Lire la chronique d' Amid Faljaoui
BCE: aveu d’impuissance de Christine Lagarde
La banque centrale européenne, autrement dit l’institution qui gère nos taux d’intérêt, a donc frappé un grand coup ce jeudi en relevant son taux d’intérêt à court terme de 0.75%.
C’est historique. En général, les banques centrales augmentent progressivement leurs taux d’intérêt de l’ordre de 0.25%. En faisant une hausse du triple, la banque centrale européenne montre qu’elle veut à tout prix casser l’inflation en Europe.
Les banquiers centraux savent, par expérience, que l’inflation c’est comme le dentifrice, une fois qu’il est sorti du tube, bonne chance pour le remettre à l’intérieur. La priorité de la banque centrale européenne c’est donc de lutter contre l’inflation. Clairement, Christine Lagarde, la présidente de cette institution a encore indiqué hier que les taux d’intérêt allaient continuer à monter.
Question : jusqu’à quand ? Réponse ; jusqu’à ce que l’inflation en Europe tourne autour des 2%. Or, comme vous le savez aujourd’hui, l’inflation en Europe était de 9,1% au mois d’août dernier. Le combat contre l’inflation va donc durer quelques mois. C’est aussi un combat social, car ne l’oublions pas, l’inflation frappe surtout les plus fragiles d’entre nous.
Ca ne sera pas facile, car la banque centrale européenne est en partie démunie contre l’inflation pour la simple raison que 47% de l’inflation en Europe, donc la moitié de la hausse des prix est liée aux prix de l’énergie. En clair, la hausse des taux d’intérêt n’a aucun impact sur le fait qu’il y a des soucis de pénuries de matières premières ou que le prix du gaz a augmenté du fait du bras de fer entre l’Europe et la Russie. Christine Lagarde l’a reconnu elle-même, je la cite : “je ne peux pas convaincre les géants de ce monde de baisser les prix du gaz et je ne peux pas réformer le marché de l’électricité”. C’est une manière de dire qu’elle fait ce qu’elle peut, mais qu’il ne faut pas attendre de miracle.
Christine Lagarde a aussi reconnu que la banque centrale a relevé ses taux d’intérêt trop tard, car ses experts se sont trompés en pensant que l’inflation serait provisoire. Vous me direz, si la banque centrale européenne ne peut rien faire contre au moins la moitié de l’inflation, pourquoi augmente-t-elle ses taux ? Réponse : à cause de la psychologie des foules. En montrant qu’elle prend au sérieux la forte remontée de l’inflation, elle envoie un message aux ménages et aux entrepreneurs en leur disant qu’elle veille au dérapage. C’est une manière de les forcer à rester sages en termes de hausse des prix.
Et puis, en relevant son taux d’intérêt, la banque centrale européenne espérait sans le dire que l’euro allait reprendre des couleurs face au dollar. Pourquoi ? Mais parce que l’énergie, dont les factures sont libellées en dollar, est responsable comme je l’ai dit de près de la moitié de l’inflation en Europe. Et comme l’euro est faible, il rend nos importations d’énergie plus chères. En relevant les taux d’intérêt, l’idée est de rendre l’euro plus attractif pour les investisseurs, ce qui devrait doper son cours et donc nous permettre de diminuer notre facture énergétique. Mais le pari de diminuer l’inflation importée est loin d’être atteint. Pour l’heure, hélas, Vladimir Poutine a donc plus d’influence sur l’inflation que notre chère Christine Lagarde.
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