Baisse des prix de VE d’occasion : avis de tempête sur le secteur du leasing

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Le secteur du leasing fait face à une crise, notamment à cause du prix des voitures électriques sur le marché d’occasion. Les objectifs d’électrification du parc automobile de l’UE devraient encore plus compliquer les choses, alors que le leasing est justement un moteur important de l’adoption des VE.

Le secteur européen du leasing accuse le coup. En cause : les prix de revente bas des véhicules électriques, une fois que les compagnies les mettent sur le marché d’occasion. Ces prix chutent plus rapidement que ceux des voitures à moteur thermique. Les VE d’occasion sont même entre 20 et 30% moins chers que ce qu’ils coûtaient lors de la pandémie, tandis que les thermiques coûtent en moyenne 15% de plus, rapporte Reuters

Les prix des VE sont finalement plus bas que ce à quoi les opérateurs s’attendaient lors du début du contrat de location, qui s’étend en général sur une période de trois ans. Les bailleurs sont donc en perte lorsqu’il s’agit de revendre le véhicule. Pour s’adapter à cette baisse des prix, ils ont dû augmenter les tarifs du leasing de voitures électriques. Ils ont doublé en trois ans, et certains VE sont devenus plus chers que des véhicules thermiques équivalents, alors que c’était l’inverse auparavant. Ce qui n’est pas forcément un bon argument pour attirer des clients.

Que 10% de la flotte, mais…

La situation place donc les opérateurs devant un point d’interrogation. Les prix de revente devraient rester volatils pendant les cinq à dix ans à venir. Certains commencent à craindre pour leurs activités, au vu du cours des choses. “Si nous étions poussés très, très fort, que tout doit être électrique trop tôt … mes actionnaires diraient ‘nous ne voulons pas prendre le risque’ et nous serions hors du marché”, explique franchement Tim Albertsen, PDG d’Ayvens, l’une des plus grandes sociétés de leasing automobile d’Europe, à Reuters. “Soyons honnêtes, sans nous, qui prendra le risque ?”

Ayvens a une flotte de 3,4 millions de véhicules. Un dixième des véhicules est électrique. Même ratio chez Arval (groupe BNP Paribas), qui détient 1,7 million de véhicules. Même si cette part est petite, les pertes réalisées ne sont pas insignifiantes, fait remarquer Bart Beckers, vice-président d’Arval. Les deux expliquent que prolonger la durée des contrats et relouer une voiture une deuxième ou une troisième foispeut être une certaine parade contre les baisses des prix d’occasion.

Et surtout : cette part est appelée à augmenter considérablement dans les années à venir (et avec elle, logiquement, la perte à la revente). L’UE a déjà voté la loi de la (quasi) fin des moteurs thermiques pour 2035 : seuls les VE ou voitures roulant au carburant synthétique pourront encore être vendus. Pour les sociétés de leasing, une loi spécifique est sur la table de la Commission. Certains observateurs suggèrent qu’il faut mettre le curseur à 100% électrique, en 2030. Dans ce cas, le secteur s’attend à des dommages importants et/ou à des hausses des prix conséquents.

Moteur de l’électrification

Bref, des temps incertains s’annoncent pour le secteur du leasing. Le secteur de la location à court terme traverse d’ailleurs la même situation. Sauf que lui a déjà dû prendre des mesures. La semaine dernière par exemple, Sixt a annoncé réduire la part des VE dans sa flotte. A cause d’un manque d’intérêt des clients d’une part, mais aussi à cause de la dépréciation des voitures à batterie. Hertz, autre grand nom du marché, a pris une mesure similaire il y a quelques mois.

Dans tous les cas, ces difficultés vécues aujourd’hui et perspectives de complications du secteur du leasing ne sont pas anondines. C’est que le leasing est le principal moteur de l’adoption des VE en Europe. Sur toutes les voitures immatriculées en Europe en 2023, 60% l’étaient sour forme de leasing. Pour ce qui est des VE uniquement, ce chiffre atteint même 80%, en moyenne. Selon les données de Dataforce, 60% des contrats de leasing des VE neufs vont à des clients professionnels. En Belgique, ce ratio serait même de plus de 90% – seuls 8% des VE “leasés” en 2023 l’ont été à des particuliers (ce qui s’explique par le système des voitures de société, qui sont toutes sous contrat de leasing).

Si certains acteurs devraient arrêter leurs activités, l’Europe perdrait ainsi un important allié.

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