Grève historique chez BX1 : la crise interne éclate au grand jour

Caroline Lallemand

Ce mardi 8 juillet, les journalistes et techniciens de la chaîne régionale bruxelloise BX1 se croisent les bras. Pour la première fois, le traditionnel journal télévisé de 18 heures ne sera pas diffusé. Un geste fort, destiné à dénoncer un malaise interne profond.

Depuis deux ans, la chaîne d’information bruxelloise BX1 subit une série d’économies drastiques : suppression d’émissions, réduction du personnel, recours accru à la polyvalence et sous-effectifs dans plusieurs services. Ces ajustements budgétaires se sont traduits, selon les grévistes, par une dégradation du bien-être au travail, une pression accrue sur les équipes, et plusieurs cas de burn-out. Dans leur communiqué, les travailleurs dénoncent un modèle de gestion « qui met de côté le bien-être, l’emploi et la qualité audiovisuelle ».

Des pigistes remerciés sans ménagement

En parallèle, les pigistes, pour beaucoup dépendants financièrement de BX1, ont été remerciés sans ménagement, qualifiés par la direction de simples « variables d’ajustement ». Une terminologie que le personnel juge inacceptable : « La suppression brutale d’émissions ‘pour raisons budgétaires’ et l’arrêt tout aussi brutal de collaboration avec des pigistes dont BX1 constituait l’emploi principal ont suscité colère et incompréhension. »

Un nouveau bâtiment pour BX1, mais à quel prix ?

Le futur déménagement de BX1 dans le bâtiment Frame, situé au cœur de Bruxelles, cristallise également les tensions. Certains choix techniques liés à l’aménagement du site confirment, selon le personnel, une stratégie centrée sur la rentabilité au détriment de la qualité audiovisuelle, de l’emploi stable et de l’environnement de travail. Les équipes s’inquiètent d’un virage structurel qui entérine les dérives déjà constatées.

Deux délégations syndicales ont collectivement démissionné en un an. En cause : l’absence d’écoute de la direction, la brutalité de certaines réunions et un manque de dialogue, explique-t-on chez BX1. Une gouvernance perçue comme verticale, peu transparente et autoritaire, avec des décisions souvent prises sans concertation.

« Le manque de démocratie interne, le manque de transparence dans les choix et les décisions prises par la direction concernant notre travail, le manque de considération pour le personnel mis devant le fait accompli, ainsi qu’un management peu soucieux du bien-être des travailleur·euses se sont traduits notamment par plusieurs burn-out », écrivent les salariés.

Un parachute doré qui ne passe pas

La goutte d’eau qui a fait déborder le vase: les conditions de départ du directeur général Marc de Haan. Révélées récemment dans la presse, elles comprennent des primes jugées généreuses et des privilèges exceptionnels que « personne d’autre n’aurait pu obtenir », selon le personnel. La somme totale est estimée à 550 000 euros, selon le calcul d’un administrateur, dans le cadre d’un arrangement lui permettant de partir en prépension à 61 ans sans perte de salaire.

“Dans ce contexte, les largesses accordées à notre directeur général dans le cadre de son départ anticipé, dont aucun.e autre employé.e ne pourrait bénéficier, nous ont profondément choqués. Tout comme la procédure de succession du directeur général, fermée et opaque. La découverte dans la presse des conditions de départ, des primes versées aux directeurs ainsi que les justifications apportées sont ressenties comme une agression et une injure au vu des efforts consentis et des conditions de travail internes”, peut-on lire dans le communiqué.

Un signal fort pour sauver une mission de service public

En se croisant les bras ce mardi, les travailleurs de BX1 – journalistes, techniciens, cadreurs, monteurs, opérateurs – veulent envoyer un message clair : la coupe est pleine. Le journal télévisé “Le 18h” de ce mardi 8 juillet ne sera pas produit, et c’est volontairement que l’antenne restera muette.

« Pour se dissocier de ces décisions répétées, le personnel de BX1 décide de se croiser les bras une journée », avance le communiqué. Le personnel demande à l’Organisme d’Administration (OA) de « prendre des décisions fermes et concrètes, à la hauteur des besoins, de l’urgence et des missions de service public aujourd’hui mises en péril. »

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