Bras de fer final pour l’Arizona: le risque d’un “Make Belgium Small Again” face à la dystopie américaine

Bart De Wever lors de sa prestation de serment comme bourgmestre d'Anvers.
Olivier Mouton
Olivier Mouton Chef news

Cette fois, cela passe ou cela casse, véritablement, pour la négociation fédérale. Les musculations de dernière minutes créent de la tension. Toujours pas de gouvernement, alors que le retour de Trump change le monde.

Il reste peu de temps pour conclure les négociations fédérales en vue de former un gouvernement. Bart De Wever doit faire un rapport au Roi le 31 janvier. “Un deadline est un deadline”, rétorquait-il lors d’une interview à l’arraché donnée à la télévision flamande, cette semaine, après sa prestation de serment comme bourgmestre d’Anvers… où il resterait bien. Car des tensions sont à nouveau perceptibles, dans la ligne droite fédérale, entre l’axe MR/ N-VA et Vooruit, singulièrement.

L’absence de gouvernement, huit mois après les élections, fait désordre alors que le grand chaos géopolitique a débuté avec l’investiture de Donald Trump aux Etats-Unis. Qui est bien décidé à tout changer” en mode dystopie.

“Depuis hier le grand basculement est en marche, commente le chroniqueur Alain Gerlache, ancien chef politique de la RTBF et ex-porte-parole au Seize. Opposants ou partisans, tout le monde s’en rend compte. Sauf cinq présidents de partis qui préfèrent débattre de la largeur des épaules, de la régionalisation de l’IRM ou répéter qu’ils ont gagné les élections. Comme si le pays n’avait pas besoin d’un gouvernement en ces temps incertains. Quelle médiocrité. Make Belgium Small Again.”

Un cri du cœur, bien vu: que faudra-t-il pour conclure, enfin?

Le dernier bras de fer

Les dernières tensions sont inévitables dans la dernière ligne droite. Pourraient-elles encore faire tout basculer, alors que l’Arizona (N-VA, MR, Engagés, Vooruit et CD&V) est bien la seule formule possible?

Il y a eu ces mouvements d’humeur sporadiques liés, par exemple, aux départs du président du MR, Georges-Louis Bouchez, suite à des frictions au sein de son parti sur le recrutement de mandataires issus de Chez Vous ou pour une interview télévisée – comme d’autres, a-t-il précisé. Mais cela est “anecdotique”, bien que révélateur.

Il y a eu cette volonté de la N-VA de remettre la question communautaire sur la table. Le MR a rapidement affirmé qu’il ne pouvait pas en être question. Cette discussion-là reste relativement cadrée, avec quelques avancées liées aux institutions scientifiques fédérales ou à des politiques plus autonomes, çà et là. Pas de quoi faire s’écrouler le château de cartes, a priori.

Il y a enfin et surtout l’épineux dossier fiscal. Après le tax-shift version “ambition revue à la baisse”, Bart De Wever est revenu avec l’idée d’un (petit) “tax-cut”. L’axe MR/ N-VA pousse dans ce sens, les Engagés ne sont pas contre, le CD&V tient à “sa” réforme fiscale et Vooruit est dans les problèmes. “L’axe MR/ N-VA est vraiment très fort. Mais s’ils continuent, cela va faire sauter Vooruit…”, dit une source proche des négociations à L’Echo.

Si cela devait encore coincer, c’est là.

Dystopie et Silicon Valley

En attendant, le “show” de Donald Trump et de ses alliés, lors de son investiture, suscite de l’inquiétude. Mesurée ou tue dans certains cas. Mais certaines voix s’élèvent pour mettre en garde contre un change radical.

Cela pourrait presque être le scénario d’une série d’anticipation dystopique, résume bien le média français Blast. Donald Trump revient à la Maison Blanche en compagnie d’Elon Musk, l’homme le plus riche au monde, mais aussi de toute une clique de milliardaires et millionnaires. De géants de la tech, aussi, qui ont façonné le monde dans lequel nous vivons. Désormais complices de l’extrême droite, ils mettent en danger notre planète, notre vie privée, nos démocraties et ne cachent pas leur masculinisme. (…) Il y a quelque chose de très orwellien dans ce que nous vivons, à la 1984 et des phrases comme “la guerre c’est la paix”, “la liberté c’est l’esclavage” et “l’ignorance c’est la force” pourraient bien être les devises de MAGA : Make America Great Again.”

“Trump, quand on y réfléchit, a un projet certes d’extrême droite, mais politiquement très lisible. Ce qui m’inquiète davantage, c’est Musk, commente l’économiste Bruno Colmant. Certes, il est fou de joie à l’idée de planter un drapeau sur Mars – encore que je me demande comment l’astronaute va revenir – mais il incarne l’idée de l’homme augmenté et promet, avec quelques disciples de la Silicon Valley, l’homme éternel dans un projet qui semble pour le moins fumeux.”

Il ajoute: “C’est lui qui est véritablement dans un délire. Il y a aussi cette tendance eugéniste, habilement qualifiée de ‘pronataliste’, qui repose sur l’idée que les individus dits “supérieurs” doivent dominer les moins doués. Prenons l’exemple de deux figures de cette mouvance, Malcolm et Simone Collins, qui défendent l’idée qu’en ayant, sur 11 générations, 8 enfants par descendant, leur lignée serait plus nombreuse que la population mondiale actuelle. Et, en effet, à quelques risques de consanguinité près, ils atteindraient 858 milliards de descendants, soit plus de 100 fois la population mondiale actuelle. Le véritable pouvoir souterrain, c’est donc celui de la Silicon Valley, dont Trump n’est sans doute qu’un facilitateur éphémère.”

Pendant ce temps, la Belgique attend toujours son gouvernement.

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