Bientôt un train Virgin entre Londres et Bruxelles ?

Robert Van Apeldoorn
Robert Van Apeldoorn Journaliste Trends-Tendances

Des trains rouges Virgin pourraient arriver à Bruxelles-Midi à partir de 2030, et concurrencer Eurostar. C’est la conséquence d’une décision du régulateur ferroviaire britannique. Bientôt une bataille des prix ?

Il y aura bientôt de la concurrence sur la ligne ferroviaire Bruxelles-Londres et Londres-Paris, qu’Eurostar est le seul transporteur à desservir. C’est la conséquence de la décision prise par le régulateur des transports britanniques, l’ORR, qui a donné accès à Virgin Trains Europe Holdings à un dépôt de maintenance à Londres, Temple Mills International, au nord-est de la capitale, déjà utilisé par Eurostar. C’était indispensable pour lancer un service transmanche.

 »Quand j’ai appris la nouvelle, je n’ai pas pu m’empêcher de filer à St Pancras pour célébrer avec une partie de l’équipe » a indiqué Richard Branson, patron du groupe Virgin. « Nous avions discrètement préparé une série de banderoles et de sacs cadeaux à distribuer aux voyageurs d’Eurostar. » Il s’est fait photographier à la gare de Londres Saint Pancras. « Tout comme nous avons bousculé les acteurs établis dans les airs, sur les mers, et comme nous avons déjà été leaders sur le marché ferroviaire britannique — nous sommes prêts à recommencer. »

6 millions de passagers par an

Virgin, qui a eu une expérience d’opérateurs ferroviaire en Grande-Bretagne, a pris une option pour l’achat de 12 rames à grande vitesse Alstom Avelia. L’ORR parle d’un trafic de 6 millions de passagers par an, de liaisons « de Londres à Paris, Bruxelles et, plus tard, Amsterdam. » Virgin n’était pas le seul projet de train transmanche, mais le régulateur a estimé qu’il était le plus solide et le plus étayé. Les autres ont été refusés par l’ORR : Trenitalia, Evolyn ou Gemini (avec Uber).

La fin du monopole de fait d’Eurostar

Voilà qui mettrait fin au monopole de fait exercé par Eurostar depuis 1994. La filiale de la SNCF, qui a absorbé Thalys, est restée le seul transporteur de passagers à passer par le tunnel, bien que le marché soit ouvert. Cela fait longtemps que Getlink, l’opérateur de l’Eurotunnel, cherche à attirer des concurrents pour augmenter le trafic (donc les péages).

En 2013, le CEO de Getlink (appelé alors Eurotunnel), Philippe Gounon, appelait de ses voeux d’autres opérateurs, « Par exemple Virgin Rail » nous avait-il dit dans une interview, « qui roule sur la ligne à grande vitesse britannique, qui pourrait aller jusqu’à Bruxelles ou Paris. » Il aura fallu 12 ans pour que le projet soit lancé, et 5 ans de plus pour qu’il puisse se réaliser.

Des prix bientôt plus bas ?

L’allemand DB avait annoncé vouloir relier Francfort à Londres (via Bruxelles) pour les jeux Olympiques de 2012 dans la capitale britannique, et a fini par y renoncer.

Pour les voyageurs, l’arrivée de Virgin est plutôt une bonne nouvelle, elle laisse présager une concurrence sur les prix sur une destination pas bon marché, car le ticket inclut le paiement du tunnel. Pour Eurostar, c’est plus ennuyeux. L’opérateur historique devra partager l’usage du dépôt de Temple Mills International, cela pourrait freiner ses projets de croissance.

Riposte anticipée d’Eurostar

Eurostar est conscient des enjeux. Ce n’est pas pour rien qu’une commande de 50 nouvelles rames Alstom a été annoncée il y a juste quelques semaines. Elles entreront en service à partir de 2031, avec une plus grande capacité que les rames actuelles, car elles auront deux étages. 

Elle avait fait la même chose quand la DB avait annoncé son arrivée, et avait commandé de nouvelles rames Siemens Velaro, les mêmes que celles envisagées par la DB, qui avait fini par renoncer. Eurostar a répété l’approche, et a commandé des rames Alstom Avelia, comme celles choisies par Virgin, bien que ce dernier s’intéresse aux rames à un seul niveau. Cette initiative ôtera au nouveau concurrent l’effet de nouveauté technologique.

Les autres obstacles

Pour Virgin, ce n’est que le début du processus. Les rames Alstom doivent être commandées, fabriquées, surtout certifiées pour passer le tunnel sous la Manche. Les stations de Paris Nord, de Bruxelles Midi et, plus tard, d’Amsterdam, devront sans doute être adaptées. Les trains transmanche ne peuvent s’arrêter n’importe où. Ils doivent partir d’une zone stérile, un site où l’accès aux quais est contrôlé, le train lui-même est rangé dans une zone fermée, avec des salles d’attente isolées du reste de la gare. Les sites actuels, de taille limitée, n’ont peut-être pas la capacité pour accueillir deux opérateurs à partir de 2030.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Expertise Partenaire