Le MR réunit un colloque sur l’IA : “Une manière de réveiller le politique”

Corentin de Salle
Corentin de Salle, directeur du Centre Jean Gol © D.R.
Vincent Genot
Vincent Genot Coordinateur online news

Le Centre Jean Gol organise ce 5 décembre un colloque, ouvert à tous, réunissant experts, chercheurs et responsables politiques pour dresser un état des lieux de l’intelligence artificielle en Belgique et définir les priorités d’action.

La Belgique est-elle prête à accompagner et à encadrer la transformation profonde que provoque l’intelligence artificielle ? C’est l’enjeu du colloque international organisé à Namurce vendredi 5 décembre 2025 par le Centre Jean Gol et le MR afin d’interroger les choix politiques, économiques et sociétaux qui rythmeront la prochaine décennie. « Il existe énormément d’événements consacrés à l’intelligence artificielle, explique Corentin de Salle, directeur du Centre Jean Gol : mais ici, nous voulons surtout interroger le rôle du politique, ce que les responsables publics peuvent faire pour développer l’IA, l’encadrer et assurer un déploiement optimal en Belgique et peut-être même en Europe. Il y a de quoi s’émerveiller devant les avancées actuelles, mais aussi de quoi s’inquiéter, notamment en raison de la dimension très spéculative du secteur et du retard que nous accumulons dans des domaines où un cadre devient indispensable. Ce colloque est une manière de réveiller le politique. »

Une programme structuré en huit panels

Le programme définitif, dévoilé cette semaine, confirme l’ampleur de l’événement : une journée dense articulée autour de huit panels thématiques, précédés d’une série d’interventions introductives.

La matinée s’ouvrira dès 9 h par une prise de parole du ministre-président wallon Adrien Dolimont, suivie d’un exposé de Charles Gorintin, CTO de la licorne Alan et cofondateur de Mistral, chargé de répondre à une question simple en apparence : « Qu’est-ce que l’IA ? ». Une manière de poser les bases, avant d’entrer dans le cœur des enjeux.

Finance, santé, PME : trois premiers panels très attendus

Le premier panel sera consacré aux liens entre IA et finances : Pierre-Yves Jeholet y débattra aux côtés de Nicolas de Callataÿ (Citi Belgium), Laurent Loncke (BNP Paribas) et Antoine Bruyns (Datasharp). Comment financer la transition, attirer les investissements, réguler des marchés de plus en plus algorithmiques : autant de questions qui devraient structurer la discussion.

Le secteur médical occupera ensuite une place importante, fidèle à la promesse initiale du colloque. Aux côtés de Thibaut Helleputte (DNA Analytics), d’Alixe Evrard (Adidom) et de Ségolène Martin (Kantify), on retrouvera le professeur Giovanni Briganti, spécialiste de l’usage de l’IA dans les maladies mentales. Charles Gorintin interviendra une seconde fois, témoignant de l’importance croissante de l’analyse prédictive en santé.

Un troisième panel, consacré aux PME, réunira la ministre fédérale Élénore Simonet, Clarisse Ramakers (Agoria-Wallonie), Fabrice Brion (I-Care) et Laurent Renard (Phoenix IA). L’objectif : comprendre comment soutenir les petites et moyennes entreprises dans l’adoption concrète de l’IA, entre automatisation, innovation et formation.

Administration, défense, cybersécurité : les enjeux régalien en ligne de mire

La session de l’après-midi débutera par un panel consacré à l’administration : Jacqueline Galant échangera notamment avec Violaine Champetier de Ribes, figure de l’e-gouvernement estonien, et Didier Ongena (Microsoft). Le débat promet de mettre en lumière les avancées à portée de main — et les obstacles persistants — en matière de simplification administrative et d’intégration de solutions IA dans les services publics.

La défense et la cybersécurité feront ensuite l’objet d’un temps fort, avec la présence du général Michel Van Strythem, de Gaëtan Desclée (Cyber Nexova) et de Didier Ongena pour la partie cybersécurité. Le ton devrait être plus stratégique : montée en puissance des drones, autonomie des systèmes, nouvelles menaces hybrides, souveraineté numérique.

Enseignement, géopolitique, éthique : trois panels très politiques

L’enseignement, déjà annoncé comme l’un des fils rouges de la journée, constituera le sixième panel. Celui-ci réunira une diversité rare d’acteurs : Mathieu Michel, Laurent Alexandre, Julie Foulon, Yves De Ville (UCLouvain), Hugues Bersini (ULB) et Michael Lobet (UNamur). Un échange qui s’annonce animé, alors que les universités et écoles affrontent une transformation profonde des méthodes d’évaluation, de la formation continue et de l’acquisition des compétences.

La géopolitique de l’IA suivra avec un casting particulièrement international : David Clarinval interviendra aux côtés d’Olivier Rousseaux (IMEC), de Nicolas Van Zeebroeck (ULB), de l’essayiste Pascal Coppens et du chercheur Yves-Alexandre de Montjoie (Imperial College). Au programme : compétition États-Unis/Chine, souveraineté européenne, dépendance aux infrastructures privées, autonomie stratégique.

Enfin, un dernier panel clôturera la réflexion avec une approche éthique : Laurent Alexandre dialoguera avec Laurent Hublet (Be Central/Roland Berger) et Gilles Babinet, qui publiait récemment Green IA. Une discussion essentielle, centrée sur la responsabilité collective face aux usages futurs de l’intelligence artificielle.

Une journée pensée comme un laboratoire politique

Derrière cette diversité d’intervenants et de thématiques, c’est une même ambition qui se dessine : transformer ces échanges en leviers d’action. Comme le résume Corentin de Salle : « Nous avons la capacité d’agir via notre parti et grâce à la présence de plusieurs ministres impliqués dans ces matières à tous les niveaux de pouvoir. Nous travaillons avec les différents cabinets, au fédéral, au régional et même au niveau européen : l’objectif de cette journée est de challenger une quinzaine à une vingtaine de propositions, en dialogue avec les CEO, les professeurs et experts universitaires ainsi que les responsables politiques, afin d’identifier ce qui peut être appliqué rapidement ou renforcé. La véritable plus-value de ce colloque est d’examiner comment l’intelligence artificielle se confronte à la décision politique. »

La journée se conclura par une intervention de Georges-Louis Bouchez, avant la rédaction des recommandations finales. Reste à voir si ce colloque, pensé comme un « réveil politique », parviendra à imprimer sa marque sur les stratégies belges et européennes en matière d’intelligence artificielle.

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