Bruxelles: l’enfer du Ring Est

Illustration © getty

Entre Zaventem et Léonard, on peut parler d’un véritable enfer pour l’automobiliste qui s’y risque. Entre les travaux qui s’accumulent et un pont pour cycliste à l’histoire de plus en plus ubuesque, il y en a pour tous les goûts. Avec un constat: le surréalisme à la Belge a encore frappé un grand coup.

Les autorités flamandes avaient pourtant prévenu : « évitez le Ring Est ». Un conseil aussi sibyllin que judicieux puisque depuis la semaine dernière la zone s’est transformée en chemin de croix pour les automobilistes qui l’empruntent.

La première phase des travaux avait débuté il y a un an, en avril 2023. Elle a consisté à réparer le béton des murs et des plafonds des tunnels. La seconde est nettement plus invasive puisqu’elle consiste à s’attaquer aux murs latéraux des entrées, puis aux supports du tunnel de l’E411 et, enfin, à la dalle des deux tunnels du ring de Bruxelles. Concrètement, cette deuxième phase a réduit le passage à une seule voie entre les Quatre-Bras de Tervuren et le carrefour Léonard en direction de Namur. De quoi transformer le tronçon du Ring entre Zaventem et Groenendael en véritable piège, surtout si l’on se dirige vers Waterloo. Certains ont mis presque une heure lundi pour faire quelques kilomètres.

Mais ce n’est là qu’une embûche de plus pour l’automobiliste qui vit au sud de Bruxelles. Car outre le carrefour Léonard il y a aussi un autre point noir pour la mobilité depuis quelques mois: le carrefour des Quatre-Bras. Le tunnel qui passe en dessous est ici réduit à deux bandes, puis une. Pour ne rien arranger, depuis un an, de gros travaux compliquent également sérieusement le passage en surface.

Une passerelle à vélo contestée

L’avenue de Tervuren est en effet réduite à une bande des deux côtés depuis février 2023, le tout agrémenté de feux qui rallongent le passage d’autant. La raison de ces travaux est l’installation d’une passerelle en bois pour vélo. Elle fait partie de l’autoroute cyclable F29 entre Louvain et Bruxelles. Un chantier qui aurait dû toucher à sa fin bientôt, puisque la passerelle aurait dû être déposée le week-end dernier. Mais des problèmes techniques ont reporté sine die son installation. Selon Marijn Struyf, le porte-parole de De Werkvennootschap en charge des travaux assure qu’il ne s’agit que d’un report de quelques semaines au maximum. Ce n’est là que le dernier rebondissement en date d’un projet qui a pu déjà compter sur une sérieuse grogne locale et qui a fait les beaux jours de nombreux groupes de voisins.

© De Werkvennootschap

Cela fait quelques mois que cette impressionnante passerelle prend forme sur le terre-plein central de l’avenue de Tervuren. Entièrement en bois et longue de 77,5 mètres, elle aura coûté 5,4 millions. Sa mise en place est un travail délicat et complexe qui implique d’abord de déplacer le pont de la zone de chantier à l’intersection, puis sur le toit du tunnel des Quatre-Bras. Problème, il semble que le toit du tunnel du ring qui passe en dessous ne soit pas suffisamment solide pour supporter le poids d’une telle passerelle (290 tonnes tout de même) et celui des machines qui doivent l’installer. Et d’aucuns se demandent si elle sera même effectivement posée un jour puisqu’il se murmure qu’elle pourrait aussi être trop basse pour le passage d’éventuel transport exceptionnel. Des rumeurs cependant balayées par Marijn Struyf, le porte-parole de De Werkvennootschap en charge des travaux. Il précise que “si l’installation a été reportée c’est pour tout une série de raison et non pas un motif unique. La sécurité du tunnel en est une, les conditions météo une autre”. Et si effectivement le poids de ladite passerelle pouvait potentiellement poser problème, “on trouvera toujours une solution, par exemple, et je dis ça comme ça, en la divisant en deux. Après tout on a déjà posé une vingtaine de ponts sans problème et certains étaient beaucoup plus techniques. La passerelle sera posée, c’est certain.”

Outre la passerelle contestée, la situation du carrefour des Quatre-Bras est d’autant plus chaotique qu’au même moment, la Stib a décidé de rénover les rails de trams sur la section jusqu’à Tervuren et de les remplacer par des bus le temps des travaux. Un chantier qui s’étale également sur près d’un an puisque les trams ne rouleront sur cette section qu’à partir du 7 avril à en croire le site de la STIB. Les travaux sur l’ensemble de la ligne ne devraient eux prendre fin que mi-2025.

Une temporalité qui surprend et aura aussi fait perdre beaucoup d’attrait à la solution des transports en commun puisque lesdits bus se retrouvent eux aussi dans les files sur l’avenue de Tervuren réduite à une bande…

Un encombrement structurel

L’une des raisons de cet encombrement, qui était déjà structurel il faut le reconnaître, est la complexité du carrefour. L’avenue de Tervuren étant divisée en un axe nord et un axe sud, le carrefour des Quatre-Bras est en fait constitué de deux carrefours plus petits situés l’un à côté de l’autre. Et à l’Avenue de Tervuren s’ajoutent encore la chaussée de Malines, l’avenue des Chasseurs, la chaussée de Bruxelles et l’Avenue Baron d’Huart. Le tout étant enchâssé dans la forêt de Soignes, zone protégée, et se situant à la fois en Flandre et à Bruxelles. Toute modification y est donc, euphémisme, compliquée. Par conséquent, le trafic y est depuis de nombreuses années bloqué aux heures de pointe.

© belga

Un projet qui vise à placer les deux axes de l’avenue de Tervuren l’un en face de l’autre est cependant à l’étude. Il s’inscrit dans un cadre plus large intitulé GRUP (pour Gewestelijk ruimtelijk uitvoeringsplan). Un projet qui vise à trouver des solutions pour désengorger quatre des carrefours problématiques du ring Est que sont les Quatre-Bras, Léonard, mais aussi Jesus Eik et Groenendaal. Le projet a été initié à la fin 2018 mais les premières conclusions et pistes concrètes ne sont attendues que pour cet été, toujours selon le porte-parole.

Des quartiers entiers qui suffoquent

Outre les personnes qui empruntent ces grands axes, la situation actuelle fait également des victimes collatérales. Les communes avoisinantes comme Auderghem (surtout les quartiers Sainte-Anne et Saint-Julien) qui “suffoquent sous les embouteillages”  à cause des conducteurs qui essaient de trouver des chemins alternatifs. Mais les habitants de Woluwe-Saint-Pierre, Wezembeek-Oppem, Kraainem et Tervuren sont, eux- aussi, obligés d’être très créatifs pour tenter de sortir de Bruxelles sans trop perdre de temps. Ainsi plus question d’emprunter la fameuse avenue Baron Albert d’Huart sans vérifier au préalable la fluidité de la circulation. Une avenue qui est pourtant une porte de sortie naturelle de Bruxelles. L’avenue de Tervuren est aussi régulièrement bouchée jusqu’au rond-point.

Le problème c’est qu’il n’y a pas de véritable alternative. Ces quartiers étant le plus souvent entourés de forêt, les voies de sorties ne sont, par la topologie des lieux, pas légion. A défaut, les différents échevins de la mobilité de la zone songent ou ont contacté Waze pour que ce dernier évite les petites rues, sous peine de voir la moindre rue de leur commune engorgée. Tous devront cependant prendre leur mal en patience puisque ces travaux du Ring Est sont loin d’être terminés. Les perturbations sont en effet prévues jusqu’en octobre, si tout se passe comme prévu.

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