Lire la chronique de Thierry Afschrift
Des “tax shift” de plus en plus minuscules
Il s’agit d’un impôt supplémentaire, qui n’est destiné spécifiquement ni à lutter contre le dérèglement climatique, ni à aider la sécurité sociale.
Le gouvernement nous présente un nouveau tax shift, c’est-à-dire un glissement d’impôt présenté comme n’augmentant en rien la fiscalité existante, les diminutions de recettes d’un côté étant compensées par la création de nouveaux impôts. Nous en avons déjà connu plusieurs sous le gouvernement précédent. Leur portée était en générale assez dérisoire. Il s’agit chaque fois d’un ensemble de mesures correspondant à des choix politiques, destinées à contenter les différentes familles politiques présentes dans le gouvernement, sans autre cohérence que la recherche du maintien en place de celui-ci. Pour cela, il faut permettre à chacun d’obtenir un petit quelque chose, même s’il doit consentir une concession dans un autre domaine. Chaque parti fait évidemment en sorte de ne parler que de son “trophée”.
En l’occurrence, il s’agit de deux mesures. D’une part, une réduction (enfin!) de la cotisation spéciale de sécurité sociale qui frappe les revenus imposables. De l’autre côté, une taxe sur l’embarquement lors des transports aériens. Cette cotisation spéciale de sécurité sociale avait été votée en 1994 pour, prétendait-on, alléger le fardeau de la sécurité sociale en déficit. Celle-ci est toujours en déficit et on n’explique évidemment pas comment la suppression de cette cotisation va y changer quelque chose. Soit ce déficit est acceptable, et il était inutile de prévoir une cotisation, soit on se décide aujourd’hui à créer un trou pour tenter d’en boucher un autre.
Toujours est-il qu’aujourd’hui, cette fameuse cotisation était en réalité un petit impôt supplémentaire sur le revenu. Le fait de la calculer à part et de la stipuler en faveur de la sécurité sociale et non du Trésor permettait d’affirmer qu’il ne s’agissait pas d’un impôt alors qu’elle en avait toutes les autres caractéristiques. Mais en fait, elle s’ajoutait à un impôt sur les revenus déjà très lourd, comme on le sait. Il est donc temps de la démanteler, après 28 ans pendant lesquels personne n’a eu, ni le courage de la supprimer, ni celui de l’intégrer à l’impôt sur les revenus, ce qui aurait amené à en élever le barème.
Comme le plus grand tabou des finances publiques belges est qu’il est inimaginable de réduire les recettes, il a bien fallu “compenser” cette réduction d’une cotisation par la création d’un nouvel impôt. Et le moment était venu de donner satisfaction aux écologistes, après la débâcle de leur programme nucléaire qui les a amenés, contrairement à leur doctrine, à accepter la prolongation de la durée de vie de deux réacteurs.
Pour cela, rien de tel qu’une taxe démagogique pour les défenseurs de la planète qu’ils disent être. On a donc créé une taxe sur l’embarquement dans les avions, pour bien montrer que l’on se battait pour réduire les émissions de CO2 que l’on était prêt à accroître avec les centrales au gaz voulues par Ecolo. Voilà pourquoi vous payerez quelques euros de plus pour tout voyage en avion: 2 euros pour tous les trajets de plus de 500 kilomètres dans l’Union européenne (plus la Suisse et le Royaume-Uni), 4 euros pour les autres voyages de plus de 500 kilomètres et 10 euros pour les trajets de moins de 500 kilomètres. Personne se n’est préoccupé de la question de savoir s’il existe d’autres possibilités de rejoindre dans un délai raisonnable sa destination: pour éviter la taxe, il faudra aller à Strasbourg en voiture…
Il s’agit d’un impôt supplémentaire qui n’est destiné spécifiquement ni à lutter contre le dérèglement climatique, ni à aider la sécurité sociale. Juste un impôt idéologique de plus mais qui, heureusement d’ailleurs, n’entravera presque pas les souhaits de voyage des Belges privés d’évasion par des normes covid inefficaces.
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