Comment De Wever a coupé l’herbe sous le pied des syndicats: le gouvernement bouge, les grévistes bloquent

Des syndicalistes, ce lundi matin. Au même moment, Bart De Wever parle. BELGA
Olivier Mouton
Olivier Mouton Chef news

Dans le genre coup de com’ magistral, la façon dont l’Arizona a bouclé son budget pour occuper les gros titre alors qu’une grève historique de trois jours débutait restera dans les annales. Même si le contenu du budget donne du grain à moudre aux contestataires car il est “unilatéral et déséquilibré”.

Le début de la semaine devait être marqué par un mouvement social historique, composé de trois jours de grèves à géométrie variable et d’un “appel de novembre” pour réclamer des mesures équitables. Mais ce lundi 24 novembre, un accord sur le budget fédéral occupe les gros titres de tous les journaux, relayant la mobilisation à l’arrière-plan.

C’est un coup de communication qui restera dans les annales. Difficile d’imaginer que cela n’a pas été fait sciemment. Dimanche, subitement, les négociations se sont accélérées grâce à une avancée sur une hausse ciblée de la TVA. Après un marathon nocturne, Bart De Wever a tenu une conférence de presse pour présenter les mesures.

Le Premier a pris la parole juste au moment où les syndicats commençaient leur travail de sape, limitant leur effet. Le résultat, ce sont des “images du premier jour de la grève historique” en petit sur le site du Soir ou “une matinée calme sur les routes” sur le site de la RTBF. Pas le chaos annoncé.

Bien joué, hein, s’est amusé Georges-Louis Bouchez, président du MR, à la VRT. Le jour même du début de la grève…”

“La grève, on n’en a même pas parlé”

L’image véhiculée est on ne peut plus claire: le gouvernement fédéral bouge (enfin) et prend ses responsabilités, tandis que les grévistes bloquent le pays et rajoutent de la difficulté à la difficulté. Piqûre de rappel: le patronat wallon rappelait vendredi que chaque jour de grève coûte cent millions de plus.

Les trois jours de grève? On n’en a même pas parlé, a confirmé Bart De Wever. Je n’ai jamais senti de pression de l’extérieur sur le kern, jamais. Ceux qui pensent que l’on va conclure un accord parce qu’il y a une manifestation, une grève, parce qu’il y a des pressions des syndicats ou des entreprises se trompent”.

Par contre, ceux qui voient l’écran de fumée sur le mouvement social ne se trompent guère…

Conner Rousseau, président de Vooruit et caution la plus à gauche du gouvernement, a lui-même insisté sur la nécessité de “prendre ses responsabilités”, même si certaines mesures le faisaient “frémir”.

“Aucune perspective pour les gens”

Le retour de boomerang risque toutefois de se faire sentir. Car dans ce budget “équilibré”, selon les termes de De Wever, il y a pas mal de mesures qui toucheront de plein fouet la classe moyenne, de l’indexation plafonnée à un niveau très bas (4.000 euros bruts) à la hausse de la TVA (même ciblée), sans oublier des mesures qui se répercuteront de toute façon sur les Belges comme la taxation des banques.

Il y a certes une petite lueur fiscale sur les revenus du travail, mais elle n’est pas tout de suite substantielle.

“Les économies restent à charge du monde du travail, la flexibilité reste à sens unique, les contrats précaires restent la norme”, s’insurge la FGTB. Le syndicat socialiste estime que le pouvoir d’achat est attaqué et que la porte est ouverte pour un “démantèlement” de l’indexation des salaires.

“Le gouvernement intervient unilatéralement dans le mécanisme d’indexation et dans le dialogue social, s’indigne le patron de la CGSLB. Toucher à l’index, c’est toucher à la confiance. J’ai toujours dit que si la CGSLB faisait grève, c’est que la situation était grave. L’unilatéralité et le déséquilibre de cet accord en sont la parfaite illustration“.

Le gouvernement a peut-être réussi un coup de com’ immédiat, mais il nourrit aussi les contestations sociales à venir.

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