Corentin de Salle, chef du service d’études du MR: “Il est temps d’élaborer un plan d’ensemble sur la réindustrialisation” 

Corentin de Salle, responsable du service d'études du MR.
Olivier Mouton
Olivier Mouton Chef news

Déréglementation et soutien aux industries, nouvelles politique énergétique, exploitation de mines, innovations pour décarboner…: le service d’études du parti libéral organise une journée d’étude, en présence de nombreux CEO, pour donner une nouvelle impulsion à la priorité de la réindustrialisation. Pour dépasser le slogan.

Directeur du Centre Jean Gol, le service d’études du MR, Corentin de Salle met la dernière main à un grand colloque consacré à la réindustrialisation de la Belgique et de l’Europe. Il se déroulera mardi 30 septembre à Tubize, en partenariat avec le Cercle de Wallonie et en présence de nombreux CEO d’envergure, ainsi que des principaux ministres et représentants du MR. Un moment clé pour dessiner les contours d’une vraie vision sur cet enjeu majeur. Il nous en explique les contours. 

Cette grande journée de réflexion sur la réindustrialisation témoigne-t-elle du fait qu’il s’agit d’une priorité absolue pour le MR? 

Absolument. Il ne s’agit pas d’ailleurs de s’informer simplement de l’état de la question, nous avons déjà un objectif ambitieux et des éléments d’analyse clairs pour l’atteindre. La question ne se pose plus: il faut réindustrialiser massivement l’Europe et prendre congé d’une idéologie de la société post-industrielle qui a longtemps prévalu. On a pensé que l’on pouvait se contenter d’une économie de services. Cela a fait beaucoup de mal à l’économie européenne, parce que l’on a perdu un savoir-faire important et l’on est devenu dépendant de grandes puissances. Mais cela a également fait du mal à la planète parce que l’on a délocalisé de nombreuses activités et augmenté la consommation de CO2 de façon massive.  

Ce constat d’une réindustrialisation est posé un peu partout en Europe, mais au même moment, l’industrie souffre fortement. Il y a du boulot, non? 

L’Europe est dans une position schizophrénique, en effet: elle dit qu’il faut réindustrialiser, mais elle ne se donne pas véritablement les moyens de le faire. Il y a un trop grand précautionnisme quand on voit la multiplication de réglementations écologiques. Je ne remets pas en cause l’objectif climatique, mais le principe de précaution est appliqué dans trop de secteurs. A côté de cela, il y a également un trop grand dirigisme: l’Europe pense qu’elle peut créer elle-même les champions de demain, ce qui empêche l’économie de marché de s’organiser et d’innover. La politique énergétique a également été désastreuse avec le slogan du 100% renouvelable dont on sort petit à petit pour redévelopper le nucléaire, notamment. La taxinomie a été revue. Mais des impulsions doivent encore être données et ce colloque que nous organisons est l’occasion de répercuter cette nécessité. 

Le chemin est entamé, il faut désormais écrire le récit complet de cette réindustrialisation? 

Oui, nous manquons de cette vision d’ensemble. Il faut évidemment déréglementer, retrouver une énergie abondante et bon marché – et pas seulement le nucléaire, mais aussi des énergies fossiles dont nous aurons besoin encore quelques décennies. Mais on doit aussi mettre en oeuvre une décarbonation ambitieuse, c’est-à-dire un réel découplage. L’idée n’est pas tellement de consommer moins, mais de réduire l’impact de la consommation sur la nature. Ces dernières années, nous avons pris notre bâton de pèlerin pour visiter un certain nombre d’entreprises et d’universités qui innovent dans les technologies de demain. La question est désormais de voir comment mettre tout cela en oeuvre, même si certains projets peinent à décoller, notamment dans l’hydrogène. Que ce soit clair: cela ne pourra pas se concrétiser sans une aide précise de l’Etat dans certains dossiers. 

Faut-il attendre du MR une vraie action à tous les niveaux de pouvoir? 

Cela a déjà commencé. Une initiative importante fut notamment notre grosse étude sur l’exploitation minière. Nous avons été positivement étonnés du retour médiatique important à ce sujet. Le ministre-président wallon, Adrien Dolimont, est convaincu par cette approche. Des annonces seront bientôt faites parce que nous avons un potentiel important à ce niveau-là. C’est le premier maillon de la chaîne, avec le redéploiement de notre politique énergétique. Un travail important peut également être mené en matière de recyclage. L’objectif fondamental, c’est de renforcer notre autonomie stratégique et de recréer chez nous des marchés conséquents. Au fur et à mesure que l’on avance dans ces dossiers, on s’aperçoit de la nécessité d’un plan d’ensemble sur lequel nous travaillons. Cette journée d’études, avec tous ces CEO, nous apportera davantage de matières premières pour avancer en ce sens. 

L’enjeu est-il, aussi, européen? 

Au niveau du Centre Jean Gol, nous avons créé, il y une vingtaine d’années, un centre européen, ELF pour European Liberal Forum. Nous n’étions que sept ou huit services d’études, mais nous sommes désormais une soixantaine, chacun relié à des partis libéraux. En tant que parti ayant bien performé aux dernières élections, nous avons désormais une audience importante dans ce cénacle. Il y a là un levier important pour pouvoir influer au niveau européen pour imposer une politique de découplage conséquente. Cela fait partie de nos projets. 

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