Commissaire européen : comment le temps se fait l’allié de Reynders, mais pas de la Belgique
Ursula von der Leyen s’impatiente : la Belgique n’a plus que quelques jours pour annoncer son candidat au poste de commissaire européen. Sauf que désigner un nouveau commissaire européen ne semble pas la priorité pour les partis de l’Arizona. Et à ce jeu, tout le monde est perdant. Sauf peut-être Didier Reynders.
La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, souhaite que la nouvelle Commission européenne soit opérationnelle dès le 1er novembre. Si 24 candidats commissaires sont déjà connus, la Bulgarie, l’Italie et … la Belgique, n’ont pas encore soumis de noms.
La pression augmente puisque ces pays n’auraient plus que quelques jours pour faire connaître leur candidat. Ursula von der Leyen aimerait boucler la structure de sa nouvelle Commission et attribuer les portefeuilles d’ici le 9 septembre et commencer les auditions à partir du 14 octobre. Avec ce calendrier, les derniers noms devraient être connus d’ici le 30 août. Soit aujourd’hui.
Même nommé par son pays, le poste de commissaire n’est pas garanti. Le candidat est screené sur ses intérêts financiers. En 2019 deux candidats avaient été recalés à cette étape. Ensuite, le choix doit être validé par le Parlement européen. Le risque de blocage est très concret puisqu’il n’est pas rare de voir le parlement recaler un candidat. Dans ce cas, le pays doit proposer un nouveau candidat qui doit à nouveau passer une audition. Ce qui prend du temps.
Si la date n’est pas coulée dans le béton, il n’y aurait que quelques jours de souplesse. Concrètement, la pression monte pour que lundi au plus tard la Belgique sorte un candidat de son chapeau. Un timing serré lorsqu’on sait que le choix du commissaire n’est clairement pas une priorité du gouvernement en affaires courantes ni des négociateurs de l’Arizona. Cela risque d’être d’autant plus complexe qu’il y a une difficulté supplémentaire : il serait de bon ton que ce soit une femme pour avoir une meilleure répartition entre les sexes. Pour l’instant, seul 6 des candidats commissaires sont des femmes. De quoi plomber les chances de Didier Reynders que l’on murmure grand favori pour la Belgique ? Pas vraiment.
Commissaire, le poste de prestige dont personne ne veut
Si le nom reste encore un peu flou et qu’en Belgique rien n’est jamais acquis, la probabilité que ce soit un libéral francophone est néanmoins grande, « au vu de l’arithmétique et de désirs des uns et des autres», comme le précisait Olivier Mouton il y a peu. Ainsi les partis flamands ne sont guère intéressés par ce poste qui coûte cher lors du casting gouvernemental, mais qui ne soulève apparemment pas les foules en Flandre. Le formateur de l’Arizona et les présidents de partis n’ont de toute façon clairement pas fait du poste un sujet public, ni autour de la table de négociation, semble-t-il. Malgré que les négociations gouvernementales sont sérieusement embourbées (pour utiliser un euphémisme), les négociateurs fédéraux des partis se réuniront à nouveau ce jeudi midi. Selon la VRT, la nomination du commissaire européen devrait être mis sur la table. Il n’empêche que le timing est désormais fort serré pour refaire de la désignation du commissaire un levier de négociation.
Le temps joue en faveur de Reynders
Si le nom de Sophie Wilmès a circulé comme candidate (elle a le double « avantage » d’être une femme et une libérale), celle-ci ne serait a priori pas intéressée puisqu’ayant déjà obtenu le poste de vice-présidente du Parlement européen. Ce manque de concurrence, la pression qui augmente et l’ambition affichée publiquement de Reynders comme candidat auto-déclaré pourraient lui assurer le poste. Il est là. Il est disponible. Il a déjà effectué le job. Il ne demande que ça. Et, en bonus, son travail est, contrairement à celui de Charles Michel, apprécié par von der Leyen. Le temps joue donc clairement en faveur de Reynders. Mais pas en faveur du poste, selon Karel De Gucht, ancien ministre des Affaires étrangères et commissaire européen.
Pour lui en traînant ainsi, la Belgique se laisse marcher sur les pieds. En arrivant parmi les derniers, les postes prestigieux sont déjà pris. Une mauvaise habitude de la Belgique qui montre que la situation actuelle n’est qu’une redite des précédents épisodes. Ainsi « Marianne Thyssen (CD&V) avait été nommée très tardivement lors de la formation du gouvernement Michel. Didier Reynders (MR) avait dû attendre la nomination de Charles Michel à la présidence du Conseil européen pour devenir enfin le candidat commissaire belge avec pour conséquences qu’ils n’ont pas obtenus de portefeuille important. Selon l’ancien commissaire, « il existe désormais des commissaires de première, deuxième et troisième classe. La première classe regroupe les trois vice-présidents exécutifs et le Haut Représentant pour les Affaires étrangères. Le deuxième échelon comprend les “simples” vice-présidents, et le troisième niveau les “simples” commissaires, qui ne pèsent lourd que s’ils contrôlent une direction générale importante »
Le manque d’empressement de la Belgique fait que «le gâteau semble déjà partagé, les cartes sont distribuées » dit encore De Gucht. Toujours selon De Gucht « Il est fort probable qu’Ursula von der Leyen ait déjà promis bon nombre de faveurs pour obtenir le soutien du Parlement européen. Ce qui reste, c’est du fromage plein de trous.»
En espérant que Didier Reynders aime l’emmental.
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