Armés d’une série d’études scientifiques, les citoyens de Watermael-Boitsfort lancent une pétition contre le chauffage au bois. Leur demande ? Que les autorités réagissent pour protéger la population contre la pollution de l’air causée par ce carburant solide.
Depuis le 1er janvier 2025, une nouvelle réglementation est entrée en vigueur dans la Région de Bruxelles-Capitale afin de limiter la pollution de l’air provoquée par les combustibles solides (bûches, pellets, granulés ou autres dérivés du bois…). Mais pour les citoyens de Watermael-Boitsfort, c’est loin d’être suffisant. « Cette législation interdit d’émettre de la fumée visible et/ou odorante. Pourtant, on a pris des photos dans notre quartier où l’on aperçoit encore très clairement de la fumée de cheminée », témoigne Sven Dammann, un habitant de la commune. « Je l’ai signalé à Bruxelles-Environnement, ils sont venus un jour, à midi, pour réaliser un constat. Mais à ce moment-là, les gens ne sont pas chez eux. Ils n’ont donc pas vu cette fumée et sont repartis bredouille. Depuis lors, il n’y a pas eu de suivi. C’est vraiment nul car cela ne permet pas du tout de protéger la santé du public. »
Sven Dammann, accompagné de plusieurs voisins, a donc lancé une pétition auprès des autorités locales et régionales avec une demande simple : agir contre le chauffage au bois, première source de pollution de l’air dans la commune. « Pour la santé et l’environnement, le carbone devrait rester dans le bois au lieu d’être émis. Ce n’est pas une source de chauffage appropriée. »
“Le soir, un véritable smog s’installe dans le quartier”
Au-delà du débat réglementaire, les relevés de terrain semblent montrer que la pollution de l’air s’aggrave localement. “Dans le cadre d’une initiative citoyenne, j’ai installé un capteur de particules fines sur mon balcon. En hiver, je me suis rendue compte qu’il avait un smog chaque soir, aux alentours de 17h”, témoigne Sven Dammann. “Je ne peux plus ouvrir les fenêtres, ni allumer ma VMC”. D’autres communes de la capitale ont également participé à cette étude et le constat est sans appel: “On a pu mesurer que l’air est plus pollué à Watermael-Boitsfort qu’à Ixelles, par exemple.”
“Le brûlage du bois, du charbon ou même des déchets (via les poêles ou feux ouverts) génère des émissions de particules dans des quantités importantes”, alarme le Bruxellois. Pour illustrer ses propos, il se réfère notamment à une étude de Bruxelles Environnement, réalisée en 2022. Selon les autorités régionales, le chauffage au bois représenterait à lui seul un tiers des émissions de particules fines à Bruxelles, devant le mazout.
Et ce n’est pas l’unique problème, selon le Bruxellois: fours à pizza traditionnels, barbecues à charbon… Ces systèmes, souvent non filtrés, exposeraient également les enfants à ces polluants dangereux pour la santé. “Il faut un règlement global”, réclament les habitants de la commune: “Le public n’est pas assez informé!”
Un manque d’information et de prévention
Une meilleure communication de la part des autorités pourrait déjà faire une grande différence. “J’ai des voisins qui ont une pompe à chaleur, mais qui ont quand même installé un poêle. Ils ne sont pas conscients des dangers”, ajoute Sven Dammann. Mais c’est surtout le manque d’actions concrètes qui fait défaut. « On est conscient qu’on ne peut pas tout réglementer. Mais on peut agir déjà localement. Notamment informer sur la nouvelle législation bruxelloise, qui donne le signal. Il faut que les gens comprennent que c’est nocif. »
Pour le Bruxellois à l’origine de la pétition, 4 étapes sont nécessaires pour faire avancer le dossier dans le bon sens: une campagne d’information massive, des mesures précises de la pollution au niveau local, une législation adaptée aux réalités actuelles mais aussi des incitants financiers pour encourager les citoyens à se tourner vers d’autres méthodes de chauffage.
Faut-il interdire le chauffage au bois à Bruxelles?
Quitte à interdire le chauffage au bois, comme à Utrecht? Entre protection de la santé publique et respect des libertés individuelles, la question du chauffage au bois divise. D’autant que certains ménages dépendent encore économiquement de cette méthode de chauffage. Mais pour ces citoyens signataires, le message est clair : respirer un air plus sain passe avant tout. “Je crois que les politiciens ont peur de faire une réglementation qui est perçue comme quelque chose qui pourrait réglementer la vie privée des citoyens. Mais il faut que les gens comprennent que c’est pour protéger la santé publique”, estime Sven Dammann.
D’autant que pour de nombreux ménages bruxellois, se chauffer au bois tient souvent plus du plaisir que d’une réelle nécessité. « Selon les données de Bruxelles Environnement, moins de 1% des ménages à Bruxelles se chauffent principalement au bois », justifie-t-il. Peu de personnes seraient donc impacter par une éventuelle interdiction, selon lui. « Alors que les coûts de l’utilisation du chauffage au bois sur la santé sont, quant à eux, énormes ».
Et si jusqu’à présent, les nombreuses interpellations de ce citoyen engagé sont restées sans réponse, la mobilisation commence à porter ses fruits. La pétition sera examinée par le Conseil communal le 21 octobre prochain. De quoi relancer le débat sur la place du chauffage au bois en ville.
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