Lire la chronique d' Amid Faljaoui
A Macron de prouver aux Français qu’ils ne vivent pas en enfer
Le pire a donc été évité pour la France. L’extrême-droite n’entrera pas à l’Elysée et c’est tant mieux.
Simon Kuper, l’un des éditorialistes du Financial Times s’est souvenu ce weekend de la phrase attribuée à l’écrivain Sylvain Tesson : “La France est un paradis peuplé par des gens qui croient qu’ils sont en enfer”.
Si pareille phrase vous faire sourire, tant mieux, mais l’ultra-gauche et l’ultra-droite n’ont pourtant pas cessé de faire croire aux Français qu’ils vivent en enfer !
A les écouter, la France est la championne mondiale de la dette publique, la championne du monde du taux de chômage et la championne du monde la pauvreté. Je ne dis pas que c’est faux, qu’il n’y a pas de problèmes de fins de mois en France, surtout pour les personnes les plus défavorisées, mais à écouter les discours de la gauche radicale et l’extrême-droite, on a l’impression qu’on ne parle pas du même pays, mais du Tchad comme le fait remarquer avec malice mon confrère du Financial Times.
A l’extrême-gauche, certains auraient aimé avoir Mme Le Pen à l’Elysée, car le chaos social que cela aurait engendré préfigurait le “grand soir”, celui de la révolution bien entendu. Mais comment oser penser de la sorte ?
Après la pandémie de 2020 dont on n’est d’ailleurs pas encore totalement sorti, et alors que nous sommes en pleine guerre en Ukraine, vouloir mettre à l’Elysée quelqu’un de proche de Poutine et soutenu financièrement par une banque russe, une dame inexpérimentée qui aurait déstabilisé l’Europe, affaiblit l’euro et fait exploser les déficits budgétaires, c’était vouloir jouer avec le feu, c’était ajouter du malheur au malheur du monde.
Et qui aurait payé le premier la facture ? Je vous le donne en mille : les personnes les plus défavorisées, celles que les partis radicaux se targuent de défendre en premier lieu. A l’extrême-droite, le thème du pouvoir d’achat a prévalu et a même pris le dessus sur la théorie du grand remplacement.
Mais là encore, la réponse de Marine Le Pen à tous les maux réels et fictifs de la France, c’est plus d’Etat. C’est d’ailleurs aussi une antienne qu’on retrouve du côté de l’extrême-gauche. Ok, boomer, plus d’Etat, mais pour faire quoi ? Mais pour corriger les dérives d’un président jugé ultra-libéral, pardi ! Etonnant.
Oui, étonnant, car Macron a justement augmenté les déficits et endetté encore plus la France pour protéger les Français contre le choc de la pandémie.
Macron a également sorti le chéquier pour les protéger contre la hausse du prix du carburant et les méfaits de l’inflation. Et puis, pour souhaiter à ce point le retour de l’Etat, encore faudrait-il qu’il soit parti. Or, l’Etat représente en France 57% du PIB : comment parler d’ultra-libéralisme quand l’Etat ponctionne 57% de la richesse nationale ?
Que cette richesse soit mal ponctionnée, qu’elle soit mal distribuée est un fait, mais dire que l’Etat est absent est faux. L’Etat loin d’être absent en France ou en Belgique, l’Etat au contraire est… partout. La preuve, il s’occupe de votre travail, de votre revenu, de votre santé, de votre retraite, de votre enseignement, de votre logement, de votre transport, de votre nourriture, de votre culture et même de votre religion, sans oublier de votre mort au travers des droits de succession. Proclamer que l’Etat a disparu est un total contresens. Maintenant, c’est à Macron à faire le boulot : en pulvérisant façon puzzle la gauche de gouvernement et la droite républicaine, il a hélas repoussé le débat politique aux extrêmes de l’échiquier. A lui de prouver aux Français qu’ils ne vivent pas en enfer.
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