Les agriculteurs européens manifestent contre une baisse programmée des budgets de la politique agricole commune. Une manifestation qui vient ajouter à la grève générale en Belgique .
Ce mardi 20 mai, Bruxelles est le théâtre d’une mobilisation massive des agriculteurs belges et européens. À l’occasion d’une réunion budgétaire importante de l’Union européenne, les agriculteurs, portés par la puissante organisation Copa-Cogeca, qui regroupe les coopératives et les syndicats agricoles européens, ont répondu à un appel à l’action éclair pour faire entendre leur voix. Les agriculteurs belges, via le Boerenbond et la FWA, sont également de la partie. D’autres protestations, comme celles prévues à Dublin et Madrid, amplifient le mouvement à travers l’Europe.
Réforme de la PAC
Leur cible ? La réforme imminente du budget de l’UE, et en particulier de la Politique Agricole Commune (PAC), qui représentait un tiers du budget septennal (2021-2027) de 1,1 trillion d’euros de l’Union européenne (un budget à quoi sont venus s’ajouter les 750 milliards du plan NextGeneration EU). La PAC représente un eu plus de 356 milliards d’euros dans cet ensemble, soit environ le tiers du budget européen. Cependant, la PAC elle-même ne représente pas la totalité de ces 356 milliards d’euros, car ce montant inclut également d’autres dépenses liées à l’environnement et à la gestion des ressources naturelles. En réalité, la PAC est dotée d’environ 270 à 290 milliards d’euros pour les paiements directs aux agriculteurs et les mesures de soutien au marché.
Au cœur des revendications des agriculteurs se trouve la crainte d’une dilution du budget de la PAC. La Commission européenne travaille actuellement à une restructuration de son budget pour le prochain plan septennal, qui pourrait fusionner plusieurs fonds européens en un fonds unique. Une telle réforme menace de réduire l’enveloppe dédiée à l’agriculture, mettant en péril non seulement les revenus des agriculteurs, mais aussi la sécurité alimentaire de l’Union européenne. Comme le souligne Copa-Cogeca, sans un budget robuste pour la PAC, « c’est tout le système agricole et la sécurité de l’UE qui s’effondreront tel un château de cartes ».
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Revendications agricoles
Cette inquiétude est d’autant plus vive que les agriculteurs demandent depuis des années une augmentation du budget de la PAC. Ils estiment que cette augmentation est essentielle pour répondre à deux impératifs : d’une part, soutenir les besoins des agriculteurs face à des coûts de production croissants et à des conditions climatiques imprévisibles ; d’autre part, atteindre les ambitions économiques, sociales et environnementales imposées par l’UE, notamment en matière de transition écologique et de normes de production durable. Pourtant, loin de répondre à ces attentes, la Commission semble envisager une réduction des fonds alloués à l’agriculture, au moment même où elle signe des accords commerciaux controversés, comme ceux avec les pays du Mercosur. Ces accords, craignent les agriculteurs, risquent d’inonder le marché européen de produits agricoles à bas coût, menaçant encore davantage la viabilité des exploitations locales.
« Sans budget pour la PAC c’est tout le système agricole et la sécurité de l’UE qui s’effondreront tel un château de cartes, s’inquiète la Fédération Wallonne de l’Agriculture. Après des années de demande d’augmentation du budget de la PAC de notre part, pour répondre 1aux besoins de nos agriculteurs et agricultrices et aux ambitions agricoles, économiques, sociales et environnementales européennes imposées au secteur agricole, la Commission se moque-t-elle définitivement de son autodénommé “secteur stratégique” ?! Sans oublier le poignard dans le dos récemment planté avec la signature des accords commerciaux avec les pays du Mercosur… »
Discussions sous haute tension
Lundi, le Commissaire à l’Agriculture, Christophe Hansen, a rencontré des représentants de Copa-Cogeca pour tenter d’apaiser les tensions. Dans une interview au Financial Times publiée ce matin, Hansen a défendu la nécessité de préserver le budget de la PAC, arguant que l’augmentation des dépenses militaires de l’UE ne devrait pas se faire au détriment de l’agriculture. Aujourd’hui, c’est au tour du Commissaire au Budget, Piotr Serafin, de faire face à la grogne. Son équipe s’attend à des discussions animées, les agriculteurs souhaitant aborder les aspects techniques de l’intégration de la PAC dans le budget global de l’UE. Les détails de ces négociations, cruciaux pour l’avenir du secteur, seront scrutés de près par les professionnels du monde agricole.