ 1,5 % du PIB de l’hexagone. Ce plan repose sur deux volets principaux : la réduction des dépenses publiques et l’augmentation des recettes.
Côté recettes, François Bayrou prévoit 13,8 milliards d’impôts supplémentaires : cela passe par une nouvelle contribution sociale, un impôt sur les hauts revenus, la disparition de niches fiscales… Côté dépenses, il table sur des économies de 30 milliards. Parmi les mesures envisagées, il y a la suppression de 3.000 postes de fonctionnaires, la suppression d’agences improductives (la France compte plus de mille agences gouvernementales!), la non-indexation des prestations sociales et des retraites pendant un an, 5 milliards d’économies dans les soins de santé…
Un effort de 9,2 milliards
La transposition intégrale du plan Bayrou chez nous entraînerait donc un ajustement budgétaire très strict, bien plus prononcé que les mesures actuellement envisagées par le gouvernement Arizona, avec une réduction nette massive des dépenses publiques et un fort relèvement des prélèvements obligatoires. Si l’on adoptait ces mesures en Belgique, dont le PIB pèse un peu plus de 20 % du PIB français, cela supposerait en effet un effort budgétaire de 9,2 milliards d’euros, essentiellement à charge du fédéral, avec 3 milliards de nouveaux impôts et 6,2 milliards de réductions des dépenses publiques.
On observe toutefois un point de rencontre dans les politiques budgétaires belges et françaises, dans les soins de santé. L’économie de 5 milliards projetée en France représente proportionnellement à peu près le même effort que le plan d’économies de 900 millions présenté par Frank Vandenbroucke.
En revanche, on voit mal les partis actuellement au gouvernement chez nous accepter une hausse de la fiscalité de 3 milliards d’euros. Cela n’empêche pas le gouvernement Arizona d’avoir mis en place d’importantes mesures structurelles, mais elles ne s’exprimeront que dans le temps : on songe à la réforme des pensions sur laquelle planche Jan Jambon.
Politiquement difficile
Un plan Bayrou ne serait donc pas réalisable chez nous tel quel : il provoquerait un choc économique important, en raison de la combinaison de la réduction des dépenses sociales et des administrations publiques, et de l’augmentation de la pression fiscale.
Politiquement, il serait difficile à faire accepter. Il suscite également de fortes oppositions en France. Mais s’il devait être mis en place, il permettrait de réduire rapidement le déficit public vers un niveau proche de 3 % du PIB et de stabiliser la dette dans la durée.